« Le Dîner », improvisation trop humaine ?

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© Eric Ballot
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« Le Dîner » est un spectacle improvisé, qu’en écrire alors ? Si ce n’est évoquer l’expérience (assez malheureuse) d’un soir. Mais qui nous dit que le lendemain, ce n’était pas absolument génial ?

Le principe est séduisant, mais complexe. Les spectateurs sont invités à assister à un dîner organisé par un couple pour une raison, chaque soir, définie par le metteur en scène. Ce couple invite deux amis à dîner, et l’un des convives emmènera une personne complètement inconnue. Une fois ce cadre installé, le rôle de chacun est attribué au hasard aux acteurs. Une fois leur personnage connu, chaque comédien emmène une partie du public dans un endroit du théâtre afin de lui poser des questions sur ce qu’il sera (son métier ? Quelque chose qu’il sait sur l’un des convives ? Un souvenir d’enfance qu’il lui faudra raconter…) Une fois le questionnaire rempli, le public s’installe dans la salle et les comédiens doivent mémoriser le tout en quelques minutes, pendant que le metteur en scène sélectionne la musique. Enfin, « Le Dîner » peut commencer : les acteurs vont improviser durant une heure.

© Eric Ballot
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On peut regretter la mise en place, longue et fastidieuse. Les déplacements des spectateurs entre l’entrée dans la salle, l’installation sur la scène, puis, après les explications du metteur en scène, un nouveau déplacement aux quatre coins du théâtre… Tout cela prend beaucoup de temps. Il faut ensuite compter un peu plus de 20 minutes pour que l’acteur fasse remplir son questionnaire. Des questions qu’il limite très rapidement : « il faut que ce soit réaliste et réalisable, pas d’aliens qui viennent interrompre le repas ». Soit. Alors que reste-t-il comme option au public ? Répondre à des questions extrêmement précises qui sont souvent dirigées par le comédien lui-même. Outre le manque de liberté et la confusion dans laquelle nous somme plongés, les spectateurs eux-mêmes ont des idées au ras du sol (pour ne pas dire la ceinture). Quand le comédien demande quelle est la nature de sa relation avec l’invitée numéro 2 ? Sa maîtresse. Et ce qu’il sait sur l’invité numéro 3 que les autres ne savent pas ? Il est acteur porno ! Un secret qu’il doit avouer pendant le repas ? Il est ruiné. On pourrait penser aux ingrédients d’un Feydeau et la poésie est vite balayée par des envies graveleuses. Voulues par le public qui est lui-même bridé par les directions données par le comédien. Les questions ayant toutes trouvées des réponses, le retour dans la salle est encore long. Le spectacle débute à 20h, les comédiens commencent à jouer à 20h45.

Et alors que jouent-ils ? On ne saura jamais vraiment ce qui est de la part du comédien et du public dans le jeu des personnages que nous n’avons pas suivi au début. On s’amuse à voir celui qui nous a guidé placé les mots et les situations voulues par les spectateurs, mais ça tourne vite en mauvais boulevard. On salue la performance des personnages qui semblent tous très bien composés (mais on ne le saura jamais vraiment), et on se surprend à penser qu’on aurait préféré une comédie assumée plutôt qu’une situation qui sera toujours entre deux : il n’y a pas l’écriture de Feydeau ni la folie fantastique, drôle et délirante que le public attend d’un vrai spectacle d’impro… En tout cas, on ne reviendra pas voir demain si c’est mieux mais d’autres, sans doute, le feront.

« Le Dîner », improvisation. Mise en scène de Joan Bellviure, 15 et 16 novembre 2015, 13, 14, 15 décembre 2015, 10, 11, 12 janvier 2016, 7, 8, 9 février 2016, au Théâtre de Belleville, 94 Rue du Faubourg du Temple, 75011 Paris. Durée : Variable. Plus d’informations et réservations sur theatredebelleville.com

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