Aussi incroyable qu’il puisse paraître, les suicidés aussi ont droit à l’amour dans le monde de Goran Dukic. En même temps, ils le méritent bien, vu que s’il n’y avait l’amour, certains se recouperaient bien les veines.
La première scène pose le décor et le ton : un mec se lève de son lit, et range son appart’ de fond en comble. Puis se coupe les veines. Et la dernière vision du monde (le nôtre) qu’il a, c’est une touffe de poussière qui a échappé à son grand ménage.
Imaginez vouloir en finir avec la vie parce qu’elle est trop difficile à supporter sans votre blonde, et vous retrouver dans un monde sinon pire en tout cas le même, où il faut bosser, manger, boire et même payer des PV, sans la blonde en question… et avec d’autres suicidés aussi suicidaires que dans le monde d’avant.
« Heureusement », Zia (le suicidé du début et personnage principal) entend dire que sa copine – son ex – l’a rejoint dans ce monde. Alors il part, il emmène son ami de beuverie, dans un trip sur les traces de cette fille qu’il croit l’amour de sa…vie.
Et sur le bord de la route, par hasard, il rencontre celle qui lui donnera envie…de vivre.
Un film pas tout à fait rose ou optimiste de prime abord, mais pas totalement cynique non plus.
Il n’est pas question de morale, du droit au suicide ou pas, de la vie ou de la mort.
Il est question de personnes, de mal être et du sens de l’existence, et de ce qui nous fait nous lever et agir.
Ce film est une ballade en voiture avec un mec qui croit être amoureux, une nana qui s’est suicidée par accident, d’autres personnages « hauts en couleur » comme dirait l’autre, et un trou noir dans le moteur qui emporte les lunettes de soleil, les fleurs et les choses importantes.
Un film où les personnages ne peuvent pas sourire et où il n’y a pas d’étoile la nuit.
Un film où la BO est composée de chansons de suicidés.
C’est ainsi que le voulait Goran Dukic.
Et sûrement est-ce cette vision qui a plu à Etgar Keret, l’auteur de Kneller’s Happy Campers (histoire dont est tirée le film), lui qui avait reçu plusieurs proposition d’adaptation.
Une belle vision je trouve, et si les personnages ne sourient pas, les spectateurs, eux, si et plus d’une fois. Et une belle façon de traiter le sujet : par l’absurde.
Qu’y a-t-il de plus absurde que d’avoir envie de vivre par accident, quand on s’est tué par volonté ?
Wristcutters de Goran Dukic, avec Patrick Fugit, Shannyn Sossamon et Shia Whigham. États-Unis, 2006, 91 min. Probablement dispo en DVD.
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