« Les Papis font de la Résistance » (L. Sepulveda)
L’ombre de ce que nous avons été – L. Sepulveda
Coup de coeur en cette semaine de rentrée pour certains dont je fais partie.
Ce court roman de l’auteur chilien paru en 2009 nous conte l’histoire d’anciens révolutionnaires de Santiago.
Réunis bien des années après leurs faits d’armes (ou d’idées), ils rêvent toujours de propager la révolution.
Et c’est bien ce à quoi ils comptent occuper leurs retrouvailles.
Dans la chaleur étouffante de la capitale chilienne, Arancibia, Salinas et Garmendia préparent un nouveau coup, avec l’aide du « spécialiste ». Hélas, ce spécialiste n’arrivera jamais, victime malgré lui de la chute d’un tourne-disque qui lui est fatale.
Citation 1 :
« Concepcion Garcia fit alors une description assez cohérente et détaillée d’une vie ratée à cause des dettes, du manque d’espoirs et de l’indolence d’un mari qui, d’après ce que comprirent les deux policiers, était passé d’un radicalisme politique disparu dans les années quatre-vingt à une vie consacrée au septième art en qualité de spectateur domestique. »
En moins de 150 pages, Sepulveda arrive à transmettre à son lecteur un riche aperçu de l’histoire mouvementée qu’a connu son pays durant les deux derniers siècles.
Communisme, anarchisme, socialisme modéré, conservatisme, tous les courants politiques qu’a connus le pays sont dépeints à travers les luttes des différents personnages.
Citation 2 :
« Ce fameux gendre est aujourd’hui un des hommes les plus riches du monde, il a fait fortune en achetant pour une bouchée de pain les industries nationales et les a revendues ensuite avec des bénéfices impossibles à évaluer.Ce doit être dur de dormir serré contre les jambes poilues d’une idiote, à titre de compensation il a donc reçu les forêts du Sud et en a fait du petit bois. »
A grand renfort d’un humour bien senti et de situations parfois absurdes, Sepulveda nous transmet l’ambiance qui pouvait alors régner dans ce pays.
Délation et espionnage alimentaient la peur quotidienne au ventre des habitants de Santiago.
Il n’y avait alors plus d’amis ou de voisins qui ne tenaient. Beaucoup étaient victimes d’une amnésie subite (et subie).
La chaleur n’arrange rien au sentiment d’étouffement face aux combats qui se déroulaient alors dans les rues, ou, plus secrètement, dans les arrière-salles des cafés, des bureaux ou encore des administrations. Elle est heureusement contrebalancée, dans le récit, par bien des répliques et des situations qui auraient fait pâlir de jalousie un des frères de Marx (non pas le socialiste … Groucho !).
Bref, vous l’aurez compris, un livre à lire et à relire !
Instructif, documenté, et terriblement (et peut-être aussi étrangement) drôle et loufoque.
L’Ombre de ce que nous avons été – Luis SEPÚLVEDA
Titre original : La sombra de lo que fuimos
Traduit de l’espagnol par Bertille Hausberg
Ed. Métailié
Paru le 14/01/2010
160 pages, 17 €
ISBN 978-2-86424-710-4
P.S : merci à Stef pour ce titre fabuleux !