Aux premiers instants, sur fond de rock, Alexandra Castellon bondit sur scène gesticulante et désarticulée. Le ton est donné : « Sales gosses » sera corporel, ce corps incroyable de l’actrice qui tour à tour sera chacun des personnages de la pièce. Entre ironie et espoir, elle danse, virevolte sur scène, inattendue et, tel un chat, retombe toujours sur ses pattes. Ce corps est capital à la réussite de la pièce.
Les multiples rôles qu’elle incarne sont les différents personnages, sales gosses, qui se construisent autour de la figure du bouc-émissaire. Alexandra Castellon est la petite fille brimée, sa mère irresponsable, sa maîtresse qui pètera les plombs et ses camarades de classe qui imitent l’enseignante. Elle est la société qui stigmatise, brutalise… Tous les points de vue sont représentés. L’auteure du texte, Mihaela Michailov, signe un texte poético-réflexif qui illustre le vécu d’une écolière différente. Elle sera victime d’un déchainement de violence de la part des élèves de sa classe. Une histoire extrême où l’on assiste à une scène de brimade brutale et excessive. Tout est vécu par l’actrice : les coups, les cris, les détails les plus sordides. On retrace par les mots le chemin qui guide à la mort d’âmes innocentes.
La mise en scène de Michel Didym emploie ingénieusement la scénographie de Philippe Poirot. Alexandra Castellon est entourée de casiers de collégiens. Si, aux premiers abords, ils paraissent simplement orner les murs, chacun renferme des surprises permettant une circulation inédite du décor et des différentes ambiances. Cette collaboration entre metteur en scène et scénographe illustre comment Didym ne s’enferme pas dans une esthétique : il se renouvelle à chacune de ses créations.
On est marqué par ces « Sales gosses » qui luttent contre la société pour œuvrer à la construction de leur individualité. Michailov questionne la maturité et la volonté de grandir à tous les âges et toutes les responsabilités. Un texte roumain, dans lequel il faut voir la société Européenne mise face à ses démons de négation de la différence.
« Sales gosses » de Mihaela Michailov. Mise en scène de Michel Didym, jusqu’au 18 décembre à La Manufacture, CDN de Nancy, 10 rue Baron Louis, 54000, Nancy. Durée : 1h20. Plus d’informations et réservations sur www.theatre-manufacture.fr
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