1

Le Bourgeois Gentilhomme … perd la boule

Si certains ont un grain de folie, un petit grain de sable alors la troupe qui se produit au théâtre de la Porte Saint Martin, a tout le Sahara dans la tête … François Morel est tout à son aise sur scène et il fait ce qu’il fait de mieux, le pitre. Affublé d’un déguisement de derviche tourneur, il tourbillonne et  lévite un air ahuri pétrifié sur son visage si enclin à la mimique. Ah ça pour sûr, peu de comédiens interprétant Monsieur Jourdain ont fini l’acte IV en slip à la lumière polaire d’un néon trop blanc. La grenouille qui voulait se faire plus grosse que le bœuf façon Molière est ici électrisée par une mise en scène chamarrée et sous acide. Lâchez le « Des »chiens !  

Catherine Hiegel nous propose une mise en scène déroutante, frôlant le grand n’importe quoi. Elle aurait pu tomber dans la facilité qui aurait consisté entre autre à glisser quelques références à l’actualité adjointes de fortes œillades bien senties au public mais non, Catherine Hiegel ne fait pas dans le prévisible. La sociétaire et doyenne de la Comédie-Française offre au public du théâtre de la porte Saint Martin une mise en scène surprenante de la célèbre comédie-ballet de Molière, « Le Bourgeois Gentilhomme ».

Le ballet parlons-en : aux pas de menuet  et pantomimes traditionnels en petits collants succèdent danses tribales, hakkas et entrechats très contemporains. Paradoxalement ça ne jure pas tant que ça avec le texte de Jean-Baptiste Poquelin et c’est certainement ce qu’il y a de plus plaisant dans cette interprétation.

Le chant assez présent dans Le Bourgeois Gentilhomme est quant à lui, assez pénible. Les passages sont longs, trop en décalages avec les costumes et l’interprétation modernisante. Rendons tout de même à  César ce qui lui appartient, Morel quoi que piètre chanteur et danseur est particulièrement cocasse dans son interprétation de « Jeanneton ».  Ce qui nous renvoie à la comédie.

La diction des comédiens est très travaillée et participe pleinement de la dynamique comique de la pièce sans en perturber la destinée. Le maitre à danser (David Migeot) est rudement précieux et  Dorimène (Héloïse Wagner) a cet accent furieusement contemporain de la parisienne bêcheuse de la rive droite.

La prestation des acteurs  est sympathique, Gilian Petrovski est un Cléonte touchant,  Marie-Armelle Deguy est éructante en volcanique Madame Jourdain,  Emmanuel Noblet perfide en Dorante et Alain Pralon excellent en grand charlatan / maître de philosophie.

Cependant il n’y a bien que Jourdain et Covielle (David Migeot encore) pour avoir cette folie lunaire. Aussi, les autres acteurs semblent au service de l’éblouissante révélation scénique de François Morel.

Dans son costume de lumière François Morel est bigrement drôle mais s’il faut concéder le caractère innovant de l’interprétation, on regrettera un hic dans la mise en scène. Un petit quelque chose manque avant l’entracte (peut-être trop classique ?) mais après, il y a un gros quelque chose de trop. Trop provoc’ ou peut-être trop loufoque pour emporter pleinement notre adhésion sans restrictions.

Au-delà de cette nouvelle mise en scène, il est remarquable de voir avec quelle force les thèmes de la pièce trouvent aujourd’hui encore un écho des plus d’actualité. Argent vs Art, Naître vs Paraître, Origines vs Ambitions, … Les thèmes sont là, les absurdités subsistent … Tour d’horizon des maux qui ont traversé les âges, sans vieillir pour autant !

L’art(gent)

« … son argent redresse les jugements de son esprit; il a du discernement dans sa bourse; ses louanges sont monnayées » (I, 1, Maître de Musique)

La délicate relation de l’art et de l’argent peut sembler poussée à la caricature au travers de cette tirade du Maître de Musique. Et pourtant, dans des temps plus proches, les débats autour de l’art contemporain, des mécénats d’entreprise, des placements de capitaux dans toutes sortes oeuvres d’art ne lui confèrent-ils pas une justesse indéniable ?

Que serait l’art sans les soutiens financiers qui l’accompagnent ? Aurait-il pu traverser les âges comme il l’a fait ?

Sans aucun doute y a-t-il bien un substrat indiscutable, fondement de toute forme d’art, sur lequel se base notre discernement du beau. Mais ce fondement n’est-il pas en train de disparaître au profit de pures transactions financières de haut vol, assurant des placements sans risque, au-delà de toute notion de raisonnable (prenons en exemple les montants atteints par les toiles de maître qui se négocient aujourd’hui dans les plus grandes maisons de ventes aux enchères) ?

L’art a besoin de l’argent pour vivre. C’est un fait.
Mais n’assiste-t-on pas aujourd’hui à une déviance à l’extrême de ce rapport incestueux ?
Je vous en laisse juge …


L’être et le devenir, aveuglante ambition

« Monsieur Jourdain. – Est-ce que les gens de qualité en ont ?
Maître de Musique. – Oui, Monsieur.
Monsieur Jourdain. – J’en aurai donc. … » (II, 1)

« Monsieur Jourdain. – Madame ! Monsieur le Comte, faites-lui excuses, et tâchez de la ramener … Ah ! impertinent que vous êtes ! voilà de vos beaux faits ; vous me venez faire des affronts devant tout le monde, et vous chassez de chez moi des personnes de qualité. » (IV, 2)

« Monsieur Jourdain. – Oui, il me faut porter du respect maintenant, et l’on vient de me faire Mamamouchi. » (V, 1)

Au travers de ces trois passages du Bourgeois Gentilhomme, on voit nettement se distinguer les pouvoirs ravageurs d’une ambition démesurée, insensée.

Qui la qualifieraient d’un aveuglement sans faille, qui encore d’un reniement sans scrupule de sa propre famille .

N’est pas Gentilhomme qui veut, vous l’aurez compris. Tout le monde n’a pas la « chance » (?) d’avoir du sang royal couler dans ses veines.
Ou si vous me permettez cette extension, tout le monde n’a pas la chance de connaître le phénomène de starisation, de peoplisation, de succès médiatique, …

Mais que ne ferait-on pas pour l’atteindre ?
Se mettre à dos, femme, enfant, amis …
Se couvrir de ridicule, sans vergogne aucune.
Si vous aussi, vous voyez poindre des « Loft Story », « Nice People », … alors vous voyez de quoi je veux parler.

Et bien sûr, ces nouveaux nobles modernes, ces stars en devenir, ou plutôt « devenues », et déjà loin dans l’oubli, réclament le respect. Leur faire ouvrir les yeux est la plus ardue des tâches que l’on puisse se voir attribuer, tant le scintillement de l’or qui brille dans leur horizon les aveugle !

Peut-être serait-il bon pour notre société de convoquer des Etats Généraux modernes … 


Auteur : Molière
Artistes : François Morel, Marie-Armelle Deguy, Emmanuel Noblet, Alain Pralon, Stephen Collardelle, Héloïse Wagner, Camille Pélicier, Gilian Petrovski, David Migeot, Géraldine Roguez, Eugénie Lefebvre, Anicet Castel, Frédéric Verschoore, Joss Costalat, Romain Panassié, Olivier Bioret + 5 musiciens
Metteur en scène : Catherine Hiegel

 

Théâtre de la Porte Saint-Martin
Du 12 janvier 2012 au 27 mai 2012

 

 




Le Skeleton Band – Un côté « bastringue » et « bringuebalant »

Le Skeleton Band est un groupe ayant vu le jour à Montpellier, créateur d’un rock sombre et onirique aux multiples influences. Leur album « Bella Mascarade » sera dans les bacs le 20 février. Rencontre avec le chanteur, Alex Lee Jacob. 


Vous avez créé « Le Skeleton Band » en 2007, qu’est-ce que chacun de vous faisait avant de se lancer dans ce projet ?


Alex Lee Jacob : Avant on avait un autre groupe, une première expérience qui nous a appris à faire de la musique. Je sortais du Conservatoire d’Art Dramatique, Bruno (guitare basse et banjo) sortait tout juste du lycée et Clément (batterie) tentait une première année de musicologie.


Qu’est-ce qui a été l’élément déclencheur de l’aventure ?


Le premier groupe s’est séparé, on y était plus nombreux. On avait des divergences de goûts musicaux avec plusieurs membres, cela rendait la situation difficile. On s’est donc retrouvé tous les trois, ensemble nous sommes allés vers la musique qui nous touchait particulièrement. On peut dire que le véritable déclic ça a été quand pour mon anniversaire, j’ai reçu un enregistreur numérique quatre pistes ! Clément et moi nous retrouvions dans mon appartement pour essayer de créer des choses, c’est dans ces moments que sont nées les premières compositions que l’on a jouées avec “Le Skeleton Band” sur scène. Des musiques qu’on ne voulait pas voir “arrangées” par d’autres membres de l’ancien groupe.


C’était quand la première fois que votre travail a été entendu par le public ?


Lors de ma dernière année de Master Arts du spectacle à l’université Paul-Valéry (Montpellier). On a composé la musique de mon travail de fin d’étude tous les trois, c’était en mars 2007.


Quel est le type de musique qui vous touche ?


Notre groupe a des références communes, certains artistes ont été très importants, Tom Waits par exemple nous a beaucoup marqués. Tout ce côté “bastringue” ou “bringuebalant” des choses. L’idée, c’est que tous les sons, qu’ils soient industriels ou sortis de la rue, une fois liés à une musique traditionnelle, ça crée des histoires fortes qui racontent beaucoup de choses. C’est pour cela qu’on a tendance à dire que notre musique est cinématographique, parce que le collage de toutes ces sonorités créé un espace de voyage pour l’auditeur.


Quelles sont ces fameuses histoires que vous racontez dans votre album, « Bella Mascarade » ?


Dans ce disque il y a deux parties. Les huit premières chansons vont ensemble, elles créent une conclusion et un rebondissement au cœur de l’album. Dans celles-ci, il est question de gens qui auraient bien voulu être vagabonds, tout quitter et partir à l’aventure, mais ils échouent. C’est triste car en un sens, c’est pire que d’avoir une véritable vie errante, car ceux qui essayent seulement n’arrivent pas à se détacher de ce qui les entrave, pour pouvoir être libre. La seconde partie est plus fantasque, ce sont des vies de personnages décadents, il y a une chanson qui dépeint un tableau fait d’un équipage de migrants sur un bateau, certains sont travestis, d’autres sont ivrognes… Dans une autre chanson on rencontre un marginal qui refait le monde…


Vous auriez aimé être un vagabond et tout quitter ?


Je ne sais pas ! (Rires), je crois que c’est pas mal de fantasmer. Dans la réalité ce n’est pas la même chose.



Vous essayez de faire de vos prestations en live des moments particuliers ?


On a cette façon particulière d’exprimer notre musique sur scène, que certains qualifient de «théâtrale», même si je ne suis pas entièrement d’accord car ça reste de la musique avant tout. On a aussi eu la possibilité de faire quelques collaborations, ciné-concerts ou concert et bande dessinée. En mars on participe au festival Hybrides puisqu’on joue dans “Épreuve”, le nouveau spectacle de Julien Bouffier. On a toujours des projets annexes qui nourrissent l’univers du groupe.


Ce n’est pas trop difficile de trouver sa place quand on est un jeune groupe aujourd’hui ?


On a jamais eu de concessions à faire, mais on ne vend pas 10 000 albums ! Après, il est vrai qu’on ne gagne pas encore notre vie. On passe tout notre temps à faire de la musique, malheureusement ce n’est pas encore suffisant pour vivre. Même si ça va de mieux en mieux. On a choisi de mettre en avant notre univers qui est, je crois, très personnel. Donc on accepte les inconvénients que cela amène.


Pourquoi portez-vous le même nom de famille que le bassiste ?


Jacob ? C’est notre nom de famille ! Bruno est mon petit frère.


D’ou vous vient l’envie de chanter en Anglais ?


Nos influences sont anglophones, quand on est jeune artiste on essaye de prendre des appuis sur des modèles de musicalité. Les nôtres sont en anglais. Ils viennent de Tom Waits, Léonard Cohen ou Bob Dylan.


Plus d’informations sur Facebook




La Taupe – Méfiez-vous de tout le monde …

Amis paranoïaques, passez votre chemin.
Amis ai-je dit … Abus de langage, on n’est jamais trop prudent.
Les changements de camp sont si fréquents.
Passer d’Est en Ouest et réciproquement …Ce n’est pas un rideau de fer qui va empêcher les transferts et les transfuges.

Vous l’aurez compris, le dernier film de Tomas Alfredson, adapté d’un roman de John LeCarré, nous fait revenir au début des années 70. La guerre froide fait rage. L’information est déjà au centre de toutes les préoccupations.

Dans cet univers, les Services Secrets britanniques (le MI6, aussi appelé le « Circus ») sont en effervescence.
Une mission ratée, un cadavre embarrassant.
Une taupe à identifier.
Tout le monde est présumé coupable. Personne ne peut être entièrement innocent.

S’ensuit alors une véritable guerre psychologique entre les principaux membres dirigeants du plus haut service de renseignement britannique.
Tous les stratagèmes sont à considérer pour mettre la main sur cette taupe.
Cette taupe qui joue double jeu avec l’Est. Qui met en danger les intérêts de la Couronne.

Ils sont bien loin les films d’action à la James Bond …
Pas d’explosion, pas de coups de feu (ou presque), pas de James Bond girl.

Mais une tension de tous les instants.
Et le spectateur n’est pas laissé sur la touche.
La musique, les jeux de lumière, les silences, les jeux d’acteurs.
Tout contribue à répandre ce sentiment de malaise. Un sentiment de crainte. Un sentiment de défiance.
La découverte de la taupe devient la quête personnelle de chacun des spectateurs dans la salle. On ne peut clairement pas abandonner. On ne peut imaginer ressortir de la salle sans la clé du mystère.

Bref … c’est gagné pour Tomas Alfredson !

Ajoutez à cela un Gary Oldman au meilleur de sa forme, qui nous démontre une fois de plus son talent à s’adapter à ses personnages.
Flegme.
Retenue.
Ténacité.
Il ne lâchera rien avant d’avoir mis la main sur cette funeste taupe.

Alors, en cette période grand froid, un seul conseil : allez vous enterrer dans la salle de cinéma la plus proche, et partez avec lui à la recherche de « La Taupe » !

 

Avec : Gary Oldman, Benedict Cumberbatch, Toby Jones, Tom Hardy, John Hurt, Colin Firth,
Mark Strong

Réalisation : Tomas Alfredson

Scénario : John Le Carré, Peter Straughan, Bridget O’Connor

Production : Tim Bevan, Robyn Slovo, Eric Fellner




Yves Bommenel, 10 ans de Montpellier à 100 %

Depuis une dizaine d’années, le festival Montpellier 100% existe.
D’abord dans tout le grand Sud au mois de novembre, puis uniquement sur Montpellier, le festival s’est cherché et s’est trouvé. Dix jours de concert, de danse, d’exposition à travers la ville. Un véritable temps à proportion humaine (il n’est pas difficile d’assister à l’intégralité des propositions du festival) entre le 1er et le 11 février.


Depuis combien de temps portez-vous le projet du festival « Montpellier 100% » ?


Depuis dix ans, le festival est né pour fêter le 100e numéro du Cocazine (un magazine et agenda culturel gratuit diffusé sur tout le Grand Sud NDLR) qui existait lui aussi depuis dix ans. C’est incroyable, quand on sait dans quelle précarité ont été ces deux aventures, on est incapable après vingt ans d’expliquer comment on a tenu.


Essayez !


Bien sûr il y a eu un renouvellement des équipes, et la curiosité y est pour beaucoup également. Je sais que j’aurais déjà jeté l’éponge si chaque année n’avait pas été une occasion d’apprendre quelque chose, ou de découvrir de nouveaux artistes. Dans ce sens, le collectif y est pour beaucoup. On se surprend les uns et les autres.


Ce festival est un espace-temps dédié à la découverte ?


La découverte artistique, on la retrouve dans tous les festivals. Chez nous ce qu’il y a d’intéressant, c’est qu’on interroge les formes différentes du concert, par des installations, ou des projections. Et les artistes eux-même nous interrogent. F.J. Ossang c’est un musicien qui fait du cinéma, pas un cinéaste qui fait de la musique ! Prenez les arts numériques, tout ce qu’on a fait jusqu’à présent, il y a dix ans on était incapable d’imaginer celà possible ! Ou alors c’était tellement colossal qu’il aurait fallu que l’on soit le MoMA pour pouvoir se le permettre. On montre que la musique, ce n’est pas seulement un concert ou un disque.


Vous êtes attentifs à l’évolution de la technologie ?


On est au XXIe siècle, donc la technologie est présente dans la vie de tous les jours, les propositions artistiques intègrent naturellement cette idée. Après, on a essayé de ne pas s’enfermer là-dedans. Quand on propose « OK! » (l’année dernière NDLR), c’est une solution 100% analogique puisqu’en fait, ils fabriquent leurs instruments avec des bouts de bois récupérés, pareil pour « Hell’s Kitchen » qui fait de la percussion avec des éléments pris sur des lessiveuses. C’est intéressant aussi ce mélange entre organique et technologique à notre époque. D’ailleurs, on s’est rendu compte après coup que cette idée de mélange, de recyclage est un peu le fil rouge de notre édition.


Les mélanges, on connaît ça depuis des lustres !


On a bien vu la première décade du XXIe siècle passer, et même si des musiciens comme Black Strobe s’inspirent énormément de la musique du XXe siècle, on est plus dans la fusion des années quatre-vingt-dix où on pouvait dire que telle chose était un bout de funk, telle autre du métal et ici du hip-hop. Aujourd’hui on est dans autre chose, le hip-hop qui intègre de l’électro c’est différent que ces deux styles chacun de leur côté.


Quelles nouveautés dans cette édition du festival ?


La principale nouveauté c’est la venue de F.J. Ossang, on organise une rétrospective importante de ses films. On y ajoute une part d’éducation à l’image avec les Beaux-arts et la fac de Lettres. Le travail avec le Centre Chorégraphique est nouveau lui aussi, il va nous permettre d’accueillir Claudia Triozzi et Haco pour une création.


Un mot sur la programmation ?


On a essayé de ne pas tomber dans des clichés. C’est facile d’aller dans ce sens, d’être très intellos, très « si tu ne connais pas l’encyclopédie numérique en 25 tomes tu vas rien comprendre à ce qu’on te montre ». On est dans un festival qui revendique un côté haut-de-gamme, mais on a confiance en l’intelligence des gens, et en même temps on a de l’humour.


Comment découvrez-vous les personnes que vous programmez ?


On observe, on est entouré de personnes très attentives, je pense notamment à Vincent Cavaroc qui avant était ici et qui maintenant travaille à la Gaité Lyrique à Paris. On a Julien Valnet qui travaille à la Friche de la Belle de Mai à Marseille, ancien montpelliérain lui aussi. Mais j’insiste sur le fait que tout le collectif a sa part d’influence dans les choix de programmation.


Vous, Yves, comment avez-vous fait ce choix de vie ?


J’avais des grands frères qui m’ont élevé à coup de Stones, et j’ai fait beaucoup de radio associative. L’Eko des Garrigues (88.5) à Montpellier ça a été mon université, je dis souvent que j’y ai fait « Sup’ de Punk ». Tous les gens qui ont fait des choses intéressantes dans cette ville sont passés par là bas au début des années quatre-vingt-dix. On y trouvait Fifi de la TAF, Habib d’Uni’Sons, ou les Pingouins… Après je suis allé à l’Institut National de l’Audiovisuel, j’ai eu un parcours d’apprentissage, mais l’Eko c’est ce qui m’a ouvert les yeux sur le monde alternatif.


Quelles sont vos espérances pour l’avenir ?


Pour l’instant dans le festival on diffuse beaucoup de créations, mais on n’est pas un moment de création à proprement parler. J’aimerais aller dans ce sens. Un autre aspect, c’est celui de la médiation, de ce côté-là on a beaucoup de travail à faire. Avoir les moyens de faire un travail d’éducation au son, d’aller dans les collèges et les lycées. Expliquer ce que nous proposons. Donner des clés de compréhension par l’histoire de la musique…


Au début de l’interview vous avez utilisé le mot précarité, vous avez les moyens de vous projeter vers l’avenir ?


Tous les ans on part sur une utopie. On a failli fermer vingt fois, le comptable nous prédit notre mort chaque année. On survit, c’est incroyable. On a un tout petit budget, on fonctionne avec 100 000 euros pour la totalité du festival. Notre force réside dans le fait que nous avons aussi beaucoup de partenaires. Mais on est très loin d’être des barons, chaque année on se demande comment c’est possible.


Tous les détails sur la programmation et les arguments du festival sur : www.festival100pour100.com




El Gusto, rien d’autre


Drôle d’histoire que celle de cette jeune architecte qui, après avoir parcouru le monde, s’est dit qu’elle irait bien faire un tour du côté de là où tout avait commencé : son Algérie natale.

Comme on découvre une terre inconnue, la voilà déambulant dans les rues de la Casbah d’Alger pour finir dans une petite échoppe afin, comme tout bon touriste, d’acheter un miroir souvenir… Mais c’est une véritable machine à remonter le temps et inventer le futur que Safinez Bousbia met alors en marche.

Le vendeur, Mohamed El Ferkioui, ancien chef d’orchestre et accordéoniste, est intarissable sur cette Algérie bercée au son des joueurs de chaâbi – cette musique populaire née dans la casbah des années 1920, mélange de musiques andalouses, berbères et religieuses.

Ils étaient nombreux à avoir fréquenté les bancs du conservatoire pour suivre les cours du maître du genre : El Anka, multi-instrumentiste de génie. Nombreux à s’être perdus de vue, aidés par l’histoire et le temps. La révolution algérienne réduit l’humeur musicale et, en chassant juifs et pieds noirs, enlève une partie de son âme au chaâbi.
Les années noires sont définitives pour certains:  » on ne pouvait pas chanter alors que d’autres pleuraient ». Pourtant, l’amour de la musique est intact et la nostalgie n’a pas de frontière.
Les vieilles branches d’ici et d’ailleurs en rêvaient en secret. La jeune ingénue  s’adonne à la folie : rassembler tous les premiers élèves d’El Anka pour faire renaître le chaâbi d’autrefois sous la direction du pianiste et fils du grand maître.

Neuf ans après la rencontre et après deux années pour retrouver, convaincre et tourner en Algérie (!), l’orchestre El Gusto, « le goût » en espagnol, le « kif », dont l’âge ne se calcule pas, est né.

C’est à travers un documentaire drôle et émouvant, frappant de simplicité, que l’on découvre ces amoureux passionnés et fidèles jusqu’à la fin, où plutôt jusqu’au recommencement !

El Gusto actuellement dans les bonnes salles de cinéma et prochainement en tournée.
(Lien vers les séances pour aller voir El Gusto!)

 

Studio : Quidam Productions (Irlande)

Ecrit et Réalisé par : Safinez Bousbia

Produit par : Safinez Bousbia, Heidi Egger, Philippe Maynial




Dans l’oeil de la Dame aux esclaves, Castorf crée son monde à l’Odéon


 

Le décor sur plateau tournant nous offre en première vue une masure méditerranéenne. Un garage au rez-de-chaussée, réaménagé en chambre de fortune. Un étage avec une petite chambre et une terrasse qui sert de poulailler, la cuisine à l’extérieur. Dès le lever de rideau, le thème de prédilection de Franck Castorf est là : petites personnes et bourgeoisie se côtoient dos à dos, les riches contre les pauvres. Comment les premiers ne prêtent aucune attention aux seconds.


Trois princesses se parlent, se touchent, se caressent. L’une va dans le poulailler, s’allonge et commence à mourir. Râle de trois femmes de robes vêtues. Elles déclament leurs mots, qu’ils soient de Dumas, Bataille ou Müller. Cette litanie est le ton général de la pièce. Personnages « prolos », sans recherche de bonnes manières, goujats riches et obsédés par la futilité. Marguerite Gauthier et ses amies sont des putes, appellation que les personnages décrits par Dumas n’auraient jamais accepté.


Le décors changent, le monde aussi. Public projeté dans un club aux parois de plexiglas animé par un anglais, portant un masque cornu en latex, qui nous rassure : « n’ayez pas peur, ici, soyez juste vous même ! ».


Dans la boîte, on livre Marguerite Gauthier, morte, emballée dans du plastique. Son amant la pleure dans une ambiance fluo-trash. Dès la première heure (sur quatre), le public est averti. L’histoire, le texte, tout est mis au second plan, en soutien de la mise en scène pure. Surtout, ne pas chercher à comprendre, on est à l’inverse du théâtre classique, les mots soutiennent un jeu d’acteur, au public d’en saisir des bribes, des propos, des sensations.


Le drame, on se le créé dans nos têtes. Il est celui qui nous plaira, composé des images qui nous sont offertes.


Décalage, repoussoir de l’obscénité du monde. Un panneau « Anus Mundi » tourne à dix mètres de hauteur sur un cabaret désuet, où la chanteuse, toute heureuse, suit un homme sortant de scène. Elle, frétillant de plaisir, « j’adore les favelas ! », comme d’autres aiment tant la « musique hip hop » ou « l’art de l’Afrique ». Bourgeoisie déconnectée des réalités importantes, évidentes aux yeux de Castorf.


Une partie du public s’exile à la fin de la première partie. Deux heures, si on essaie d’y voir une Dame aux Camélias au sens où l’incarnait Sarah Bernhardt dessinée par Mucha, cela peut paraître longuet. Pour les autres, l’aventure continue.


Lors du retour du public, les trois premiers quarts d’heure sont projetés sur grand écran, pendant que les acteurs jouent dans une cavité du décor. Le procédé est grandiose et impressionnant d’intimité. Dans six mètres carrés, caméramans et preneurs de sons filment deux acteurs. Un huis-clos en gros plan, inimaginable lors de la première partie.


Puis on part plus dans une réflexion de Müller, sur l’esclavage, la condition du peuple noir en Jamaïque, les ouvriers roumains qui défilent sur grand écran, sans oublier la condition du peuple mexicain, déconnecté de ses racines Aztèques dont il ne reste que les pyramides. Essayez de comprendre, c’est finir comme Arnaud de Montebourg le soir de la première : endormi pendant deux heures.


Le spectacle est un voyage, un Grand Huit de sensations, une mise en scène envoûtante, des messages clairs au milieu d’un monde sans repère. Un panneau publicitaire installé sur scène, parodie de la réclame, affiche comme message d’adieu : « Le rêve d’une vie, vivre dans nos meubles ». Castorf réécrit la théorie de la relativité.


 

à partir de l’œuvre d’Alexandre Dumas fils
et des fragments de L’Histoire de l’œil de Georges Bataille et de La Mission d’Heiner Müller

mise en scène Frank Castorf

Certaines scènes de ce spectacle peuvent heurter la sensibilité des plus jeunes, il est donc déconseillé aux moins de 16 ans.

7 janvier – 4 février 2012
Théâtre de l’Odéon / 6e

dramaturgie : Maurici Farré
décor : Aleksandar Denić
costumes : Adriana Braga
musique : Sir Henry

avec Jeanne Balibar, Jean-Damien Barbin, Vladislav Galard, Sir Henry, Anabel Lopez, Ruth Rosenfeld, Claire Sermonne.

production Odéon-Théâtre de l’Europe, Théâtre National de la Communauté française de Belgique

 




L’Amour dure trois ans – F. Beigbeder

Gaspard Proust … A la recherche de l’amour perdu …

C’est l’histoire d’une rencontre.
C’est l’histoire d’un sentiment.

Au début, on ne s’attend à rien.
Et l’instant d’après, c’est une évidence.

Un simple regard a suffi.
Quelques mots et la magie opèra.

On se répète que ça ne durera pas.
On se dit qu’on a déjà vécu ça.

Qui disait que ça n’arrivait qu’aux autres ?
Qui nous privait de ce bonheur jubilatoire ?

Ce n’est sans doute pas très bobo.
Ce n’est peut-être même plus réac.

L’amour me direz-vous ?
L’admiration vous répondrai-je.

Gaspard Proust.
Marc Marronier.

C’est à mes yeux la meilleure raison de courir vérifier si « L’Amour dure Trois Ans ».
Rires. Pleurs. Mais surtout rires.
Rires. Rires. Et surtout rires.

 

 

 




Rencontre avec J. Malkovich, Y. Landrein et L.H. Macarel – Les Liaisons Dangereuses

Lorsqu’on rencontre John Malkovich, on se demande tout d’abord comment le saluer.

Une tape sur l’épaule du metteur en scène Molièrisé de la pièce de théâtre « Good canary » ?
Un bisou esquimau à Osbourne Cox l’agent de la CIA de Burn After Reading ?
Une accolade à Athos mousquetaire du roi dans L’Homme au Masque de fer?
Un baisé russe à Valmont dans la version de Stephen Fears des Liaisons Dangereuses?
Un grand salut à la cantonade en direction de John Malkovich jouant son propre rôle dans Dans la peau de John Malkovich ?
Une petite bise au réalisateur de Dancer Upstairs ?

Et si nous commencions plutôt par une poignée de main ?
Une poignée de main ferme et directe qui laisserait entendre que l’on n’est pas des « bénis oui-oui » mais que tout de même « On aime beaucoup ce que vous faites » !?

Parce qu’avec 50 pièces de théâtre et plus de 60 films à son actif, John Malkovich est une vedette, un dinosaure de la culture, en France et à l’étranger.
Mais pas un de ceux qui traînent des casseroles embarrassantes. Plutôt un des « happy few » en orbite de notre XXIème siècle. Il a joué avec les plus grands mais toujours avec une humilité et une dérision toutes « malkoviennes » et n’a sur la conscience que sa soif insatiable de créativité.

En définitive John Malkovich est un dinosaure dont,  à l’instar de « Denver », on aimerait qu’il soit « notre ami et bien plus encore ».

Et autant dire que l’on n’en mène pas large quand le dinosaure entre dans le foyer du théâtre de l’Atelier, où a lieu la rencontre avec les quelques blogueurs retenus.
Les discussions se font plus silencieuses, les postures se figent, les sourires s’esquissent … et les chuchotements peuvent commencer. Et puis très rapidement, l’atmosphère se détend.
Le metteur en scène s’installe à un tabouret, entame un premier verre de vin et commence à se prêter aux interviews.
Tout simplement.
En français.
En prenant le temps de répondre à chacune des questions posées.
En prenant le temps de discuter avec chacun.
En prenant le temps de remercier chacun de l’intérêt dont il fait l’objet.
Une file se met en place pour aller poser les quelques questions pensées, préparées, pesées des jours durant …
Essayer d’être original, ne pas commettre d’impair, ne pas lui demander son plus grand moment de cinéma, son meilleur souvenir de tournage, son meilleur film …
Eviter l’attendu … « Bonsoir Monsieur de Valmont » !
Et puis, le moment arrive … Plus personne devant nous … C’est là que l’on comprend ce qu’il nous arrive. Il est temps de la jouer faussement détendu, et de démarrer l’interview tant attendue.

Cela ne vous démangeait pas de reprendre le rôle de Valmont ?
Oh non, cette fois je m’occupe de la mise en scène!
De plus le rôle de Valmont occupe certes une grande place dans la pièce mais ce n’est pas tout, il y a tous les autres personnages et l’histoire surtout, ainsi que tous les éléments techniques.

Selon vous, les valeurs qui sont dénoncées par le couple Merteuil – Valmont sont-elles toujours d’actualité aujourd’hui en 2012 ?
Les valeurs oui, la religion certainement pas en France mais ailleurs, oui !
Aux Etats-Unis par exemple la religion est plus forte.

Comment concevez-vous la création théâtrale dans notre société moderne ?
Y a-t-il de nouveaux « grands classiques » qui pourraient émerger parmi nos auteurs contemporains ?
Les « grands classiques » sont devenus des classiques pour de bonnes raisons. Ils sont très beaux ! Je ne sais pas si l’on peut dire qu’il y a véritablement de grands écrivains de théâtre français depuis quelques siècles.
Des « ok », des biens, des intéressants, il y en a eu mais des grands non.
Depuis Molière, non.
Intéressant c’est sûr, mais si l’on compare avec l’Angleterre et l’Allemagne, non.
Je ne peux même pas en citer un seul.

Alors pas de confidence sur une éventuelle adaptation à venir au cinéma ou au théâtre d’une œuvre française ?
Oh non, je n’ai pas dit ça, je ne parle pas des écrivains, mais des auteurs de théâtre.
Les auteurs de théâtre sont certes bons, mais il y a sans doute une raison s’ils sont si rarement joués mondialement.
Jean Genet oui, Ionesco qui n’était pas français mais qui vivait là, Beckett qui a écrit en français, eux m’intéressent beaucoup mais tout ça remonte déjà à 40 ou 50 ans.
Tout cela m’amène à vous dire que finalement les grandes pièces ne vont jamais disparaître.

Et même avec les tablettes, e-books et autres smartphones, vous prédisez à ces pièces encore un long avenir ?
Votre génération écrit beaucoup plus que la mienne.
Quel est le problème ? La technologie et tout ça ? Ça m’est égal.
Moi par exemple j’écris 20 fois plus qu’il y a 20 ans.
Non, toute cette technologie, ça n’est pas du tout une mauvaise nouvelle.

D’où vous vient cet amour pour les français et pour la langue de Molière ?
Oh Molière ! C’est surtout que j’ai une maison ici depuis très longtemps.
C’est une longue histoire d’amour avec la France !

 

Et voilà …
Viennent ensuite le tour de Yannick Landrein (Monsieur de Valmont) et Lazare Herson Macarel (Azolan).

 

Bon je sais on a déjà du vous la faire mais qu’est-ce que ça fait de passer après John Malkovich ?
Yannick Landrein : Rien du tout, c’est facile…. Rires
Non au début c’est assez impressionnant et puisque tout le monde pose la question cela m’a renforcé dans l’idée que c’était quand même un truc énorme.  Mais au bout du compte John est quelqu’un de très humble et de très modeste et il n’a jamais ramené son expérience professionnelle en me disant « Moi quand je l’ai joué je l’ai fait comme ça ». Il a toujours beaucoup composé à partir de ce qu’on proposait et de la compréhension universelle du texte. Il n’a jamais cherché à me montrer comment il fallait jouer Valmont, nous avons simplement cherché ensemble à savoir comment l’interpréter le mieux possible à partir du texte de base. Il s’est comporté comme un metteur en scène et pas comme un passeur et il ne m’a jamais dit « Allez !! Y a une grosse charge sur toi… ». Au contraire il a toujours cherché à me simplifier la vie.

Quelle est la part d’improvisation car la mise en scène  est atypique ?
Y.L. : Ce n’est pas un texte classique puisque l’interprétation théâtrale a déjà trois ans je crois. Le livre est classique mais l’adaptation est contemporaine et faite en tentative de langue ancienne, en vieux français.
John est un metteur en scène contemporain, il a un univers particulier et qui est un peu déjanté, il aime bien le… comment dit-il déjà, le « fatras ». Il aime bien quand c’est drôle, quand c’est con, quand c’est décalé, il adore le théâtre et il n’a pas envie de le cacher.
En toute logique l’improvisation est un des éléments sur lequel on a travaillé très très vite. Il fallait que l’on comprenne très vite le texte et ce qu’on jouait pour pouvoir avoir la liberté par la suite de s’adapter aux envies et humeurs de chacun, ce qui fait que ça laisse la pièce dans un état de vivant enfin beaucoup plus vivant que ce que l’on peut voir dans d’autres pièces plus classiques.

Lazare Herson Macarel : Ce qui fait qu’on a dû, petit à petit, se faire à l’idée que l’on faisait du théâtre et qu’on montrait du théâtre en train de se faire : comme une répétition.

C’est justement ce qu’on a bien aimé, à savoir un texte classique mais une interprétation un peu dérangeante.
Y.L. : John Malkovich aime bien déranger un peu les gens, il aime bien les faire sortir de l’histoire pour les faire rentrer un peu dans le théâtre.

Quel est le rôle de la tablette et des téléphones portables à part prendre des photos à la volée sous la jupe de Madame de Volanges?
Regards complices : Ah bon, t’en avais un toi de portable?
Y.L. : C’est une idée qu’a eue John avant même d’avoir choisi les comédiens il y a plus d’un an et demi.
Il est vrai qu’au début on nous avait dit que nous allions beaucoup téléphoner, que l’on écrirait beaucoup de lettres et qu’il y aurait des écrans derrière nous avec les messages qu’on enverrait et il s’est avéré que dans le travail on a un peu oublié cet aspect conceptuel et c’est devenu une anecdote.
Aujourd’hui on communique par ces moyens-là : l’ordinateur, les sms, le téléphone donc on ne va pas faire comme si on ne le faisait pas mais ça n’est pas l’idée principale. Le centre de tout c’est vraiment le théâtre et pas le téléphone portable.

Une dernière question : Pensez-vous finir entiers toutes les représentations ? Qui a déjà des bleus …
Y.L. : On en a tous un peu mais c’est normal et on est tous très bienveillants les uns vis-à-vis des autres !

Une soirée toute en simplicité, en puissance et en émotions que Pierre & Stef ne sont pas près d’oublier.
Pour rappel, toutes les informations sur la pièce :

Un court billet rédigé par Stef & Pierre qui ont assisté à la Générale pour Arkult

Les Liaisons dangereuses ,Théâtre de l’Atelier, 1, place Charles-Dullin (XVIIIe). Tél: 01 46 06 49 24. Horaires: 20 h du mar.  au sam., mat. sam. et dim. 16 h. Places: de 10 à 38 €. Durée: 1  h  55. Jusqu’en mai.
Twitter :@LesLiaisonsD
Facebook : la page fan
Distribution :
Mise en scène: John Malkovich
Équipe technique:
décor : Pierre-François Limbosch
costumes : Mina Ly
lumières : Christophe Grelié
musique : Nicolas Errèra
maître d’armes : François Rostain
Avec: Sophie Barjac, Jina Djemba, Rosa Bursztejn, Lazare Herson-Macarel, Mabô Kouyaté, Yannik Landrein, Pauline Moulène, Julie Moulier, Lola Naymark.

 




Quand Valmont s’attaque aux Liaisons Dangereuses …

Une invitation pour une Générale des Liaisons Dangereuses, ça ne se refuse pas me direz-vous … John Malkovich à la mise en scène qui plus est. Et frappée du sceau du théâtre de l’Atelier pour couronner le tout. Il faudrait être timbré pour dire non à une telle soirée.
Et pourtant, le doute est là, tapi dans un coin de notre esprit : comment faire oublier au spectateur le film de Stephen Frears et ses interprètes légendaires ? Quelle création envisager et quelle originalité apporter ?
Mais voilà, c’est sans compter le talent créatif de John Malkovich. Et dès les premières répliques, on se trouve bien plongé dans d’autres Liaisons Dangereuses, plus modernes, plus décalées, mais tout aussi puissantes.

Le thème des Liaisons Dangereuses avec ses personnages emblématiques a été traité par Les Inconnus et d’illustres réalisateurs, au théâtre, sur grand/petit écran et même sous forme de comédie musicale. Mais, aujourd’hui en 2012 …
  • L’introduction des tablettes et des téléphones portables ne dénature-t-elle pas le caractère épistolaire de l’oeuvre originale ?
  • La version portée par John Malkovich sort-elle du lot ?
  • Est-il possible de retranscrire au théâtre la complexité mystique des personnages de Choderlos De Laclos déclinée dans une œuvre de 500 pages ?
  • Pourquoi le duo Valmont-Merteuil fascine-t-il encore et toujours?


Acte 1

La pièce s’ouvre avec un rideau métallique brinquebalant sur un acte sobre, un peu lent à se mettre en place. On y retrouve les lettres que l’on connaît bien et petit à petit on entre dans le monde de l’énigmatique et flegmatique Malkovich. Les rouages de la machine infernale des Liaisons Dangereuses nous semblent soudain plus visibles, plus purs. Le texte, lui, est toujours aussi fort.Pourtant ce n’est pas le texte qui porte les jeunes interprètes, c’est plutôt eux qui le portent et qui se l’approprient avec une fraîcheur de ton saisissante. Tablettes et téléphones portables côtoient vieux français, robes « crinolinesques » et redingotes de style. Et pourtant ça ne sonne pas faux.Ces appareils technologiques devenus banals dans notre quotidien s’introduisent avec un naturel déconcertant dans le XVIIIème siècle originel du texte. On aurait même pu s’attendre et souhaiter qu’ils soient plus présents. Les smartphones notamment permettent un second degré qui restitue parfaitement le caractère libertin et joueur de Valmont, sans éclipser les méandres de l’intrigue et le poids de l’écrit.

Acte 2
Après l’entracte dans le chaleureux foyer du Théâtre de l’Atelier, c’est une autre dimension des Liaisons Dangereuses qui nous est comptée. Finies la frivolité et la comédie, « bas les masques » : voici venu le temps du drame mais toujours avec une mise en scène un peu décalée.Il y a plus de mouvements, les costumes changent, le décor bouge, les jeux de lumière se font omniprésents, contrastant férocement avec le premier acte.
C’est une fracture sauvage par rapport au théâtre classique. Les fauves sont lâchés, les acteurs sautent ou agonisent et se démènent dans un excès libératoire.Valmont et Danceny se battent à l’épée avec force fougue et renfort de ketchup. En somme, l’interprète de Saint-Pierre dans la série de publicités fortes de café est ici un bon berger, notre Noé qui nous embarque tous à bord de son arche. Le final très émouvant des acteurs sur un large plébiscite de l’audience en est témoin.

La mise en scène
Le décor, ou l’absence de celui-ci est assez déstabilisante, surtout dans le premier acte.
Les acteurs sont tous sur scène.
Tout le temps.
Tous les 9.
Assis sur des chaises contemporaines et dépareillées à se désaltérer et picorer des des clémentines.
On se sent comme à une répétition dans l’intimité de la troupe.Les costumes sont dessinés par John Malokivch, revêtant ici sa casquette de dandy styliste. Ils sont ancrés dans le passé mais bel et bien dans le présent car il y a fort à parier que la Comtesse de Merteuil ne portait pas de pantalons et que Valmont ne traînait pas son spleen dans un jeans.
Astucieuse éloge des corps, ils sont évolutifs et résolument aux services de l’évolution du caractère des personnages. Si « l’amour est enfant de bohème »*, alors on aime cette pièce bohème chic qui parle d’amour et de stratagèmes sans que le bon Choderlos ne se retourne dans sa tombe.

Les acteurs
Une histoire, des décors, une mise en scène. Oui, certes. Mais sans acteurs valables, avouez que ça sonnerait un peu creux.

Autant dire que M. John n’a pas ménagé ses efforts pour le casting … Ce n’est pas moins de 300 prétendants qui ont défilé devant la directrice de casting, puis une soixantaine devant le metteur en scène en personne. Plusieurs mois d’essais pour parfaire le choix final.
Et le résultat est là.

Yannik Landrein en Vicomte de Valmont face à Julie Moulier en Madame de Merteuil. L’humour pince-sans-rire et la légèreté de caractère face à la perversité manipulatrice et la rancoeur amoureuse.
L’étonnante maturité des comédiens, âgés de moins de 30 ans pour la plupart, contribue à déstabiliser le spectateur. Notre société moderne voit en effet les mariages devenir de plus en plus tardifs, et la maturité sentimentale reconnue une fois la quarantaine passée.

La pièce nous plonge dans un entremêlement entre figures parfois tout juste sorties de l’adolescence, digital natives armés de tablettes et smartphones, et jeunes adultes soumis aux impératifs familiaux et maritaux en vigueur au XVIIIème siècle.
Entre les deux époques … nos coeurs balancent encore !


Une nouvelle mise en scène peut-être, mais les Liaisons n’en sont pas devenues moins Dangereuses. La modernité et l’immédiateté ajoutent à la violence des mots, l’immédiateté de leurs conséquences.

De subtiles touches de technologie, un savant saupoudrage d’inattendu, de décalé, parfois même d’absurde. La recette que nous présente John Malkovich sur la scène du théâtre de l’Atelier est savoureuse. Avec pour brigade, des talents jeunes et moins jeunes, reconnus ou en passe de l’être dans les jours à venir.
Alors, n’hésitez pas, succombez à la tentation, et goûtez aux fruits défendus des Liaisons Dangereuses !
 
 
Les Liaisons dangereuses ,Théâtre de l’Atelier, 1, place Charles-Dullin (XVIIIe). Tél: 01 46 06 49 24. Horaires: 20 h du mar.  au sam., mat. sam. et dim. 16 h. Places: de 10 à 38 €. Durée: 1  h  55. Jusqu’en mai.
Twitter :@LesLiaisonsD
Facebookla page fan
Distribution :
Mise en scène: John Malkovich
Équipe technique:
décor : Pierre-François Limbosch
costumes : Mina Ly
lumières : Christophe Grelié
musique : Nicolas Errèra
maître d’armes : François Rostain
Avec: Sophie Barjac, Jina Djemba, Rosa Bursztejn, Lazare Herson-Macarel, Mabô Kouyaté, Yannik Landrein, Pauline Moulène, Julie Moulier, Lola Naymark.

Note * « L’amour est enfant de bohème »  : Georges Bizet Carmen



Breaking Bad – Une série … stupéfiante !


A l’annonce de son cancer, Walter White (Bryan Cranston), bon père de famille américain, aurait pu décider d’attendre la faucheuse les arpions en éventail ou bien de boxer les métastases à grand coup de chimio. Tout ça est bien trop ordinaire. Lui, Walter, décrète qu’il va mettre sa famille à l’abri de toute disette future en thésaurisant, sans leur dire, un beau pactole. Toujours est-il qu’avec un salaire de prof de chimie de lycée, sans perspective d’évolutions aucune, peu de risque d’engranger beaucoup de pépètes. Lorsqu’il décide de capitaliser sur la seule chose dans laquelle il est calé et qu’il aime, la chimie, alors là tout bascule. Walter White se lance dans un métier à risque avec des gens peu fréquentables, il devient « cuisiner ».

Mais il ne fait pas la tambouille dans un troquet. Il assaisonne des matières dangereuses pour concocter un plat unique : des méthamphétamines.

Petit effort de visualisation, prenez quelques instants pour vous faire une image mentale d’un alpiniste audacieux pendouillant à une falaise et ne tenant qu’à la force de son petit doigt. Vous l’avez ? Ceci est un « cliffhanger ». Le pendant dans une série est un épisode terminant sur un point crucial de l’action, sans donner de dénouement. Votre héros est donc ce grimpeur qui aurait dû avoir plus froid aux yeux, et dont vous ne connaitrez le sort que dans l’épisode suivant. Dans Breaking Bad, c’est la spirale infernale, on va de cliffhanger en cliffhanger, on se ronge les ongles et on suit chaque épisode sur le qui-vive, les yeux ronds comme des goupilles.

Si vous connaissez déjà la série, lisez sans crainte, pas de « spoilers » dans ce petit billet tout à la gloire de la série de Vince Gilligan.


L’histoire :
Un homme cachant quelque chose à sa femme, ça peut être l’objet d’un bon vaudeville. Mais un homme qui cache quelque chose de notoirement illégal à sa femme, sa famille,  ses amis, cela fait une excellente série dramatique. Un Satellite Award, a d’ailleurs consacré Breaking Bad comme la Meilleure série dramatique en 2010.

Walter  White (Bryan Cranston) fait le choix de cuisiner des métamphétamines pour laisser  un magot coquet à sa femme Skyler (Anna Gunn) et son fils handicapé (RJ Mitte).

« Mais que diable allait-il faire dans cette galère » * ?  Walter s’élance dans un guêpier dans lequel sa célérité sera mise à mal et qui partira en cacahouète, à toute berzingue.

La principale source de rebondissements viendra, comme on pouvait le pressentir, des partenaires qu’un tel gagne-pain implique. Le hasard placera sur la route de Walter un de ses anciens élèves : Jesse Pinkman (Aaron Paul). Cancre, rêvasseur et médiocre apprenti chimiste, il est devenu petit trafiquant et producteur de substances illicites. Pinkman a beau avoir basculé du côté obscur il n’a pas l’envergure d’un Pablo Escobar.
Dans ses activités péri-scolaires le Professeur White s’adjoindra les services de ce Jesse Pinkman. Pinkman sera son homme à tout faire et commis de cuisine dans la préparation de cette fameuse drogue synthétique.

Les deux cuistos gagnent du terrain, petit à petit avec leurs rondelettes cargaisons de préparation maison. Les épisodes sont très bien ciselés, chacun d’eux fait avancer l’aventure mais initie et clôture aussi des intrigues courtes. Les épisodes sont oppressants et palpitants. Les coups de théâtres pleuvent sans qu’on ait rien flairé, rien à voir donc avec Master Chef.

Chaque épisode est construit d’une manière originale et troublante. La recette est la suivante : les premiers instants dévoilent de manière extrêmement stylisée et intrigante un élément dans le futur (ou parfois dans le passé) de la série. Il s’agit d’un point hyper focalisé et esthétique, et par conséquent perturbant. Posé en ouverture d’épisode il résonne comme un rébus mystérieux ou une mise en bouche corsée.

Cette pratique n’est pas sans rappeler le système du cliché noir et blanc présentant un élément dans le futur, instauré dans la série NCIS de Donald Paul Bellisario. Celle-ci avait pourtant un but tout autre puisqu’il s’agissait de tenir le téléspectateur en haleine alors que l’épisode était entrecoupé de pages de pub, nombreuses aux Etats-Unis et Canada.

Mais revenons à nos deux gargotiers.
Dans Breaking Bad, le générique enfumé et psychédélico-chimique instaure un rythme lent et pesant au son cadencé de tambours et percussions. Les épisodes qui débutent à sa suite se déroulent toujours sous un œil artistique. Les points de vue sont ceux des deux acteurs principaux mais la caméra passe aussi du côté, si étrange que cela puisse paraître, de leur concoction. Les plans sont brillamment enchaînés et le panel de personnages assure une dynamique décisive dans l’addiction du spectateur.
Au cours de l’épisode, ou parfois dans un épisode suivant, l’énigme introductive trouve son explication et nous laisse volontiers les 4 fers en l’air.




Le ton :
Vince Gilligan reconnu mondialement pour avoir signé et réalisé de nombreux épisodes de « X-Files : Aux Frontières du réel », change ici radicalement de registre et ne conserve que le suspens pour cette série dramatique diffusée par la chaine américaine AMC. Le pitch est aussi simple qu’efficace, on pourrait ainsi sous-titrer la série : Breaking Bad, Où quand un père de famille modèle bascule dans le trafic de drogue.

La première saison est un apéritif savoureux. L’épisode introductif est explosif, il laisse sur le carreau, interloqué. La saison se résumerait ainsi : Si l’effet papillon se définit par des petites causes qui engendrent de grandes conséquence alors à grandes causes… d’autant plus terribles répercussions. La mayonnaise prend bien mais c’est une mise en bouche.
La saison deux se révèle être une entrée bien relevée. Haletante avec une progressive montée en grade de la tension. Les blancs montent en neige et divinement.
La troisième saison un plat de résistance costaud avec une intrigue délicieusement carabinée. Un bon sac de nœuds et de rebondissements.

La quatrième saison : le dessert bien sûr. Mais ça n’est surement pas un petit dessert léger. Il s’agirait d’avantage d’une pièce montée à plusieurs étages qui tiennent en équilibre de façon très précaire… On entre avec cette saison dans une autre dimension : celle des fins gourmets de séries à suspens.

Les 4 saisons disponibles à ce jour, s’inscrivent dans la continuité les unes des autres mais avec une escalade crescendo du suspens et de la complexité de la situation. L’american dream a du plomb dans l’aile, encore une série qui n’est pas tendre avec les United States of America. Les personnages récurrents évoluent, des petits nouveaux viennent se mêler à l’équipe initiale surtout dans la galerie des « bad guys ».

Contrairement à certaines séries qui s’essoufflent au fur et à mesure et qui ont du mal à se renouveler (Desperate Housewives en tête), Breaking Bad ne perd pas le rythme, il n’y a bien que le téléspectateur angoissé qui a du mal à respirer.


Le personnage principal :


Walter White est un personnage ambigu et surprenant. Au fil des épisodes on suit sa transformation physique et psychologique. Viril, pugnace, forcené et à la fois désespéré son comportement ne manquera pas de vous estomaquer.
Bestial, animal ou familial, Bryan Cranston est phénoménal dans Breaking Bad. Aujourd’hui quinqua pêchu, cet acteur américain s’était fait connaître dans un autre rôle de père de famille : celui de Hal dans la série Malcom créée par Linwood Boomer.
Bryan Cranston y était rocambolesque en papa inconscient, dépassé et farfelu.

Il était cocasse en boss raté, acariâtre et autoritariste dans How I met Your Mother.
La critique ne s’y est pas trompée, il triomphe en roi des méthamphétamines. Il a ainsi obtenu trois Emmy Award consécutifs de Meilleur acteur dans une série dramatique en 2008, 2009 et 2010.


Le second rôle :
Apparu dans de très nombreuses séries depuis 1999, la carrière d’Aaron Paul n’a pas vraiment décollé mais il y a fort à parier que son Emmy Award et son Saturn Award de Meilleur acteur dans un second rôle dans une série dramatique reçus en 2010, changeront la donne.

Aaron Paul est Jesse Pinkman. Partner de Walter White, il est finalement moins à sa place face aux gros durs que son acolyte. L’habit ne fait pas le moine. Cea n’est pas parce qu’il porte un vieux baggy, qu’il est tatoué des quatre membres et qu’il donne des airs à un certain Eminem que c’est un « bad ass », un vrai méchant quoi. Il est purement et simplement candide, inapte et irresponsable. Il s’invente un personnage faussement venu des bas-fonds mais n’a ni le passé, ni les épaules. En situation de crise, et Dieu sait qu’ils en affronteront de nombreuses, il implose, il déconnecte, il flippe. C’est donc un fardeau, un empêcheur de tourner en rond, un « boulet » extra, un poil à gratter lancinant dans le dos de Walter White. Plutôt lavette que body buildé. Plutôt pommé que méchant.

Sans le sel apporté par la prestation d’Aaron Paul, l’aventure de Walter White serait, à n’en point douter, fadasse.  Walter et Jesse sont deux alpinistes encordés si Walter avance, Jesse aussi, bon gré mal gré. Si Jesse recule Walter aussi. Ils prennent des risques dans leur ascension et le précipice les guette.

Entendons nous bien, d’un côté de la corniche il y a les camés accrocs, les cartels mexicains et la mort. De l’autre : le désaveu de leurs proches, les flics, la prison, la déchéance sociale. A la limite des conventions, nos deux héros ne sont pas au bout de leur peine.


Les rôles secondaires :
Dans la fine équipe de Jesse : Skiny Pete (Charles Baker), Badger (Matt L. Jones) et Combo (Rodney Rush) ne sont pas sans rappeler les pieds nickelés. A eux quatre ils sont la quintessence de la connerie. Cahin, caha ils consomment et/ou vendent les cristaux bleutés.

Dans la famille de Walter, Dean Norris campe un beau-frère assez embarrassant : Hank Schrader. Comme les autres personnages de Vince Gilligan même s’il paraît brut de décoffrage, il est en réalité tout en nuances.  Hank c’est « l’homme de la pampa parfois rude mais toujours courtois ».  Le rôle et la présence de Hank, s’intensifient au cours des saisons. Il vient perturber la gestion déjà hasardeuse de Walter et Pinkman. A la manière des frères Morgan (Dexter et Debbie) dans la série Dexter, ils ont un sacré conflit d’intérêts dans la famille et cela vient pimenter encore un peu plus le scenario. Fricoter avec la DEA (les stups américains) n’est pas un bon calcul quand on trempe dans le trafic de drogue… c’est s’assurer des tracas à tire la rigot!

Enfin, qui entre dans le monde des affaires aux Etats-Unis aura besoin d’un bon avocat : Saul Goodman (Bob Odenkirk), qui apparaît dès la saison 2, libidineux à souhait, macho et engraissé au pot de vin. Un homme de très mauvais goût entouré d’enfants de cœur adorables, tueurs à gages et autres hommes de mains, tel que l’imperturbable Mike (Jonathan Banks).

Petit clin d’œil au personnage fétiche de Robert Rodríguez : Machete joué par Danny Trejo aussi connu sous les noms tranchants de Razor Charlie, Cuchillo (couteau en espagnol) ou Navajas (lames). L’acteur américain fait une apparition, courte mais sensationnelle dans la Saison 3, dans la peau d’un trafiquant mexicain du nom de Tortuga. Toujours à l’aise dans ses santiags l’amigo!

Dans le but de ne pas trop vous en dire, tous les personnages ne sont pas ici décrits mais les fans de la série s’accordent sur le fait que la prestation de Giancarlo Esposito est troublante et pimentée dans le rôle d’un personnage un  peu trop propre sur lui le gérant des fast-food « Los Pollos Hermanos ».

Est-il vraiment nécessaire d’ajouter quelque chose pour vous donner envie de gouter à Breaking Bad ?



Pour le fun :
Voici en prime trois vrai-faux sites web vu dans la série.

Liés aux événements de la Saison 2 :
– le site créé par Walter Junior pour lever des fonds pour son père http://www.savewalterwhite.com/
– le site de Saul Goodman l’avocat véreux au slogan entêtant « Better call Saul » http://www.bettercallsaul.com/

Liés aux événements de la Saison 3 et 4 :
– le site de la chaîne de resto de poulet fris de Gustavo Fring http://lospolloshermanos.jimdo.com/

Casting :
Bryan Cranston (Walter White), Aaron Paul (Jesse Pinkman), Dean Norris (Hank Schrader), Betsy Brandt (Marie Schrader), Anna Gunn (Skyler White), RJ Mitte (Walter White Junior), Bob Odenkirk (Saul Goodman), Giancarlo Esposito (Gustavo Fring), Charles Baker (Skiny Pete), Matt L. Jones (Badger), Rodney Rush (Combo) …

 

Note :

* Les Fourberies de Scapin, Molière.

 




Costard trois pièces

Quel est le point commun entre Phileas Fogg, un chevalier maladroit de la Renaissance et un tenancier de salon de coiffure ? Sacha Danino et Sebastien Azzopardi !

Trois pièces actuellement à l’affiche à Paris ont été touchées par la grâce de ces deux auteurs de théâtre. Les trois sont hilarantes, étonnantes et farfelues.

Les spectateurs de tous âges y trouveront leur bonheur !

La première, « Le tour du Monde en 80jours » est une adaptation de l’œuvre éponyme de Jules Verne et joue sa 6ème saison (1500 représentations au compteur) au Café de la Gare. Décalée, burlesque, jubilatoire, frénétique on s’amuse énormément du jeu de scène des acteurs. Le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est très récréatif et que ça peut plaire à un public de 7 à 77 ans selon les degrés de lecture.

La deuxième, jouée au Splendid est « Mission Florimont ». Cette pièce retrace aussi un voyage mais à une tout autre époque :  la Renaissance. Le roi de France confie à l’un de ses plus fidèles – mais pas très vaillant serviteur-, une mission. Il doit remettre au calife de Constantinople un important message. La route sera semée d’embûches… et cette histoire tout droit sortie de l’imagination de ses deux auteurs est un vrai petit bijou comique.

La troisième et dernière en date, est également la plus originale, puisqu’il s’agit d’une adaptation en français d’un grand succès populaire américain « Dernier coup de Ciseaux ». C’est le Théâtre des Mathurins qui accueille cette pièce, dont le fondement repose sur la participation du public pour élucider un meurtre. Aventure inédite !!!

La patte du duo Danino-Azzopardi ?
Du rythme, du bricolage scénique, des références humoristiques à l’actu, de la bonne humeur et des acteurs-athlètes.

Ça trotte, ça galope, ça roule, ça se dandine : le ton de ces 3 pièces est résolument ultra-enlevé, on ne peut décemment pas s’ennuyer une seconde.
Dans « Le tour du monde en 80 jours » et « Mission Florimont » avec peu d’acteurs et peu de décors, ils nous font sacrément voyager. Cela n’est pas sans rappeler l’adaptation loufdingue d’Hitchcock par Eric Metayer : « Les 39 marches », où chaque acteur interprète une palanquée de personnages. Ainsi la petite troupe enchaîne les apparitions en changeant de voix, de costumes, de religions, de sexes… provoquant des fous rires généralisés.  Zygomatiques sensibles, s’abstenir !

Pour « Dernier coup de Ciseaux » c’est un poil différent (ça varie d’un cheveu pourrait-on dire pour filer la métaphore).
Les premières minutes de la pièce posent le décor et présentent les personnages au travers d’une scène de vie du salon de coiffure. Chacun a plus ou moins un mobile et tient bien son rôle.

Mais outre le rythme, le point commun de ces pièces est qu’elles laissent la part belle au rire et à la participation des spectateurs. Participation poussée à son paroxysme, bien sûr, dans « Dernier coup de ciseaux » où l’on peut même pendant l’entracte soumettre ses questions au commissaire de Police enquêtant sur le meurtre.

Puisqu’il faudra bien commencer par en voir une des 3, alors comment choisir ?

Si vous portez un chapeau melon et/ou des bottes de cuirs. Si quand on parle jeux de société, pour vous, il n’y a que le Cluedo qui ait droit de cité. Si vous ne dormez jamais devant un épisode de Derrick et que vous connaissez toutes les répliques de Columbo. Si les livres qui ont peuplé votre enfance ne sont autres que « Le club des 5 » ou « Les 6 compagnons ». Enfin si vous rêvez que les Experts de Manhattan, de Miami ou d’ailleurs vous demandent enfin votre avis.
Oui, si vous brûlez qu’ils vous sachent bon gré d’être derrière votre télé avec du temps de cerveau disponible ? « Dernier coup de ciseaux » est pour vous. Vous pourrez participer, questionner, influencer, bref, faire de cette enquête, votre enquête. Si bien que chaque soir la disparition tragique d’une pianiste renommée et bruyante voisine d’un salon de coiffure, trouvera une issue différente.

Si de Phileas vous vous souvenez seulement qu’il est anglais et qu’il a tenté un tour du monde à la fin du XIXème siècle. Il est temps de mettre à jour votre culture générale, mais sans Fred & Jamie ! Sur scène dans un rythme endiablé, les pays et les entourloupes se succèdent. Si vous ne connaissez pas le Café de la Gare niché depuis 30 ans au cœur du Marais. Si vous n’avez jamais trépigné dans les gradins étroits qui ont vu Coluche, Elie & Dieudonné ou Eric & Ramzy faire leurs premières passes d’armes…
Alors il vous faut découvrir cet écrin dans lequel « Le tour du monde en 80jours » est devenu un mythe, une référence du théâtre comique (mais pas de boulevard) et dont le fameux Café de la Gare est le temple.

 

Si vous avez envie de vous encanailler avec les sbires de François Ier et ses rivaux, en chantant en dansant et en galopant, vous êtes au bon endroit. Plus dévergondé que Phileas, mais beaucoup moins fute-fute que Canard le coiffeur, notre Florimont de la Courneuve, qui parle un étrange patois (la langue de la cité),  donne toutefois énormément de sa personne. Ce grand bêta en collants, conquerra votre cœur et vous ne saurez rester insensible aux charmes de son acolyte, la belle Margot. Il y a des rebondissements, des « méchants », des interludes musicaux, des jeux de lumières et une trame de fond efficace. Sur scène du talent à profusion et une troupe qui s’éclate et délire dans une fantaisie canalisée, pour notre plus grand plaisir.

Avec déjà 3 succès dans leur escarcelle, nul doute que Sacha Danino et Sebastien Azzopardi, sont des auteurs à suivre. Si vous avez envie de passer un bon moment au théâtre, c’est en tout cas une valeur sûre!

 « Dernier coups de ciseau »

Théâtre des Mathurins, 36 rue des Mathurins – 75008 Paris

DU MARDI AU SAMEDI À 21H ET LE SAMEDI À 16H30

Distribution :

Pièce comique de Marilyn Abrams et Bruce Jordan,

Texte Français de Sacha Danino et Sebastien Azzopardi,

Mise en scène Sébastien Azzopardi,

Avec : Domitille Bioret, Romain Canard, Réjane Lefoul, Yan Mercoeur, Bruno Sanches et Olivier Soliveres.

 

« Le tour du Monde en 80 jours »

Café de la Gare, 1 Rue du Temple 75004 Paris

DU MERCREDI AU SAMEDI À 20H ET LE SAMEDI À 17H

Distribution :

Pièce comique de Sacha Danino et Sebastien Azzopardi,

Mise en scène Sébastien Azzopardi,

Avec : Stéphane Roux, Rodolphe Sand, Frédéric Imberty, Nicolas Tarrin, Coralie Coscas

 

« Mission Florimont »

Splendid, 48 rue faubourg Saint-Martin 75010 Paris

DU MARDI AU SAMEDI A 21H30 ET LE SAMEDI À 17H

Pièce comique de Sacha Danino et Sébastien Azzopardi

Mise en scène Sébastien Azzopardi,

Avec :

Florimont : Sébastien AZZOPARDI Ou Rodolphe SAND Ou Nicolas MARTINEZ

Margot : Aurélie KONATE

François 1er : Guillaume BOUCHEDE ou Sébastien AZZOPARDI ou Yannik MAZZILLI

Soldats : Erwan CREIGNOU ou Gilles-Vincent KAPPS ou Benoit MORET

Charles Quint : Olivier SOLIVERES ou Franck DESMEDT

 




« Golgota Picnic », un doux pétard mouillé

On vit vraiment une drôle d’époque, plus de 2000 ans après la mort du Christ, il se trouve encore des gens pour hurler au blasphème et proférer des menaces, dont le Seigneur se serait bien gardé, à l’attention de l’équipe de « Golgota Picnic » pour avoir mis sur pied une pièce faisant soi-disant offense à Jésus.


Le soir de la première, il est difficile d’accéder au théâtre plus d’une heure trente avant la représentation. Un premier cordon de sécurité à 100 mètres de la porte ne fait passer que les spectateurs munis de billets; à l’entrée, un second contrôle ne vous laisse que vos chaussures et avant de pénétrer dans la salle de spectacle, on passe un dernier détecteur de métaux, histoire d’être tranquille. Si vous décollez depuis l’aéroport du Rond-Point, vous ne risquez pas d’embarquer un terroriste à bord !


Enfin, une fois face à la scène, on savoure avant même le spectacle. D’être entré, certes, mais aussi cette délicieuse odeur de pains à hamburger, qui sont étalés sur la scène en totalité. Jean-Michel Ribes, faisant les cents pas de façon papale surveille au bon ordre de l’installation du public. Après 20 minutes de retard, les acteurs entrent enfin…


C’est parti pour une heure et des poussières de reproches en tout genre à l’Eglise, ils sont bien écris, prêtent à sourire, nous divertissent sans ennuyer. Listant tour à tour les méfaits d’une religion qui a perdu la confiance de ses fidèles (pédophilie, inquisition, génocides…), Garcia parle comme un enfant qui se rend compte de la véritable nature de ce qu’il a fantasmé, ou ce qui l’a guidé pendant des années mais qui aujourd’hui a perdu toute crédibilité dans son monde, ce monde qu’il semble détester et qu’il ne regrettera pas de quitter (message transmis par les acteurs).


Dans les premières minutes, la tension des contrôles de sécurité n’est pas complètement retombée, on s’attend au pire, aux symboles trash et insoutenables, il n’en est rien, pas même une esquisse. Une légère larme vient pour l’auteur, qui semble en fait terriblement déçu de l’absence de Dieu. Mettant les actions de l’église face à leurs contradictions (les Noirs ont été créés pour danser le funk et rouler des havanes), Garcia ne fait pas pour autant de la propagande anti-christique, encore moins « christianophobe », néologisme se prêtant très mal à ce propos. L’auteur ne cherche pas à convaincre, il se contente juste de se raconter, ça peut nous intéresser comme on peut faire le choix de s’en foutre. Les seules choses que les comédiens maltraitent sont d’authentiques vers-de-terre filmés en gros plan, affairés à bâtir une tour de Babel symbolique en tranche de pain.


Les acteurs sont à l’aise et jouent bien, même si le texte prononcé se suffit à lui même, la mise en scène n’est pas transcendante ni ratée, banale en somme, si on enlève les hamburgers.


Malgré les citations de Bush prêtées au Christ, (« Si vous n’êtes pas avec moi, vous êtes contre moi »), la qualification de « messie du SIDA », n’ayant « jamais travaillé » reste quand même très soft comparé aux moindres dialogue de L’Exorciste ou des paroles d’un groupes de death metal quelquonque, qui pourtant ne mobilisent pas autant d’intégristes aux portes de leur salles respectives.


Mêlant théâtre, performance et musique, quelques symboles sont bien intégrés, de la plaie au flan de Jésus servant de poche pour l’argent, aux acteurs recouverts des couleurs de la Vierge utilisées dans l’iconographie religieuse (bleu et rouge) jusqu’à en devenir des êtres ignobles couverts de boue, jusqu’à la création en direct d’un authentique Suaire de Turin. Mais ces quelques idées n’atteignent pas la moitié d’un « budget ménage » nécessaire à un Macaigne.


Le texte se termine sur un facile « Pour trouver ta voie, il y a Google Maps », avant de conclure la pièce (les quarante dernières minutes), sur un piano où un musicien nu interprète les « Sept dernières paroles du Christ » adaptées pour l’occasion. Bien que d’une belle interprétation, la force se perd entre chaque mouvement et, au moment d’applaudir, le public est un peu perdu. Egaré entre la haine portée par les acteurs au premier acte et l’amour donné par la musique en conclusion.


Etrange goût amer que laisse un spectacle sans trop de pépins. Une bombe qui se révèle en fait n’être qu’un doux pétard mouillé, un bon boulevard un peu osé-olé qui a pris comme thème le Christ quand d’autres ont choisi le couple ou les discussions de comptoir.


Golgota Picnic

 




[Si je t’attrape …] A mourir de rire !


Si je t’attrape, je te mort ! Oui, bon, encore un titre avec une faute d’orthographe. On n’en est plus à ça près avec la série des « … m’a tuer ».
Et puis, à y regarder de plus près, Les Blancs Manteaux, succès, prolongations = puce à l’oreille ! Et places au premier rang ! Oui oui, vous avez bien entendu, premier rang ! Celui où d’ordinaire, il faut prévoir le parapluie pour se protéger des attaques de particules buccales volantes, identifiées la plupart du temps.
Là, il n’en est rien. Totale maîtrise. Parfois une petite participation réclamée par les comédiens, mais vraiment rien de méchant. Autant dire, un bon premier rang !
Et c’est rassurés que nous entrons dans une heure de rire quasi continu, qu’il soit fou ou aux éclats !



Stef : Durant l’été 2010 la pièce d’Olivier Maille avait fait des débuts intimistes. Il se murmurait alors sous cape que le trio sur la scène du théâtre  « Les feux de la rampe » avait du talent et que les dialogues étaient piquants, depuis la pièce a tout simplement décollé (500 représentations à ce jour) et met le feu au théâtre des Blancs Manteaux, le jeudi, le vendredi et le samedi.

La banane, tous les spectateurs l’ont en sortant car on rit beaucoup de quiproquos en scène désopilante…

Ne dit-on pas que c’est dans les vieilles casseroles qu’on fait les meilleures soupes ? La trame de la pièce respecte cet adage.  Les thèmes sont universels : L’amour & la mort.

Cependant  on reste assez peu de temps dans la dimension consensuelle pour très vite s’engouffrer dans l’humour noir et juste ce qu’il faut de décalé.  Car voilà l’élément perturbateur qui pointe déjà le bout de sa faux : La mort, la vraie, en noir, celle qui est sensée foutre les jetons-les chocottes-la trouille quoi !

Si la mort pouvait m’être aussi douce …

Pierre : Qui ne rêverait pas de passer ne serait-ce que quelques minutes avec La Mort …
Juste histoire de se faire une idée.
Apprendre à connaître celle qui va nous accompagner pour le restant de notre vie … ou plutôt de notre mort.

Et là, autant dire que c’est la Mort que l’on souhaiterait rencontrer (si tant est que l’on souhaite jamais la rencontrer), celle qui serait capable de nous faire oublier qui elle est, et surtout … pourquoi elle est là !

A nous faire douter que c’est vraiment elle, qu’on doit faire erreur … Une blague douteuse, un comédien raté, une soirée déguisée, Halloween avant l’heure … Bref, les raisons seraient multiples !
Et pourtant, pour plagier le titre d’un roman de Robert Merle, « La Mort est mon métier » nous annonce-t-elle à mi-mot … La preuve en est, elle est chaussée Méphisto (merci Aldebert) !

Entre balbutiements, chansonnettes, cascades et autres bévues, le spectacle proposé par la Mort est tout bonnement magnifique ! (Coup de chapeau à Florent Chesné, en photo ci-contre)
Et oui, car c’est encore bien méconnu, mais la Mort a des mimiques !
Mais sans vivants, la Mort n’est rien … Allons faire un tour du côté de ses victimes du jour !


Stef : Chômeur, égoïste, flemmard, irritant c’est ainsi que le personnage de Franck apparait dans les premières minutes de « Si te t’attrape je te mort ». La scène introductive, dite aussi scène des Miels pops, est hilarante. En quelques phrases la situation est dressée, les spectateurs sont déridés, le décollage peut avoir lieu.

On découvre après l’entrée sur scène fracassante de la mort, que Franck a aussi des bons côtés…
A Paris le personnage est joué par Olivier Maille, comédien d’une expressivité rare faisant tout passer dans ces mimiques.
Avec une bonne présence scénique, Olivier Maille, ne se contente pas de donner la réplique à la mort, il est aussi le metteur en scène de cette pièce. Le sacré répondant de son personnage associé à une gestuelle burlesque très maîtrisée sont là pour faire monter la sauce. A ce petit jeu le tandem fonctionne très bien. Rajouté le sel apporté par le personnage de Caroline et vous aurez un trio qui carbure.


Pierre : Et autant dire que Caroline a démarré au quart de tour !
Une furie, une coloc détestable, une ex regrettée (et regrettable ?), une actrice ratée …
Bref, la femme idéale !
Et oui, on tomberait presque sous le charme (non, pas uniquement de la comédienne -Kim Schwarck ce soir là-, c’est le risque), mais de son rôle !


De la bonne humeur, de la voix, du punch ils en ont. Ils en veulent, ces djeunes. Une belle énergie sur scène à voir absolument si vous avez envie d’une pièce …
… Drôle sans être lourdingue
… Bien ficelée mais pas alambiquée
… Déconcertante d’efficacité

 

A voir à Paris, Toulouse, Montpellier en décembre
Une pièce à voir à la capitale mais aussi en province, une fois n’est pas coutume ! Alors, profitez-en, courez sur les sites de location de place, dans vos théâtres préférés, ou envoyez un gentil mail aux acteurs (résultat non garanti), et allez vite voir une représentation de « Si je t’attrape je te mort », en tournée :

  • Paris
    Théâtre des Blancs Manteaux : 15 rue des Blancs Manteaux, 75004 Paris (Métro Hôtel de Ville)
  • Toulouse
    Café théâtre Les Minimes
  • Montpellier
    Kawa Théâtre

 

 Casting
La mise en scène signée Olivier Maille fait la part belle à la répartie et à l’inattendu. Olivier est enfant du verbe mais sa carrière il l’a débutée avec un costume un peu spécial, celui d’avocat. A son actif depuis qu’il a troqué sa robe contre les planches « Quand j’étais amoureux », « Les Zexperts – Mais qui a tué le cadavre mort?»! , « J’y comprends rien! » , « Le régime se sarkophage », «Jusqu’ici tout val mal!», « Le videur du paradis ».

La Mort : Jérôme Rodrigues de Aguiar, Rui Silva ou Florent Chesné
Franck : Olivier Maille, Stéphane Szestak ou Benoît Ménager,
Caroline : Kim Schwarck, Elise Hobbé ou Mélodie Fontaine.

N.B : Ce billet est le premier du genre … Ecrit à 4 mains par Stef et Pierre … A bientôt pour d’autres billets de ce type, à 4, 6, 8, 10 mains, voire davantage encore !

 




L’open space les a tuer ou The Office

« L’enfer c’est les autres », disait Jean-Paul S. Les autres, ce sont la famille, les voisins, les amis, … les collègues. Les collègues, on les côtoie 5 jours sur 7, 230 jours par an. Ces 230 jours, une majeure partie des employés du tertiaire les passent dans un espace clos, confiné, et pas forcément rutilant : le bureau (en anglais The Office). L’enfer c’est donc le bureau. Dans The Office, série US diffusée sur NBC à partir de 2005 et coécrit par Ricky Gervais et Stephen Merchant, l’enfer est truculent. L’enfer est évidemment pavé de bonnes intentions, celles d’un directeur foncièrement foutraque.

Une peinture du petit business US, drolatique et kafkaïenne. Un parfait dédramatisant de votre propre vie au bureau!

L’histoire :

Pour le décor de ce documentaire fictif ou « mockumentary » : néon blanc, plantes synthétiques, moquette usagée et camaïeu de beiges.
L’histoire est celle d’une petite boîte de province, Dunder Mifflin et de ses employés sollicités pour participer à un documentaire. Attention, c’est loin d’être aussi assommant que cela peu paraître de prime abord… Au contraire, sans pouvoir être qualifiée de série à suspense, The Office est bourrée de rebondissements et certains des épisodes sont des pépites lumineuses. Le positionnement inattendu de la caméra rend cette série très novatrice et particulièrement fraîche. Les épisodes sont en effet courts et vifs (20min). La patte du scénariste est US par excellence car on retrouve dans cette série toutes les thématiques classiques : Noël, St Valentin, et autres St Patrick …

Tout bon salarié n’est pas sans ignorer l’influence du chef, sur l’ambiance et les conditions de travail. En matière de chef, ils ont justement la crème de la crème de la promotion interne. Michael Scott (Steve Carell), un produit pur jus de Scranton, Pennsylvanie. Le seul hic, c’est qu’une fois devenu calife à la place du calife, Michael, un vendeur né, homme de terrain, ne sait pas vraiment quoi faire pour mener sa barque à bon port. Une fois derrière le bureau de Directeur régional, il musarde, il flemmarde et semble avoir à cœur de perturber l’avancement du travail de son équipe.


Le personnage principal :

Le rôle de Michael Scott semble taillé sur mesure pour Steve Carell. C’est à se demander comment les réalisateurs ont pu hésiter avant de lui donner le rôle. Steve Carell excelle dans les comédies, il le démontre dans Bruce tout Puissant, Crazy Night ou Little Miss Sunshine. Un débit de parole vigoureux, une gestuelle d’épileptique en pleine crise. Steve Carell est excessivement expressif et survolté. Bref, il en fait des caisses et ça lui va à merveille. Le succès de 40ans toujours puceau, permettra d’ailleurs à la série de faire des pics d’audiences. Meilleure performance d’un acteur dans une série comique ou musicale en 2006 aux Golden Globe et Meilleur acteur dans une série comique en 2007 et 2008 pour Teen Choice, tout de même ! Steve Carell est indiscutablement bidonnant et incontournable dans la grande famille des acteurs comiques américains.


Michael Scott ne croit pas en Dieu. Ce en quoi il croit par dessus tout, c’est en son humour. Il le voit infaillible, fin, désopilant. Il le rêve sensationnel, et bien sûr tout à sa gloire. Tout le monde ne partage pas cet avis au sein de ses équipes. Pour eux, son humour serait plutôt : lourd, vexant et stigmatisant. Mais c’est Michael qui signe les chèques à la fin du mois. Dilemme pascalien pour ses salariés. Ceux-là mêmes sont ses cobayes préférés et sa seule famille.

Stanley le désabusé, Meredith l’alcoolique, Kelly la coquette, Creed la fripouille, Andy le Très-propre-sur-lui, Phillis la ménagère de plus de 40ans, Oscar le latino, Pam la standardiste, Toby le dépressif, Jim le futé, Dwight le chasseur, Angela la psychorigide seront bien obligés d’entrer dans son jeu.
Jeux qui peuvent s’avérer pimentés car Michael est inventif, oh oui!?  Un grand créatif devant l’éternel : Jeux Olympiques au bureau, croisières, cérémonies de récompenses du personnel (Dundies) et fêtes en tout genre (anniversaires, Noël…) piloté par un « comité des fêtes ». Le spectateur n’est pas au bout de ses surprises… rebondissements et situations rocambolesques, on rit aux larmes. Effet cathartique garanti puisqu’on est obligé de confesser que certaines des situations ne sont pas sans rappeler des personnages et des événements vécus.


La grande force de The Office réside dans l’éventail de ressorts comiques que nous propose cette série. Le premier est donc Michael Scott et son management douteux. Mais il faut aussi noter de vraies émulations, terriblement poilantes côté personnel. En premier lieu, le duo comique entre le n°2 et le challenger. Dans tout duo comique on a souvent deux personnages avec des caractères diamétralement opposés à la Francis Veber. Le « ying » ici est Dwight Schrute le facétieux délateur, n°2 de l’entreprise, interprété par Rainn Wilson. Le « yang » de Dwight Schrute est Jim Halpert. Sympa, posé, une vie sociale bien remplie, Jim est jeune dynamique et plutôt beau garçon. Impossible que ces deux là s’entendent. La vie quotidienne de l’open space de Dundler Mifflin sera donc rythmée de traquenards, guet-apens et autres petits complots.


Le second rôle :

A l’instar d’autres personnages secondaires de série, dont Barney Stinson d’How I met Your Mother est l’exemple paradigmatique, Dwight Schrute crée l’événement parce qu’il est furieusement hors des standards. Porter à l’écran (même petit) un franc tireur, cultivateur de betteraves, avec un frère attardé, un look à faire pâlir Jean-Claude Dusse et un égo sur-dimensionné : c’est déjà en soi une petite révolution. Merci à Ricky Gervais et Stephen Merchant d’avoir forgé un tel personnage. Dwight est joyeusement antipathique, ambitieux, patriotique jusqu’à abrutissement, socialement inapte et belliqueux. Aussi dingue que cela puisse paraître, cela fait de lui un caractère bigrement attachant et diablement drôle. Rainn Wilson qui était déjà apparu comme assistant à la morgue dans Six Feet Under (Six Pieds sous terre), conquiert le public avec sa bagnole au tunning douteux, ses armes de poings planquées de partout dans le bureau et sa devise (parodiée par Jim) « Bears. Beets. Battlestar Galactica » (Ours. Betterave. Série de science-fiction de Ronald D. Moore).


Le ton :

Mais qui dit histoires de bureau dit aussi haines et gué-guerres. Le bureau de Scranton devra survivre au marché américain du papier, pas très florissant, notamment dans la Saison 7. Les joutes seront donc aussi internes. Les cols blancs seront ainsi confrontés aux cols bleus du stock : biceps contre matière grise. Mais ils devront de surcroît se battre pour imposer leur philosophie. Une philosophie singulière, portée par leur directeur, qui ne fait pas l’unanimité vis-à-vis du siège New Yorkais (à quelques encablures seulement de Scranton et pourtant si loin). Sans compter les conflits avec les autres antennes de Dundler Mifflin dans le pays.


Que peut-il manquer pour que ce cocktail soit molotov ? L’Amour ! C’est là que la caméra fouineuse du documentaire dévoile des conversations confidentielles et observe des relations naissantes. La caméra de plus en plus intrusive au fil des saisons fait progresser l’intrigue et met en lumière quiproquos, bassesses et tripotages. En fil conducteur, on retrouve Pam et Jim en Tristan et Iseult modernes. D’autres couples, plus « insolites », semblent également vouloir se former …


La série ne repose donc pas uniquement sur les épaules de Steve Carell. Et tant mieux, car la 8ème saison à paraître en 2012 ne le comptera plus au générique. Petite révolution pour la série qui a rendu célèbre la bourgade de Pennsylvanie, une affaire à suivre…

Pour finir, levons un tabou sur cette série. Il existe une série éponyme The Office, sur le même thème mais dont l’action se situe de l’autre côté de l’Atlantique, c’est d’ailleurs la première des deux à être apparue. Par dessus le marché, les réalisateurs sont les mêmes. Pourtant en dehors du pilote et de certains épisodes des premières saisons, les deux séries ont des scénarios diamétralement opposés.

British très noire ou Amerloc haut en couleur à vous de voir.  Au final c’est un peu comme choisir entre Les Beattles ou Les Stones… chacun son style!


Casting :

Steve Carell (Michael Scott), Rainn Wilson (Dwight K.Schrute), John Krasinski (Jim Halpert), Jenna Fischer (Pam Beesly), B.J. Novak (Ryan Howard), Leslie David Baker (Stanley Hudson), Brian Baumgartner (Kevin Malone), Angela Kinsey (Angela Martin), Phyllis Smith (Phyllis Lapin), Mindy Kaling (Kelly Kapoor), Creed Bratton (Creed Bratton), Paul Lieberstein (Toby Flenderson), Oscar Nuñez (Oscar Martinez), Kate Flannery (Meredith Palmer), Ed Helms (Andy Bernard), Melora Hardin (Levinson-Gould), Craig Robinson (Darryl Philbin), David Denman (Roy Anderson), Rashida Jones (Karen Filipelli), Andy Buckley (David Wallace), Ellie Kemper (Kelly Erin Harron) et Amy Ryan (Holly Flax).





Qui veut adopter Mélanie Laurent?

Depuis une dizaine d’années, Mélanie Laurent retient l’attention d’un public tantôt charmé, tantôt exaspéré, sur scène ou devant la caméra. Ces derniers temps, ses apparitions se sont diversifiées. Après  un album concocté par Damien Rice et Joel Shearer (sur lequel, on ne se prononce pas), un discours remarqué pour l’ouverture du festival de Cannes (sur lequel on ne se prononce toujours pas), Mélanie Laurent réalise son premier film. Il sort en salle demain.

 

L’histoire est simple. Une famille unie voit son fragile équilibre exploser le jour où Marine (Marie Denarnaud) tombe amoureuse d’Alex (Denis Ménochet). Si Millie, la mère (Clémentine Célarié) approuve cette rencontre, Lisa, la sœur (Mélanie Laurent) se sent délaissée. Il faut dire que des hommes, il n’y en avait pas beaucoup dans leur histoire jusqu’à présent. Mélanie Laurent incarne la mère d’un petit Léo, cinq ans, qui refuse catégoriquement de voir quiconque s’approcher de sa tribu. Petit courant d’air avant la tempête. La belle amoureuse se fait faucher par une voiture et tombe dans le coma. Commence alors un long travail de deuil qui vise à accepter qu’une personne adoptée tire sa révérence tandis que d’autres se font une place au sein de la famille au pire moment.

Conseil d’ami. Tout ce qu’elle touche, Mélanie Laurent le marque de son sceau. Dans son film, elle est partout. On la sent dans les personnages, on l’entend dans les discours, on la voit dans le cadre de la caméra. Elle se décline sous toutes ses formes jusque sur le papier peint. Omniprésente. Alors si vous l’aimiez, Mélanie Laurent, adoptez-la. Vous ne serez pas déçus. Mais les sceptiques, abstenez-vous.

 

Bande annonce du film :