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Cave manga ! Thermae Romae

Mari Yamazaki, l’audacieuse mangakana est l’incarnation du veni, vedi,  vici à la mode japonaise.

Mari est venue en Europe, a étudié à Rome et a épousé un historien italien.

Mari a vu, observé et étudié le rapport des Romains de la grande époque à l’eau.

Mari a vaincu, le monde entier, avec un manga atypique : un romain de l’époque d’Hadrien qui s’inspire du Japon actuel pour innover en son siècle.

Lucius Modestus, architecte, modeste certes mais peu imaginatif, vit dans l’Antiquité dans la capitale de l’Empire Romain. Par le biais d’une faille temporelle , il rencontre des nippons d’aujourd’hui et se découvre une passion commune avec ceux qu’il appelle « les visages plats ». Cette passion ou plutôt cet art de vivre très codifié est celui des thermes. Cures, bains et autre ablutions tout y passe et on découvre autant les Romains que les Japonais dans un mélange curieux de science-fiction et d’hyperréalisme.

Un pont curieux entre deux civilisations croquées avec précision, délice et humour. 5 millions d’exemplaires vendus, c’est à en perdre son latin, non ?

La série Thermae Romae se décompose en 6 petits opus parus chez Casterman dans la collection Sakka, ils sont à grignoter de droite à gauche mais en français!




Mercredi – Soko : la zinzin de l’espace

En 2007, une petite soucoupe volante se pose sur la planète musicale, « I’ll kill her » susurre-t-elle avec conviction. Soko autoproduira la même année un petit album (un EP comme on dit dans le jargon) de 5 titres « Not Sokute ». De festivals en collaborations (Pete Doherty, I’m from Barcelona) la machine s’emballe et 15 000 personnes sont réunies en 2009 en Australie pour voir la brillante brunette interpréter entre autre « The dandy cowboys ».

Azimutée par tant de succès, la festivalière électro folk file à l’anglaise, à L.A où elle se réfugie 3 ans. Les fans, et ils sont légion, craignent qu’elle ne revienne pas.

Nominée dans la catégorie Meilleur Espoir Féminin aux césars en 2010, pour son rôle dans A l’origine, Soko prend bien la pellicule, elle est loin de ressembler à E.T. Elle sera d’ailleurs à l’affiche de deux films Bye Bye Blondie de Virginie Despentes ainsi qu’Augustine d’Alice Winocour. Dans ce dernier, elle jouera une hystérique soignée par le fameux Docteur Charcot.  Tout comme son personnage Soko ou Stéphanie Sokolinski est un brin zinzin mais pas de génie, sans un brin de folie !

La sensation de ce printemps, c’est son nouvel album « I thought I was an alien ». Elle est revenue avec un talent intact, fragile et déjanté à la fois. La frenchy a un univers bidouillé dépouillé ou électrique qui oscille entre mélancolie et contestation. Attention petit bijou extra-ordinaire!

 


Soko :: I Thought I Was An Alien par SOKO




Mercredi – A. David-Néel : Indiana Jones au féminin

Alexandra David-Néel est une aventurière, une orientaliste et une tibétologue renommée. Mais si seulement elle n’était que ça, car à l’instar de grands hommes dont le savoir a traversé les siècles, elle cumule des talents d’une diversité rare. Elle est reconnue pour avoir été franc-maçonne, cantatrice, féministe militante, écrivain et centenaire… de quoi modérer l’audacieuse Jeanne Calment.

Une de ses œuvres les plus connues, Voyage d’une Parisienne à Lhassa a été publiée en 1927.

Ce récit de voyage dans l’Himalaya est très intéressant pour deux raisons : l’évasion et la liberté qui sont intactes 80 ans plus tard mais aussi l’éclairage donné sur la prise du pouvoir chinois sur le toit du monde.

On suit les pérégrinations de notre exploratrice et ses subterfuges pour progresser dans les terres interdites en compagnie de son fils adoptif, le Lama Yongden.

A l’époque où le trekking n’était pas franchement tendance chez les ménagères européennes de moins de 50 ans, avec pugnacité et un œil érudit sur la culture tibétaine, le bouddhisme et l’hindouisme, elle progresse grimée en cachant du mieux possibles ses plans.

« L’Orient – surtout au Thibet – est la terre du mystère et des événements étranges. Pour peu que l’on sache regarder, écouter, observer attentivement et longuement l’on y découvre un monde au-delà de celui que nous sommes habitués à considérer comme seul réel, peut-être parce que nous n’analysons pas assez minutieusement les phénomènes dont il est issu et ne remontons pas suffisamment loin l’enchaînement de causes qui les déterminent. « 

Elle apprend les idiomes tibétains mais voyez-vous à l’époque pas de « Wall street english » pour apprendre le «groma». Traduit des manuscrits. Rencontre des sages et des lettrés, et s’essaiera même à la méditation. Alexandra David-Néel est donc une sommité qui a grimpé vers les sommets au sens propre comme au figuré. Celle qui fut surnommée « la femme aux semelles de vent » a du cran, de l’audace, un caractère bien trempé et ce je ne sais quoi d’inspirant.
Une ode au voyage, en Orient et en soi-même.

 

Quelques-unes de ses œuvres :

  • Dieux et démons des solitudes tibétaines, Plon.
  • Journal de Voyage (Tome 1 et 2) – correspondances avec son mari, Pocket.
  • Le Bouddhisme du Bouddha, Pocket.

 




Mercredi – Un stylo dans la tête

Si on reconnaît quelqu’un à ses amis, les siens sont vraiment haut en couleurs. Karen, Olga, Raphaël et Raoul sont gratinés. Parfait donc pour être des personnages de théâtre. Voila ce que se dit le metteur en scène Victor Aubrac (interprété par Francis Perrin) dans « Un Stylo dans la tête ». Il prend la crème de la crème de leurs défauts et il monte une comédie. Enfin… il essaie!

Reste qu’il faut les convaincre d’être mis à nu devant un public qui ne demande qu’à rire de leurs petits travers. C’est là, la tâche ardue à laquelle notre metteur en scène à succès s’attelle dès l’ouverture du rideau mais sans grand renfort de gentillesse. Cet homme de théâtre un brin égocentrique est assisté, bon gré mal gré par son épouse (Anne Canovas). Mais à faire du faux avec du vrai on risque de se brûler les ailes ; la fiction va le rattraper… cruelle mais drôle avec des dialogues aux petits oignons.

On regrettera une mise en place longuette mais une fois que c’est parti c’est le grand folklore interprété avec beaucoup de talent par des acteurs qui ne tombent pas dans l’excès.

Du théâtre de boulevard, sur les Grands Boulevards exactement, au Théâtre des Nouveautés.

Un stylo dans la tête – Avec Francis Perrin from avosbillets.com on Vimeo.

Une comédie de Jean DELL avec Francis PERRIN

Mise en scène : Jean-Luc MOREAU & Anne POIRIER-BUSSON

Distribution : Anne CANOVAS, Sophie GOURDIN, Xavier GOULARD, Valérie EVEN et Éric BOUCHER.

 

Du mardi au samedi à 20h30

Matinées le samedi à 17h00

et le dimanche à 16h00




Mercredi – Drôle d’animal ce pingouin – A. Kourkov

Kiev 1995, Victor Zolotarev est un vieux garçon solitaire, écrivain raté mais auteur à succès d’une étonnamment longue liste de nécrologies. Dans une Ukraine en faillite, il prend sous sa responsabilité un bien étrange pensionnaire : Un pingouin nommé Micha. L’animal venu du froid ne tardera guère a déprimer sec dans l’appartement sombre et contigu de son naïf propriétaire. Le tableau semble morne et bien triste mais il n’en est rien. De l’absurde, de la dérision, du décalé, voilà ce que nous offre Andreï Kourkov, sur fond de nostalgie de l’URSS et d’intrigue mafieuse.

On pressent dès les premières pages qu’il y a anguille sous roche. Les énigmatiques nouveaux amis de Victor sont bien louches. Ces nécros appelées « petites croix » le sont terriblement elles aussi.

Cependant on poursuit l’aventure dans la nébuleuse de Victor avec délectation. Seuls témoins passifs d’une catastrophe climatique annoncée.

Emprunte d’une lenteur et enroulée dans une épaisse grisaille assez propre aux auteurs de l’Est, l’œuvre de Kourkov n’en est pas moins amère et désopilante.

Auteur Andreï Kourkov
Traduction Nathalie Amargier
Editeur Seuil




Mercredi – Bérengère Krief : She’s not a Barbie girl

Bérengère Krief c’est Marla le « plan cul » de la série courte de Canal + réalisée par Kyan Khojandi et Bruno Muschio (1). Blondinette et charmante, la demoiselle et actrice cache bien son jeu. Sous son adorable minois ce cache une sauvageonne dévergondée mais pas écervelée avec une voix grave inattendue.
Cette Lyonnaise a la tchatche, du charme et un talent incontestable pour le show BREF, une show girl est née. Bérengère la douce s’inscrit dans la lignée de Florence Foresti cash voire même trash mais toujours drôle.

Elle attaque avec force verve, les techniques de dragues, les Parisien(ne)s, les programmes TV au 1er rang desquels « L’Amour est dans le Pré », l’émission de relooking de Cristina Cordula et « Belle toute nue ».

Un peps de folie et beaucoup d’humour un peu potache, gossip et caustique mais parfaitement girly.

Si son premier spectacle seule en scène s’appelait « Ma mère, mon chat et Docteur House », celui-ci nommé plus sobrement « One Woman show » aurait tout aussi bien pu s’appeler « Les mecs, ma télé et Natascha Kampusch ».

Un humour décapant, des vannes qui s’enchaînent à un rythme soutenu avec une liberté et une modernité de ton ainsi que de thèmes.

En ce moment le show c’est au Point Virgule qu’elle le fait :

Texte de : Bérengère Krief et Grégoire Dey
Mise en scène : Grégoire Dey
Collaboration artistique : Nicolas Vital

Point Virgule
7 rue Sainte Croix de la Bretonnerie
75004 Paris




Mercredi – Fantastic Nobody : Bonjour veaux, vaches, cochons….

Le groupe Fantastic Nobody, formé en 2010, est composé de super héros incognitos avec des noms d’animaux : Bunny  à la basse, Fish pour le chant et Birdy à  la batterie. Let’s dance! Leur son animal est métissé et très rythmique. On ressent sauvagement des influences rock mais aussi de pop et de disco avec une touche d’électro (clavier), apportée par Mel Fish la clubbeuse. Mélanie Fish c’est une frenchy, plasticienne, qui chante en français mais pas comme une vache espagnole. Elle est comme un poisson dans l’univers du lapin et du petit oiseau qui avaient fondé le groupe Asyl (1) en 1995.

 

Les 3 fantastiques aiment à imposer leur rythme efficace, leur univers  frais et azimuté et le flow de leurs mots sur des images. Breath est ainsi une des chansons qui figure sur la B.O de «Tout ce qui brille»(2). Très aboutie et planante cette chanson est de celle qui vous trotte en tête et vous ravigote.

alt : Noomiz

 

Sex toy a quant à elle été composée dans le but de rythmer le générique d’un reportage signé par Canal+ au sujet de la masturbation
féminine : «Les Branleuses» (3). Sa légèreté et son super gimmick
nous font ronronner de plaisir.
alt : Noomiz

En 2012, Fantastic Nobody signera la totalité de la Bande Originale du film « Nous York » (4). Des extraits musicaux sont attendus et de pied ferme pour le mois d’ avril.

Un petit groupe, par le nombre de protagonistes mais un grand groupe pour la carrière qu’on leur souhaite de faire dans la jungle du star system, une fois qu’ils auront gagné un peu en maturité.

Notes :

(1) Asyl : Groupe de rock français formé en 1995 à La Rochelle composé de Nicolas Freidline, de son frère Benjamin (aujourd’hui membres de Fantastic Nobody), d’Antoine de Saint-Antoine et de Mathieu Lescop.

(2) « Tout ce qui brille » Comédie française réalisée par Géraldine Nakache, Hervé Mimran avec Leïla Bekhti, Géraldine Nakache et Audrey Lamy (2010).

(3) « Les Branleuses » Documentaire diffusé le 06/07/2011 par la chaîne cryptée Canal+ et réalisé par Frédérique Barraja (photographe).

(4) « Nous York » Comédie française réalisée par Géraldine Nakache et Hervé Mimran dont la sortie sur grand écran est annoncée pour le 7 novembre 2012. Ce film réuni à nouveau Leïla Bekhti et Géraldine Nakache.

(5) La Laitière et le Pot au lait, Fable de La Fontaine : « Adieu veaux, vaches, cochons, couvées » signifie perdre ses illusions.




Mercredi – Boulbar – Highway to… America

C’est dans la salle du Réservoir que se tient la soirée «We are The Lions». C’est dans cette cale de bateau baroque délattée aménagée de bric et de broc et de miroirs au lustre d’antan, que nous avons voyagé avec Bertrand Boulbar. Cet artiste français, auteur, compositeur et interprète a entrepris un road trip entre New York et San Francisco : 8000 kilomètres… pas loin de 5000 miles sur l’asphalte. Armé de sa guitare de son harmonica et d’une carte, il prend les routes secondaires, il roule sa bosse à la recherche d’une autre Amérique. Il livre son carnet de voyage psychédélique et émouvant : ses rencontres, ses émotions, ses insomnies, les paysages.

Un texte poétique et percutant posé d’une voix sourde et grave qui nous conduit « passager sans bagage » en terre comanche.

Pour parachever cette invitation au voyage sur la scène du Réservoir, Bertrand Boulbar était accompagné d’un dessinateur, bricoleur, scrabooker, Vincent Gravé qui nous entraîne dans le rêve un peu plus encore.

Le 27 Février sortira son 3ème album « Motor Hotel » consacré à cette errance américaine de motels en stations services, mi-nostalgique d’une Amérique 60’s, mi-contemplatif face aux grands espaces qui inspirèrent Kerouac et Ginsberg.

Quand Iggy Pop (de « American Dream ») et Gerald de Palmas se rencontre Into the wild (2) ça donne ça :


Burnsville – Trailer de l’album Motor Hotel -… par roymusic

« Burnsivlle, 500 habitants et pas grand chose à faire, à part se marier,
Avec son ami d’enfance,
Il suffira d’une danse,
Au bal de Sunshine Vallee »

Roy Music vous dit quelque chose c’est peut-être parce que la talentueuse rockeuse Mademoiselle K qui voulait tant aller « Jouer dehors » et l’empereur de « La tristitude » Oldelaf, viennent de la même maison…

Prochain concerts :

  • Jeudi 8 mars 2012 – Les Trois Baudets (Paris – 75) – 20h00
  • Samedi 28 avril 2012 – Casino (Dax – 40) – 20h00



Vous avez demandé la Police, ne quittez pas…

Dans la série « The Wire » (en français « Sur écoute »), c’est la police criminelle de Baltimore que vous aurez au bout du fil. Mais quel que soit l’objet de votre appel, ça n’est pas vraiment vous que veulent entendre les inspecteurs Jim McNulty (Dominic West) et Lester Freamon (Clarke Peters).

Eux, c’est les anti-héros des vrais des durs, ils font leur numéro pour pincer les « méchants » de Baltimore et combinent des talents tels que mauvaise foi, alcoolisme et infidélité.

Leur tour favori est la mise sur écoute. Sauf qu’il ne suffit pas de coller son oreille au biniou pour ouïr tous les mauvais coups fomentés par les trafiquants et mécréants de diverses espèces. 

Les écoutes c’est bien sur des machines avec des diodes lumineuses de partout, des numéros qui s’affichent, des chronos qui tournent, des statistiques informatiques et surtout de la paperasse administrative, mais ça n’est pas que ça sinon on serait tenter de raccrocher.

 

Emmenés par l’arbitraire et abusif Major Rawls (John Doman) et le charismatique lieutenant Cedric Daniels (Lance Reddick), les agents de la crim’ brisés par une hiérarchie « the chain of command » pas très flexible usent leurs semelles sur le terrain.

Le terrain de leurs enquêtes c’est les cités « The project » (Saison 1), les docks du port (Saison 2), les meetings politiques (Saison 3), les lycées (Saison 4) et les locaux de l’édition du journal local (Saison 5). Le fil rouge reste cette équipe attachante de bras cassés qui se planquent, traquent, patrouillent et fricotent avec des crapules. Et quelles crapules !! Le personnage ambivalent d’Omar Little (Michael K. Williams) et le musculeux Stringer Bell (Idris Elba) sont fascinants. Leur proximité troublante et la complexité de l’histoire rend parfois ces leaders de délinquants plus attachants que la Police.

Sans en révéler trop, cette scène issue de la saison finale est parfaitement révélatrice de l’ambiance de The Wire :

The Wire a été créée par David Simon et co-écrite avec Ed Burns diffusée sur HBO à partir de 2002. La série préférée de Barack Obama (Las Vegas Sun) est avant tout une véritable fresque sociale. Le message est clair : « The Wire » est aussi une approche sociologique de la vie urbaine et des inégalités.

A regarder en VOST de préférence car l’argot des cités et celui de la marée chaussée sont croustillants !




Vendredi – Quel est le rapport entre un toutou bien dressé et un journaliste militant ?

Les toutous et les journalistes peuvent au sens de Paul Nizan être des « chiens de garde » (1).

Si le premier a le mérite de défendre votre humble demeure, le second peut défendre la république et la liberté de penser, d’écrire et de faire savoir.

Or, en ces temps de campagne électorale n’est-il pas nécessaire de se replonger dans ces notions d’indépendance, objectivité et pluralisme!?

 Serge Halimi a écrit Les nouveaux chiens de garde en 1997 aux Editions Liber – Raisons d’Agir après la crise de 95. Le livre fait écho au pamphlet de Nizan Les chiens de garde.  Le propos était évidemment actualisé puisqu’en lieu et place des philosophes gardiens de l’ordre établi on retrouvait ici les journalistes, éditorialistes… Une réflexion bien étayée sur la force des médias en tant que « contre-pouvoir ».

Le postulat partisan étant le suivant « Au sein d’un périmètre idéologique minuscule se multiplient les informations prémâchées, les intervenants permanents, les notoriétés indues, les affrontements factices et les renvois d’ascenseur. » L’ambiance est donc posée, le texte est vindicatif et certains passages sont écrits au vitriol. On y apprend par exemple que Christine Ockrent (cible privilégiée de ce « jeux de massacre ») fait des « ménages » c’est à dire des interventions payantes, rémunérées par des entreprises du CAC40 pour y évoquer des sujets de société. Ce qui implique une parfaite partialité lors du vote des lois et ce n’est que le début de la longue liste des connivences et népotismes entre politiques et journalistes.

A défaut d’être modéré et de taper aussi sur les politiques « du moment », ça fait réfléchir!

L’ouvrage date de 1997 : pourquoi diable en parler aujourd’hui ?
Et bien parce qu’Halimi s’est adjoint les services de Pierre Rimbert, Renaud Lambert, Gilles Balbastre, Yannick Kergoat pour scénariser un film basé sur son livre. Le film « Les nouveaux chiens de garde » est sorti le 11 Janvier 2012 et est diffusé dans des salles d’art et d’essai (2). Il est rythmé par une alternance d’analyses et d’archives, à la manière d' »Inside Job »(3).
Serge Halimi décrit son film ainsi : « on a fait le choix d’un film de combat, qui ne prétend pas chercher la nuance en toute chose. »

(1) Paul Nizan essai/pamphlet : Les chiens de garde 1932.

(2) Projections

(3) Inside Job, film de Charles H. Ferguson (2010), oscar du meilleur documentaire en 2011.

 




Mercredi – Les enfants de Tensing

Le Tibet est autant idéalisé et rêvé en Occident qu’il est stigmatisé et diabolisé côté Chinois. Difficile finalement de se faire une idée objective puisque ce bout de terre si près des étoiles est hautement fantasmé. « La mendiante de Shigatze » regroupe cinq nouvelles toutes très crues sur les mœurs du Tibet vues par un chinois rustre et partial.

Ma Jian, auteur et voyageur de l’empire du Soleil se pose en seul juge de la culture tibétaine et des villageois qu’il rencontre lors de son périple effectué en 1984. Le moins que l’on puisse dire est que notre voyageur est « Lost in translation » (1), choqué mais aussi fasciné. Au premier rang de sa fascination naissante, les femmes, leur liberté et leur sexualité.


Credit to Benjamin Rajjou

Dans ces nouvelles contant le voyage initiatique dans l’«Empire de l’Herbe», la montagne nous apparaît comme une sorte de personnage omniprésent, auquel font écho des Tibétains anguleux à la vie rythmée par la nature et les rites ancestraux.

Notre Champollion au Tibet nous livre un tableau à mille lieux des chemins battus et emprunte les chemins escarpés qui le mènent entre rude réalité et surnaturel, tour à tour macabre ou érotique.

Notre Candide sur le toit du monde oscille, dans son récit, entre fictions fantasmagoriques et descriptions fidèles des traditions.

Cinq nouvelles : « La Femme en Bleu », « Le Sourire du Lac du Col de Dolm », « Le Chörten d’Or », « La Mendiante de Shigatze « et « L’Ultime Aspersion ».

Paru chez Acte Sud en 1988, dans la collection Terre d’Aventures, ce recueil méconnu permet de prendre un peu de hauteur.

Il s’arpente très rapidement et semble hors du temps, mais ce récit et ces personnage obsèdent.

(0) Tensing Norgay (15 mai 1914 – 9 mai 1986 à Darjeeling) était un sherpa népalais. Il est le premier homme avec Edmund Hillary à gravir l’Everest, le 29 mai 1953.

(1) « Lost in translation », Sofia Coppola, 2003.

Photos de Benjamin Rajjou (merci beaucoup).




Walking Dead – Apocalypse now

Poltrons et pétochards cette série n’est pas pour vous. « The Walking dead » est une série américaine (diffusée sur AMC) se déroulant dans la banlieue d’Atlanta peu après un énorme cataclysme cabalistique. Une atmosphère de fin du monde plane et transforme le paisible quotidien de citoyens lambdas (ni trop gentils ni trop méchants) dans un chaos morbide où les morts ne sont pas tout à fait morts et où les vivants ont bien du mal à le rester. Les morts-vivants (en anglais living dead) donc, sont épouvantablement nombreux et bien que dans un état de putréfaction atrocement avancé, ils sont toujours en quête de chair fraîche.

Vous n’êtes pas sans remarquer la dynamique classique des films de zombies et autres morts-vivants, mixée cette fois à la thématique très en vogue de l’apocalypse.

Comme pour le comic book de Robert Kikman dont est issue la série, certaines scènes sont graphiques jusqu’à écœurement, les plans sont évocateurs, sanguinolents et pas très poétiques : y aura de la cervelle sur les murs, vous êtes prévenus. La série est cependant jugée moins trash et moins cruelle que la BD ; pourtant, au fur et à mesure des épisodes une ambiance malsaine colle aux basques de notre petit groupe de survivants.

Ca s’arrête là pour la ressemblance puisque là série prend, à juste ou à mauvais titre, des libertés vis-à-vis du comic.

« The Walking Dead » n’est pas qu’un cache-cache haletant avec des charognes patibulaires et agonisantes. De telles performances à l’audimat outre-Atlantique ne pourraient se justifier ainsi. Si la critique est partagée, l’audience elle, est bonne et c’est certainement à mettre au crédit de la tension et de l’angoisse véhiculées par les protagonistes bel et bien vivants de la série. Le fil rouge des épisodes est l’honnête petit shérif du conté de Kentucky (Andrew Lincoln) qui mène sa barque sur les rives du Styx en compagnie de camarades d’infortune de tous horizons. Dans le cadre hostile de leurs refuges précaires s’entament un huis clos avec des problématiques bien humaines elles. Leadership, amour, trahisons sèment la zizanie au pays des zombies et emberlificotent les stratégies de survie.

Par ailleurs, on peut voir au travers de cette série une fable moderne sur notre monde trop gourmand en énergies fossiles.
Mais surtout, ces épisodes sont porteurs d’une réflexion sur l’évolution des rapports humains et des comportements dans un monde où cadres sociaux et juridiques classiques ont volé en éclat. Ce « retour à la nature » que vivent les protagonistes est, à l’instar de celui décrit par Hegel, fait de « violences et d’injustices » hurlantes.

Ainsi, même si l’intrigue manque un peu de finesse et que la fin de la saison 1 souffre de quelques lenteurs narratives, le frisson et les rebondissements sont là.

Une petite dose d’adrénaline et d’hémoglobine; voici le trailer.

L’adaptation au format série est réalisée par Frank Darabont qui était aussi le réalisateur de La ligne verte.

S’il fallait le comparer à la vague de films « survivalistes », nous pourrions convenir que « The Walking dead » est :

  • moins sombre que « La route » tiré du livre de Cormac McCarthy et porté au cinéma par John Hillcoat,
  • plus violent que « Je suis une légende » de Francis Lawrence, mais surtout avec plus de personnages…,
  • plus urbain que « Seul au monde » avec Tom Hanks,
  • moins surnaturel que « La guerre des mondes » avec Tom Cruise,
  • moins apocalyptique que « 2012 », pas d’effets spéciaux hallucinants où la statue de la liberté et tous les grands monuments mondiaux symboliques sombrent, s’écroulent… avec fracas.

Et s’il fallait analyser « The Walking dead » aux regards des films d’horreurs, la série est :

  • moins bestiale que « 28 jours plus tard » de Danny Boyle,
  • plus réaliste que dans « Le Territoire des morts » de George Andrew Romero, pour ce qui est des zombies,
  • définitivement plus effrayante que « Scary movie »…



Mercredi – J’irai draguer sur vos tombes

Le mec de la tombe d’à côté, c’est d’abord un roman. Un roman parlant d’une histoire d’amour, qui l’eût cru avec un titre si funeste ?!

L’épitaphe de ce best-seller du grand Nord aurait pu être « Ou comment débuter une histoire d’amour au cimetière ».

Son auteur, Katrina Mazetti, est suédoise et ne fait certainement pas le deuil de l’humour noir. Elle plante le décor d’une Suède rurale et rustre en la personne de Benny -éleveur de bovins de son état- qui rencontre la Suède citadine et cultivée mais austère et froide incarnée par Désirée -bibliothécaire-. Et ça fait des étincelles!

Ces deux protagonistes n’ont rien en commun, ils ne sont pas parfaits et sont eux aussi des « émotifs anonymes »! Des dialogues ciselés pour une histoire inattendue et jamais clichée. Voila qui ressuscitera peut-être votre côté fleur bleue?

Ce roman a ensuite donné naissance à la pièce, mise en scène par Panchika Velez et interprétée au théâtre par Sophie Broustal et Marc Fayet.

Sur les planches c’est mortel, on tombe sous le charme et on rit sans concessions. Les représentations reprennent à Paris après une belle tournée en France. Cette fois c’est au Théâtre du Montparnasse et c’est à ne pas manquer. La mise en scène est épurée et à la fois flamboyante. Pur, frais, juste.


Voila de quoi sonner le glas de la morosité : extrait


Le Mec de la Tombe d’A Côté BA par bonneideeprod

Si le cœur vous en dit, Mazetti a écrit une suite Le caveau de famille mais aussi Les larmes de Tarzan ou Entre le chaperon rouge et le loup, c’est fini.




Le Bourgeois Gentilhomme … perd la boule

Si certains ont un grain de folie, un petit grain de sable alors la troupe qui se produit au théâtre de la Porte Saint Martin, a tout le Sahara dans la tête … François Morel est tout à son aise sur scène et il fait ce qu’il fait de mieux, le pitre. Affublé d’un déguisement de derviche tourneur, il tourbillonne et  lévite un air ahuri pétrifié sur son visage si enclin à la mimique. Ah ça pour sûr, peu de comédiens interprétant Monsieur Jourdain ont fini l’acte IV en slip à la lumière polaire d’un néon trop blanc. La grenouille qui voulait se faire plus grosse que le bœuf façon Molière est ici électrisée par une mise en scène chamarrée et sous acide. Lâchez le « Des »chiens !  

Catherine Hiegel nous propose une mise en scène déroutante, frôlant le grand n’importe quoi. Elle aurait pu tomber dans la facilité qui aurait consisté entre autre à glisser quelques références à l’actualité adjointes de fortes œillades bien senties au public mais non, Catherine Hiegel ne fait pas dans le prévisible. La sociétaire et doyenne de la Comédie-Française offre au public du théâtre de la porte Saint Martin une mise en scène surprenante de la célèbre comédie-ballet de Molière, « Le Bourgeois Gentilhomme ».

Le ballet parlons-en : aux pas de menuet  et pantomimes traditionnels en petits collants succèdent danses tribales, hakkas et entrechats très contemporains. Paradoxalement ça ne jure pas tant que ça avec le texte de Jean-Baptiste Poquelin et c’est certainement ce qu’il y a de plus plaisant dans cette interprétation.

Le chant assez présent dans Le Bourgeois Gentilhomme est quant à lui, assez pénible. Les passages sont longs, trop en décalages avec les costumes et l’interprétation modernisante. Rendons tout de même à  César ce qui lui appartient, Morel quoi que piètre chanteur et danseur est particulièrement cocasse dans son interprétation de « Jeanneton ».  Ce qui nous renvoie à la comédie.

La diction des comédiens est très travaillée et participe pleinement de la dynamique comique de la pièce sans en perturber la destinée. Le maitre à danser (David Migeot) est rudement précieux et  Dorimène (Héloïse Wagner) a cet accent furieusement contemporain de la parisienne bêcheuse de la rive droite.

La prestation des acteurs  est sympathique, Gilian Petrovski est un Cléonte touchant,  Marie-Armelle Deguy est éructante en volcanique Madame Jourdain,  Emmanuel Noblet perfide en Dorante et Alain Pralon excellent en grand charlatan / maître de philosophie.

Cependant il n’y a bien que Jourdain et Covielle (David Migeot encore) pour avoir cette folie lunaire. Aussi, les autres acteurs semblent au service de l’éblouissante révélation scénique de François Morel.

Dans son costume de lumière François Morel est bigrement drôle mais s’il faut concéder le caractère innovant de l’interprétation, on regrettera un hic dans la mise en scène. Un petit quelque chose manque avant l’entracte (peut-être trop classique ?) mais après, il y a un gros quelque chose de trop. Trop provoc’ ou peut-être trop loufoque pour emporter pleinement notre adhésion sans restrictions.

Au-delà de cette nouvelle mise en scène, il est remarquable de voir avec quelle force les thèmes de la pièce trouvent aujourd’hui encore un écho des plus d’actualité. Argent vs Art, Naître vs Paraître, Origines vs Ambitions, … Les thèmes sont là, les absurdités subsistent … Tour d’horizon des maux qui ont traversé les âges, sans vieillir pour autant !

L’art(gent)

« … son argent redresse les jugements de son esprit; il a du discernement dans sa bourse; ses louanges sont monnayées » (I, 1, Maître de Musique)

La délicate relation de l’art et de l’argent peut sembler poussée à la caricature au travers de cette tirade du Maître de Musique. Et pourtant, dans des temps plus proches, les débats autour de l’art contemporain, des mécénats d’entreprise, des placements de capitaux dans toutes sortes oeuvres d’art ne lui confèrent-ils pas une justesse indéniable ?

Que serait l’art sans les soutiens financiers qui l’accompagnent ? Aurait-il pu traverser les âges comme il l’a fait ?

Sans aucun doute y a-t-il bien un substrat indiscutable, fondement de toute forme d’art, sur lequel se base notre discernement du beau. Mais ce fondement n’est-il pas en train de disparaître au profit de pures transactions financières de haut vol, assurant des placements sans risque, au-delà de toute notion de raisonnable (prenons en exemple les montants atteints par les toiles de maître qui se négocient aujourd’hui dans les plus grandes maisons de ventes aux enchères) ?

L’art a besoin de l’argent pour vivre. C’est un fait.
Mais n’assiste-t-on pas aujourd’hui à une déviance à l’extrême de ce rapport incestueux ?
Je vous en laisse juge …


L’être et le devenir, aveuglante ambition

« Monsieur Jourdain. – Est-ce que les gens de qualité en ont ?
Maître de Musique. – Oui, Monsieur.
Monsieur Jourdain. – J’en aurai donc. … » (II, 1)

« Monsieur Jourdain. – Madame ! Monsieur le Comte, faites-lui excuses, et tâchez de la ramener … Ah ! impertinent que vous êtes ! voilà de vos beaux faits ; vous me venez faire des affronts devant tout le monde, et vous chassez de chez moi des personnes de qualité. » (IV, 2)

« Monsieur Jourdain. – Oui, il me faut porter du respect maintenant, et l’on vient de me faire Mamamouchi. » (V, 1)

Au travers de ces trois passages du Bourgeois Gentilhomme, on voit nettement se distinguer les pouvoirs ravageurs d’une ambition démesurée, insensée.

Qui la qualifieraient d’un aveuglement sans faille, qui encore d’un reniement sans scrupule de sa propre famille .

N’est pas Gentilhomme qui veut, vous l’aurez compris. Tout le monde n’a pas la « chance » (?) d’avoir du sang royal couler dans ses veines.
Ou si vous me permettez cette extension, tout le monde n’a pas la chance de connaître le phénomène de starisation, de peoplisation, de succès médiatique, …

Mais que ne ferait-on pas pour l’atteindre ?
Se mettre à dos, femme, enfant, amis …
Se couvrir de ridicule, sans vergogne aucune.
Si vous aussi, vous voyez poindre des « Loft Story », « Nice People », … alors vous voyez de quoi je veux parler.

Et bien sûr, ces nouveaux nobles modernes, ces stars en devenir, ou plutôt « devenues », et déjà loin dans l’oubli, réclament le respect. Leur faire ouvrir les yeux est la plus ardue des tâches que l’on puisse se voir attribuer, tant le scintillement de l’or qui brille dans leur horizon les aveugle !

Peut-être serait-il bon pour notre société de convoquer des Etats Généraux modernes … 


Auteur : Molière
Artistes : François Morel, Marie-Armelle Deguy, Emmanuel Noblet, Alain Pralon, Stephen Collardelle, Héloïse Wagner, Camille Pélicier, Gilian Petrovski, David Migeot, Géraldine Roguez, Eugénie Lefebvre, Anicet Castel, Frédéric Verschoore, Joss Costalat, Romain Panassié, Olivier Bioret + 5 musiciens
Metteur en scène : Catherine Hiegel

 

Théâtre de la Porte Saint-Martin
Du 12 janvier 2012 au 27 mai 2012

 

 




Mercredi – The Sopranos : Mon papa à moi est un gangster

Attention on ne confond pas Les Sopranos et Soprano le rappeur marseillais, les Sopranos c’est la famille italo-américaine au cœur de la série éponyme.

Ne comptez pas sur eux pour chanter, pas même la Traviata.Mais peut être vous feront-ils chanter parce qu’ils sont dans le milieu…

Le tableau est planté dans les années 90 dans le New Jersey et pourtant ça n’a pas pris une ride. Le « mafia blues » mais avec une densité et un suspens en intraveineuse… de l’humour et aussi de la violence.

Plus qu’une série, c’est un mythe aux effets collatéraux avérés…
OUI mesdames, vous aurez envie de passer en cuisine préparer des plateaux entiers de charcuterie italienne,
OUI messieurs, vous serez sans doute pris de la soudaine envie de vous gominer les cheveux,
OUI messieurs-dames, vous allez subitement parler avec les mains.


The Sopranos c’est David Chase aux manettes de 6 saisons avec un générique plus long que le plus grand spaghetti du monde pour la chaîne de télé US HBO.
La mafia, son réseau, ses magouilles, ses « capos » et au centre le padre, Antony Soprano (James Gandolfini ), Tony pour les intimes. En façade, il est bon père de famille assez dodu, un peu dégarni un charisme bien trempé. L’autorité incarnée, le mari, le père, le fils toujours avec fermeté et un machisme sans failles. Au milieu de sa quarantaine il est pris d’états d’âmes comme s’il avait choppé une grosse grippe et entame dans le plus grand secret une psychanalyse pour en venir à bout. Ça n’est pourtant pas l’argent qui manque dans la famille – les Sopranos habitent dans une villa coliséenne -, ni les valeurs reçues en héritage – les Sopranos ont une large famille et des rituels gastronomiques bien établis. En bon italien le sujet de la « mamma » sera longuement abordé avec le Docteur Melfi (Lorraine Bracco). Tony est un malabar, par la carrure, mais un malabar bi-goût, moitié tendre pour la famille moitié intraitable pour le business. Deux intérêts difficilement conciliables… et pourtant il est à la tête d’une organisation de malfaiteurs bien huilée.


Plus qu’un coup cœur une série inoubliable, s’il existe des classiques en littérature celui-ci est un classique des séries…. à partager avec vos amis comme une large pizza.

The Sopranos – The Trailer (VO)

 


The Sopranos trailer par bunglefever