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[Exposition] « Précieux vélins » au Muséum d’Histoire Naturelle : un Éden en fleur au milieu de l’hiver

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Amaryllis belladona – Hæmanthus coccineus. Nicolas Robert. © MNHN, Dist. RMN/Tony Querrec Couverture de l’ouvrage sous la direction de Pascale Heurtel et Michèle Lenoir

À l’occasion de la parution de l’ouvrage « Les vélins du Muséum national d’histoire naturelle », sous la direction de Pascale Heurtel et Michèle, aux éditions Citadelle et Mazenod, le cabinet d’histoire du Jardin des Plantes expose une sélection de près de 150 vélins parmi les 7000 réalisés du XVIIème au XXème siècle. Une occasion unique d’admirer des œuvres fragiles très rarement sorties, porteuses de l’histoire riche de ce lieu mythique qu’est devenu le Jardin des Plantes.

« Préparez-vous à faire avec moi le tour du globe. C’est peut-être le tour de Paris ; mais n’importe. Là nous embarquâmes pour traverser la Seine et aborder au Jardin des Plantes », écrivait L.F. Jauffret à la fin du XVIIIème siècle dans son Voyage au Jardin des Plantes. Pascale Heurtel, conservatrice à la bibliothèque centrale du Muséum, est parvenue à proposer un véritable voyage au cœur des collections dont elle est en charge, et nous embarque à son tour dans une immersion qui embrasse près de trois siècles. Cela en dépit d’une contrainte de poids, à savoir le manque d’espace dont dispose le Muséum d’Histoire Naturelle pour proposer une exposition d’envergure.

Cabinet d'Histoire du Jardin des Plantes, entrée de l'exposition. Photo : Marianne Guernet-Mouton
Cabinet d’Histoire du Jardin des Plantes, entrée de l’exposition. Photo : Marianne Guernet-Mouton

Au milieu du Jardin des plantes, l’histoire se sème depuis 1635. Ici se trouve le cabinet d’histoire, où se tient l’exposition qui, d’une certaine manière, a déjà commencé dès lors que l’on a franchi l’enceinte par la rue Cuvier : pour tout visiteur sensible à l’histoire du lieu, c’est là que logeaient les artistes pensionnés par le Muséum sous l’Ancien Régime. Dès les premiers pas dans le cabinet, une généalogie de ceux qui ont participé à l’entreprise d’inventaire de la nature nous accueille, placée directement face au livre prétexte à l’exposition et à de nombreux cartels qui mettent en lumière le vélin comme matériau : peau de veau mort-né, et pour cela support d’exception.

Le « Raphaël des fleurs »

À l’origine de la collection des vélins, le frère de Louis XIII, Gaston d’Orléans (1608-1660). D’après le botaniste Antoine de Jussieu, celui-ci « ne se contenta plus dans son jardin de voir croître les plantes rares […], il voulut encore que son cabinet fut orné des dessins et des peintures qu’il faisait faire d’après le naturel ». Nicolas Robert fut alors le premier peintre à réaliser des vélins de ce qui allait bientôt devenir une grande collection à la croisée des arts et des sciences. Après lui se sont succédés Jean Joubert, Claude Aubriet, Madeleine Basseporte (qui « conservait la nature des plantes » dans ses dessins, selon Jean-Jacques Rousseau), Gérard Van Spaendonck, ou encore Pierre-Joseph Redouté (aussi appelé le « Raphaël des fleurs »). Ces artistes était tenu de fournir régulièrement des vélins. D’abord destinés à servir les arts décoratifs et la broderie, ces dessins tendaient en même temps à devenir de réels outil pour les naturalistes, notamment lorsque le Jardin du Roi est remanié en 1793 en Muséum d’histoire naturelle et que les vélins sont entreposés à la bibliothèque à la vue du public.

Première salle d'exposition. Photo : Marianne Guernet-Mouton
Première salle d’exposition. Photo : Marianne Guernet-Mouton

Dans deux petites salles d’exposition tapissées de rouge, comme pour subtilement rappeler le cuir des portefeuilles gardant depuis des siècles ces vélins, s’organise un dialogue intelligent entre la faune et la flore. Suivant un cheminement chronologique, les dessins sont exposés sous vitrines et ne restent accrochés que peu de temps, de sorte que l’exposition aura changé trois fois en quelques mois pour éviter d’abîmer les œuvres.

Sur les murs, des fleurs et plantes rares ayant été naturalisées au Jardin, mais aussi oiseaux, chevaux et autres animaux de la main de Robert à Redouté. S’il fallait retenir une seule chose de cette collection, c’est l’esthétique commune à toutes les œuvres.

Enfin, aux images se greffent des écrits, car pour ne citer que Les Liliacées de Redouté, de nombreux vélins firent l’objet de gravures et de publications. Il ne faut pas perdre de vue que, pour le savant, ces représentations venaient compléter des observations et des écrits que les commissaires de l’exposition nous montrent également. Bien que l’ordre chronologique ordonne la visite, les nombreuses indications tendent à reconstituer l’usage des vélins suivant les siècles. Une place particulière est donnée au caractère éminemment scientifique des œuvres, qui au premier coup d’œil, ravissent surtout pour leur beauté incontestable.

Julie Ribault, redouté's school of botanical drawing in the salle Buffon of the Museum d'histoire naturelle, 1830, aquarelle, Cambridge, The Fitzwilliam Museum
Julie Ribault, redouté’s school of botanical drawing in the salle Buffon of the Museum d’histoire naturelle, 1830, aquarelle, Cambridge, The Fitzwilliam Museum

Face aux contraintes techniques pesant lourdement sur l’organisation d’une telle exposition, il faut saluer l’effort de construction d’un discours commun à des œuvres contraintes à la rotation. Toute l’intelligence de ce voyage réside dans ce fascinant effort d’inventaire de la nature ayant traversé les siècles et tient finalement dans le titre de l’exposition « Précieux vélins ». Ainsi, jusqu’au 13 janvier et pour la première fois depuis 1793, au Cabinet d’Histoire du Jardin des plantes : un Éden en fleur déjoue l’hiver et le cour de ses heures.

« Précieux vélins. Trois siècles d’illustrations naturalistes », sous la direction de Pascale Heurtel, au Cabinet d’Histoire du Jardin des Plantes, Muséum National d’Histoire Naturelle, entrée par le 57, rue Cuvier, 75005 Paris. Tarifs : 1€ tarif réduit, 3€ plein tarif. Prolongation jusqu’au 13 janvier 2017. Plus d’informations ici : http://www.mnhn.fr/fr/




[Exposition] L’esprit du Bauhaus : Une référence toujours actuelle

« Candélabre à treize lumières », Bruno Paul, 1901 © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt, DR
« Candélabre à treize lumières », Bruno Paul, 1901
© Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt, DR

Il y a bientôt 100 ans Walter Gropius créait à Weimar une école d’un genre nouveau qui alliait le respect de la tradition et le progrès de l’industrie pour devenir un « Art total ».Le but premier était de proposer à bas prix des objets pratiques et beaux, fabriqués de la main d’artistes, d’artisans et d’industries. On y côtoie une très grande épuration de lignes, et en parallèle, une très grande profusion de motifs, de décors et de couleurs.

L’exposition retrace de manière chronologique les différentes disciplines et ateliers qui ont progressivement vu le jour. Elle nous montre une richesse artistique nouvelle, palpable au travers de nombreuses réalisations : mobiliers, vaisselle, architecture, photographies, textiles, céramiques, collages, maquettes, affiches, costumes, lignes, formes, matières, couleurs… en 1929 est née la première revue et suivront les premiers livres. Une salle est d’ailleurs dédiée à l’imprimerie, la typographie, la reliure, la publicité et l’affiche qui engendrera une nouvelle méthode de communication.

Cette nouvelle conception esthétique et idéologique a été grandement héritée des corporations médiévales et cette tradition est très présente dans l’exposition.

Marcel Breuer, « Tables gigognes », 1928 Bois, acier tubulaire © Musée des Arts décoratifs, Paris, Jean Tholance / A.D.A.G.P. 2016
Marcel Breuer, « Tables gigognes », 1928
Bois, acier tubulaire
© Musée des Arts décoratifs, Paris, Jean Tholance / A.D.A.G.P. 2016

Le Bauhaus est avant tout une histoire humaine. La transmission du savoir et la pratique artistique permanente sont représentées ici de manière très simple mais à la fois très détaillée. Cette transmission et cette pratique nous permettent de sentir cette nouvelle approche globale qui a fait la force de ce courant artistique.

Outre les projets aboutis, de nombreuses études de mouvement, matières, perspectives sont également accrochées.

Muller Van Severen, « Installation », 2012 Cuir laiton propylène © Musée des Arts décoratifs, Paris, Jean Tholance
Muller Van Severen, « Installation », 2012
Cuir laiton propylène
© Musée des Arts décoratifs, Paris, Jean Tholance

Cette exposition précise, et d’une extrême richesse, nous invite dans sa dernière partie à découvrir la continuité du Bauhaus à travers des projets contemporains dans un parfait héritage idéologique et artistique.

« L’esprit du Bauhaus », jusqu’au 26 février 2017 au Musée des Arts Décoratifs, 107, rue de Rivoli, 75001 Paris. Plus d’informations ici : http://www.lesartsdecoratifs.fr/francais/musees/musee-des-arts-decoratifs/actualites/expositions-en-cours/design/l-esprit-du-bauhaus/

 




[Exposition] « Rayski – Baselitz : scènes de chasse en Allemagne » : Comme un brame au fond du bois

Friese Richard, Combat de cerfs,1906, huile sur toile, 100 x 170 cm, © Stiftung Dome und Schlösser in Sachsen-Anhalt Jagdschloss Letzlingen (Saxe-Anhalt) - photo: N. Perner
Friese Richard, Combat de cerfs, 1906, huile sur toile, 100 x 170 cm, © Stiftung Dome und Schlösser in Sachsen-Anhalt Jagdschloss Letzlingen (Saxe-Anhalt) – photo: N. Perner

En plein cœur du Marais parisien, voilà qu’on sonne l’hallali. Un brame s’élance du fond des bois, et le bruit du cor résonne : dans l’atypique musée de la Chasse et la Nature, des scènes de vèneries picturales se déroulent. Sous le regard de deux figures majeures de l’art allemand que sont Ferdinand von Rayski et Georg Baselitz, l’exposition dévoile un pan de l’art cynégétique des XIX et XXème siècles, assez peu connu en France. Concis mais de qualité, le parcours n’est pas une ode ou une apologie de la chasse ; il représente avant tout, l’opportunité d’admirer des chefs-d’œuvre emblématiques de la peinture germanique, des paysages romantiques de Wilhelm Leibl aux toiles renversées de Baselitz.

A l’origine de cette exposition, il y a l’acquisition récente d’une toile par le musée : la Halte de chasse dans la forêt de Wermsdorf, peinte en 1859 par Rayski ; l’occasion idéale de confronter les antagonismes iconographiques sur la scène de chasse qui se développent des deux côtés du Rhin, et de faire dialoguer les collections permanentes avec celles des grands musées suisses et allemands. Dans une ambiance aux tonalités rouge brique, conférant au lieu un charme automnal, s’ouvre un panorama consacré à la peinture de chasse en Allemagne, entre 1830 et 1914. Si le panel d’œuvres est restreint, il permet néanmoins d’aborder plusieurs thématiques, sans lassitude ou redondance.

Rayski Ferdinand (von), Halte de chasse dans la forêt de Wermsdorf, 1859, huile sur toile, 114 x 163 cm, Paris, Musée de la Chasse et de la Nature © musée de la Chasse et de la Nature, Paris - DR
Rayski Ferdinand (von), Halte de chasse dans la forêt de Wermsdorf, 1859, huile sur toile, 114 x 163 cm, Paris, Musée de la Chasse et de la Nature © musée de la Chasse et de la Nature, Paris – DR

Hérité d’une tradition féodale, le droit de chasse reste au XIXème siècle, exclusivement accordé à la noblesse qui la pratique de manière absolutiste, voire impérieuse. Cette violence des grands seigneurs, Carl Wilhelm Hübner la condamne dans sa toile Droit de chasse, où un paysan se fait tirer dessus pour avoir débusqué un sanglier. Pourtant, la révolte gronde dès 1848 et des bouleversements se font sentir : le temps est venu d’ouvrir la pratique au peuple.

A cette évolution, correspond un renouvellement parallèle de l’art cynégétique. L’influence du romantisme allemand n’y est pas étrangère : chez Joseph Anton Koch, paysages héroïques et historiques se parent de scènes de chasse ; tandis que Carl Friedrich Lessing confère à ses compositions, une atmosphère idyllique où se perdent des chasseurs contemplatifs.

Friese Richard, 16 cors tiré par S.M. Guillaume II le 26 septembre 1890 dans le district forestier de Szittkehmen (Rominten), 1890, huile sur toile, 74 x 60 cm, Lünebourg, Ostpreussisches Landesmuseum© Ostpreussisches Landesmuseum, Lueneburg
Friese Richard, 16 cors tiré par S.M. Guillaume II le 26 septembre 1890 dans le district forestier de Szittkehmen (Rominten), 1890, huile sur toile, 74 x 60 cm, Lünebourg, Ostpreussisches Landesmuseum© Ostpreussisches Landesmuseum, Lueneburg

Quelle est loin, l’image kitsch et pompeuse que l’on se fait de la peinture de chasse ; entouré par cette faune majestueuse, cerné d’insondables forêts, on est saisi par la force de ces combats de cerfs et leur expressivité. Ici, Christian Kröner, Carl Friedrich Deiker et Richard Friese, sont autant de maîtres allemands qui métamorphosent le genre animalier par l’éloquence de leurs toiles. Nobles et imposants, leurs cervidés sont minutieusement esquissés, dans un profond respect anatomique. De l’autre côté du Rhin, la picturalité est bien différente : à l’instar de Gustave Courbet peignant Le rut du printemps, les peintres français privilégient le sujet à l’exactitude biologique.

Habité par la spiritualité de ces paysages allemands, on se presse au rez-de-chaussée du musée pour prolonger l’instant. Là, on assiste à la rencontre étonnante et pourtant si évidente, entre Rayski (1806 – 1890) et Baselitz (né en 1938) ; deux artistes à la temporalité distincte que leurs motifs rassemblent sensiblement. Dès la première salle, la confrontation se veut sensible et percutante, elle accroche le regard : le Portrait de Ferdinand von Rayski III peint en 1960, catalyse l’admiration de Baselitz pour son prédécesseur et témoigne d’un retour à la figuration où l’humain revient au centre de la toile.

Méconnu en France, Rayski est pourtant une figure éminente de l’art allemand. Peintre de la cour de Dresde, ses œuvres révèlent son amour pour la nature et la peinture cynégétique, tout en respectant ses obligations envers l’aristocratie saxonne dont il ébauche les portraits. Si son Lièvre dans la neige atteste de sa maîtrise pour la représentation animale et de la pluralité de ses talents, on se plaît à découvrir un artiste qui ne cesse d’évoluer pour tendre à une touche plus intime et autonome. Influencé par Courbet, Rayski tend vers une libération du sujet pour faire œuvre de peintre.

Baselitz Georg, De Wermsdorf à Ekely (Remix), 2006, huile sur toile, 300 x 250 cm, collection particulière© Georg Baselitz, 2016
Baselitz Georg, De Wermsdorf à Ekely (Remix), 2006, huile sur toile, 300 x 250 cm, collection particulière© Georg Baselitz, 2016

Cette libération stylistique visible en filigrane, marque Baseltiz au point de constituer un véritable tournant dans sa carrière : s’inspirant de La Forêt de Wermsdorf esquissée par Rayski, il opère un retournement du motif pour aboutir à ses célèbres « tableaux inversés », dont la chasse constitue une thématique prégnante. « Le renversement de la figure me donne la liberté d’affronter réellement les problèmes picturaux » explique Baselitz ; un constat porté à son paroxysme dans la série Remix, où l’attention se concentre pleinement sur l’acte créateur : chez lui, l’anecdotique s’efface derrière la matérialité picturale, la relation au monde se dissocie de la toile.

L’exposition s’achève sur une très belle sélection de dessins de Ferdinand von Rayski, issus du Cabinet d’arts graphiques de Dresde ; une alcôve intimiste et tamisée conçue tel un écrin, une occasion unique de prolonger la rencontre avec l’artiste et son œuvre. De cet exceptionnel bestiaire qu’est le musée de la Chasse et de la Nature, émerge une vision nouvelle de la peinture cynégétique, affranchie des habituels poncifs. Un voyage au cœur de paysages authentiques où l’âme allemande affleure, un cheminement hors des sentiers battus.

Thaïs Bihour

« Rayski – Baselitz : scènes de chasse en Allemagne » – L’exposition se tient jusqu’au 12 février 2017 au Musée de la Chasse et de la Nature. Plus d’informations sur http://www.chassenature.org/




[Actu] Le Palais de Tokyo fait peau neuve au printemps 2017 !

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Le Palais de Tokyo fait peau neuve au printemps 2017

Nouvelle librairie
Nouveau restaurant

Le Palais de Tokyo a lancé en décembre 2015 un appel à projets pour le renouvellement de sa librairie et de son restaurant situé près de son entrée. Ont été sélectionnés pour la nouvelle librairie Walther König & Cahiers d’Art et Quixotic Projects (Candelaria, Glass, Mary Celeste et Hero) pour le nouveau restaurant / bar.

La librairie Walther König & Cahiers d’Art ouvrira ses portes en mars 2017

Le succès de l’espace historique de la librairie du Palais de Tokyo a toujours symbolisé par sa présence et sa qualité l’engagement de l’institution envers les artistes, les auteurs, la pensée. Soucieux d’amplifier et d’actualiser ce succès l’espace de la librairie sera triplé et confié  à la librairie Walther König & Cahiers d’Art.

Le libraire de référence Walther König et le célèbre éditeur Cahiers d’Art s’associent ainsi pour ouvrir au Palais de Tokyo une nouvelle librairie, succédant ainsi à Pascale Brun d’Arre.

Avec plus de 40 points de vente en Allemagne, Angleterre, Autriche, Pays-Bas et plus récemment en Belgique, Walther König est un libraire incontournable en Europe dans le domaine artistique, proposant des livres sur l’architecture, le design, la mode, le cinéma et plus spécialement les arts visuels.

Cahiers d’Art est une maison d’édition de référence, dont la galerie et la revue ont été fondées en 1926 à Paris. Relancée en 2012 après plusieurs décennies en sommeil, Cahiers d’Art a depuis repris la publication de sa revue éponyme, de ses livres d’art uniques et de ses catalogues raisonnés, et propose également des éditions limitées et des lithographies originales.

Ces deux enseignes phares dans le monde de l’art s’unissent pour créer un nouvel espace de 450 m2 au sein du Palais de Tokyo, offrant une sélection internationale de livres et de magazines, mais aussi de la papeterie, des articles cadeaux et des produits liés aux expositions du Palais de Tokyo.

La conception architecturale de la nouvelle librairie a été confiée à Office, cabinet d’architecture basé à Bruxelles. La nouvelle librairie a ainsi vocation à devenir une destination incontournable à Paris pour tous les amateurs d’art.

Le calendrier : l’actuelle librairie du Palais de Tokyo fermera ses portes définitivement le 18 décembre 2016 (date de fermeture de l’exposition de Tino Sehgal). S’en suivra une phase de travaux, jusqu’à l’ouverture de la nouvelle librairie Walther König & Cahiers d’Art en mars 2017.

Le nouveau restaurant / bar ouvrira ses portes en juin 2017

Quixotic Projects, qui a créé à Paris les restaurants et bars Candelaria, Glass, Mary Celeste et Hero, a été sélectionné avec son architecte Lina Ghotmeh et Les Graphiquants, pour créer un nouveau restaurant et bar au Palais de Tokyo, succédant ainsi à Eric Wapler (Tokyo Eat et Smack).

Dans l’esprit du Palais de Tokyo, le nouvel espace de restauration sera une destination d’échanges et de convivialité, un pionnier parisien pour la durabilité environnementale et alimentaire, avec une grande nouveauté : un bar à cocktails décalé et novateur. L’architecture et le mobilier des espaces actuels du Tokyo Eat et du Smack seront totalement transformés, pour offrir une nouvelle destination lifestyle incontournable à Paris.

Le calendrier : le Tokyo Eat et le Smack fermeront définitivement leurs portes le 18 décembre (date de fermeture de l’exposition de Tino Sehgal). S’en suivra une phase de travaux, jusqu’à l’ouverture du nouvel espace de restauration/bar en juin 2017.

Dans l’intervalle :
– Une offre de restauration de type snack sera proposée par Quixotic Projects dans le Hall d’entrée du Palais de

Tokyo à partir du 10 janvier 2017
– Monsieur bleu propose une nouvelle formule à 27€ avec entrée / plat ou plat / dessert (ou 21€ le plat seul), du 18 décembre 2016 au 28 février 2017, ainsi que des nouvelles formules brunch le week-end.

(Source : Communiqué de presse)




[Exposition] « Oscar Wilde. L’impertinent absolu » sous les projecteurs

Événement de la rentrée de septembre, l’exposition Oscar Wilde ne désemplit pas. Et pour cause, elle se targue d’être la première grande rétrospective parisienne dédiée à la figure du dandy. Du petit garçon irlandais à l’homosexuel persécuté, Wilde nous est présenté dans toute sa splendeur et sa décadence.

L’espace aménagé par le Petit Palais pour abriter l’exposition est relativement petit mais très densément occupé par plus deux-cents œuvres et documents divers. On y découvre tout d’abord un Oscar Wilde enfant et jeune homme, entouré de sa famille et de ses mentors dans un intérieur au papier peint qui rappelle le mouvement Arts & Crafts. A travers une reconstitution des expositions de 1877 et 1879 à la Governor Gallery, c’est Wilde critique d’art en tant que défenseur des préraphaélites qui est ensuite mis à l’honneur. La scénographie de ces premières salles plonge le visiteur dans l’atmosphère d’un XIXe siècle élégant où évolue le dandy, partisan du « Beau » et figure de proue de l’Aesthetic Movement.

Photo : Quelques écrits d’Oscar Wilde, vue de l’exposition Oscar Wilde, 28 septembre 2016-15 janvier 2017, Petit Palais, Paris. © Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la ville de Paris.
Photo : Quelques écrits d’Oscar Wilde, vue de l’exposition Oscar Wilde, 28 septembre 2016-15 janvier 2017, Petit Palais, Paris. © Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la ville de Paris.

Les écrits de l’esthète sous vitrines sont augmentés de citations qui tapissent les murs de l’exposition, soit en commentaire immédiat d’un tableau, « […] deux jumeaux flottant au-dessus du monde en une étreinte indissoluble. Le premier déployant le manteau de ténèbres, tandis que l’autre laisse tomber de ses mains distraites les pavots léthéens en une averse écarlate » à propos de La Nuit et le Sommeil de Pickering, soit de manière plus paradigmatique, « Tout art est parfaitement inutile ». Malheureusement, ces citations très abondantes manquent de contexte pour faire sens.

Photo : Evelyn Pickering, La Nuit et le Sommeil, 1878. © De Morgan Foundation
Photo : Evelyn Pickering, La Nuit et le Sommeil, 1878. © De Morgan Foundation

Parce qu’elle est dédiée à un critique d’art du XIXe siècle, on ne peut s’empêcher de rapprocher Oscar Wilde. L’impertinent absolu à l’exposition L’Œil de Baudelaire au Musée de la Vie Romantique.

Photo : Napoleon Sarony, Portrait d’Oscar Wilde #26, 1882. © Bibliothèque du Congrès, Washington.
Photo : Napoleon Sarony, Portrait d’Oscar Wilde #26, 1882. © Bibliothèque du Congrès, Washington.

La contemporanéité de ces deux manifestations soulève de fait des interrogations dans le petit monde de l’histoire de l’art. Certains suggèrent que notre époque est à la recherche de grands hommes, d’autres soulignent le regain d’intérêt pour la critique dans la recherche universitaire, mais ne seraient-ce pas justement ces deux points qui sont traités différemment ? On a vu comment le Musée de la vie romantique s’intéresse à la question de la critique et de l’univers visuel de Baudelaire, alors que les commissaires de Oscar Wilde, Dominique Morel et Merlin Holland, ont plutôt axé leur propos autour de la personnalité de l’écrivain. Vedette lorsqu’il est photographié par Napoleon Sarony aux États-Unis, intellectuel quand il fréquente Victor Hugo à Paris, et enfin décadent parce que condamné pour ses écrits indécents et ses penchants homosexuels : Wilde est finalement un « impertinent absolu ».

Quand on aime les toiles fleuries des préraphaélites, les Salomé séduisantes, les scandales d’un siècle qui ne cesse d’attiser nos imaginaires, et les fins tragiques, cette exposition a de quoi séduire, autrement, il n’est peut-être pas nécessaire d’augmenter la foule qui s’y presse déjà.

Oscar Wilde, L’impertinent absolu, jusqu’au 15 janvier 2017 au Petit Palais, avenue Winston Churchill 75008 Paris. Plus d’informations ici : http://www.petitpalais.paris.fr/




[Exposition] « Des nouvelles du Père Noël » : Rep ho ho ho rtage

« Des Nouvelles du Père Noël » pour les grands et les petits !

Photo : Florence Levillain, Il se fait beau, décembre 2016, Exposition « Des nouvelles du père Noël », Bercy Village.
Photo : Florence Levillain, Il se fait beau, décembre 2016, Exposition « Des nouvelles du père Noël », Bercy Village.

Bercy Village est en pleine effervescence en cette période de préparation des fêtes. Les enfants courent, crient, sautent, les parents pressés les poursuivent et cherchent à les empêcher de disparaître dans la dense foule de passants. Quoi de mieux qu’une exposition sur le Père Noël pour les amadouer le temps de reprendre son souffle ? Sous nos yeux le père Noël est chez le coiffeur, Le père Noël vole dans l’espace…Vous êtes-vous déjà demandés ce que fait vraiment le Père Noël en attendant décembre ?

Photos : Florence Levillain, Sans une bonne logistique, pas de cadeau ; Il apprend à rester zen ; Reposé, il est temps de reprendre son rôle Il s’adonne aux joies du « lâcher prise » ; Tous sont unanimes : le Père Noël a besoin de vacances ! ; Le Père Noël se prépare à toute éventualité, 26 octobre 2016 – 2 janvier 2017, Exposition « Des nouvelles du père Noël », Bercy Village, Paris.
Photos :
Florence Levillain, Sans une bonne logistique, pas de cadeau ; Il apprend à rester zen ; Reposé, il est temps de reprendre son rôle Il s’adonne aux joies du « lâcher prise » ; Tous sont unanimes : le Père Noël a besoin de vacances ! ; Le Père Noël se prépare à toute éventualité, 26 octobre 2016 – 2 janvier 2017, Exposition « Des nouvelles du père Noël », Bercy Village, Paris.

Sur les murs des passages Saint-Emilion et Saint-Vincent, on le découvre comme on ne l’avait jamais vu auparavant : à la pêche, à la mer, dans les bois, ce grand barbu vêtu de rouge parcoure le monde à travers les photographies de Florence Levillain. Et ce n’est autre qu’une photographe de reportage qui se cache derrière cette série de photographies cocasses – Florence Levillain s’est notamment fait connaître pour ses grands reportages dans la presse (Libération, Le Monde etc.) – si elle répond à de nombreuses commandes et travaille souvent avec de grandes institutions, cette année elle collabore avec la Mairie de Paris et surtout, avec un personnage bien spécial : le Père Noël.

Grâce aux petites phrases qui sous-titrent avec humour les images qui jalonnent les allées de magasins de Bercy Village, la photographe nous raconte l’histoire d’un Père Noël à la fois humain et fantastique, qui va de sa baignoire au cinéma, en passant par un petit café avec Dark Vador. Cette exposition, qui a l’avantage d’être gratuite et de ravir les enfants ainsi que les plus grands, est une immersion surprenante dans l’intimité de celui que tout le monde s’apprête bientôt à attendre sagement avec l’idée de le capturer.

Pour les moins téméraires et ceux qui n’auront pas la patience d’attendre toute une nuit au pied du sapin, à Bercy Village, Florence Levillain l’a capturé pour nous !

« Des nouvelles du Père Noël », jusqu’au 2 janvier 2017 à Bercy Village, passages Saint-Emilion et Saint-Vincent. Plus d’informations : http://www.bercyvillage.com/bercyVillage/fr/expo-desnouvellesduperenoel




Actu : Décembre en famille dans les Musées de la Ville de Paris

 Programmation des vacances de Noël dans les Musées de la ville de Paris

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> J-15 avant Noël : LE WEEK-END GRATUIT EN FAMILLE LES 10 & 11 DÉCEMBRE 2016
Le temps d’un week-end, Paris Musées lance sa saison festive hivernale et invite les enfants à partir de 4 ans et leurs parents à découvrir les musées autrement.
Ateliers, visites guidéeset contées, spectacles et concerts, composent une programmation gratuite et spécialement conçue pour les familles.
Conçu en écho de leurs collections et des expositions en cours, ce weekend est l’occasion de partager des moments uniques dans l’univers artistique et littéraire des musées de la Ville de Paris et découvrir ou redécouvrir les musées de la ville de Paris de manière ludique.
C’est aussi un temps privilégié pour donner aux enfants le goût des musées et apprendre tout en s’amusant.
> LES VACANCES AU MUSEE
Pendant les vacances de Noël, Paris Musées proposent aux familles une programmation
spécifique dans le réseau des musées de la Ville de Paris.
Au Petit Palais, au Palais Galliera, au Musée Bourdelle… une riche programmation vous attend : ateliers, visites, animations, visites dessinées… il y en a pour tous les goûts !

Programme détaillé du week-end gratuit :

(Le programme complet est ici téléchargeable sur le site de Paris Musées !)

 

SAMEDI 10 DÉCEMBRE

MUSÉE D’ART MODERNE DE LA VILLE DE PARIS

Samedi 10 décembre à 16h et dimanche 11 décembre à 16h – A partir de 6 ans sur réservation

Visite découverte en famille
des œuvres phares de la collection

Accompagnées
par un intervenant, parents et enfants partent à la découverte de La Danse
d’Henri Matisse et des œuvres colorées de Robert Delaunay . Une visite
immersion dans les chefs d’œuvres de la collection vécue et partagée en
famille.

Dimanche 11 décembre – 14h, 15h et 16h – À partir de 3 ans – Durée : 1h

Au point Némo, visite et atelier

Parents et enfants découvrent l’installation Point Némo
de l’artiste Laurence Le Deunff en parcourant un environnement coloré agrémenté
de drôle de sculptures. Le visiteur est invité à pénétrer dans un monde aquatique, fantastique et peuplé d’animaux marins bienveillants. L’atelier est une invitation en famille, à imaginer et créer en modelage, les créatures qui semblent s’être enfuies à notre arrivée et dont il ne reste plus que les queues ! 

 

MAISON DE BALZAC

15h30 – À partir de 11 ans – Durée : 1h

Représentation théâtrale Le Père Goriot, d’après Balzac

Adaptation pour le théâtre, de l’un des romans les plus connus de Balzac, Le Père Goriot. Dans une mise en scène dynamique, trois acteurs endossent avec virtuosité les rôles féminins grâce au truchement des masques empruntés à la commedia dell’arte. L’adresse de leur jeu oscille entre émotion, poésie et drôlerie. Un dispositif simple qui crée un effet maximum.

Avec Thomas Ganidel, Marc-Henri

Lamande et Didier Lesour.

Mise en scène de Frédérique
Lazarini.

 

MUSÉE BOURDELLE

de 14h à 17h – À partir de 10 ans – Durée : 3h

Un monument pour la paix

Visite de l’exposition « De Bruit et de Fureur. Bourdelle sculpteur et photographe » suivie d’un atelier de modelage. Comment représenter un symbole, un concept ? Après avoir visité l’exposition temporaire, les apprentis sculpteurs mettent en forme leurs idées et créent une maquette en argile de leur proposition.

 

MUSÉE CERNUSCHI

11h – Pour les 4 / 6 ans – Durée : 1h30

Perroquets exotiques, visite-animation pour découvrir l’exposition « Walasse
Ting »

S’inspirant des couleurs vives des œuvres de Walasse Ting, petits et grands illustrent des perroquets aux couleurs flamboyantes.

15h et 16h30 – De 5 à 10 ans – Durée : 1h

Spectacle d’ombres chinoises L’enfant magique et le roi dragon

Ce spectacle musical d’ombres chinoises, donné par le théâtre du petit miroir dans l’auditorium du musée Cernuschi, est tiré du Roman de l’Investiture des Dieux. Cette histoire de querelles divines est exclusivement montrée en spectacle avec le théâtre d’ombres. Les ombres chinoises utilisées sont des figurines en peaux finement ciselées, teintées et translucides, qui projettent des ombres colorées sur l’écran.

16h30 – Pour les 6/8 ans – Durée : 1h30

Sauterelles et libellules, visite-animation pour découvrir l’exposition « Walasse
Ting »

Les familles sont invitées à imaginer et faire vivre ces petites bêtes dans une nature foisonnante.

15h – Pour les 9 / 12 ans – Durée : 1h30

Le mot dessiné, visite-animation pour découvrir l’exposition « Walasse
Ting »

À la manière de Walasse Ting, les enfants et leurs parents s’initient de façon ludique et dynamique à la calligraphie.

 

MUSÉE COGNACQ-JAY, LE GOÛT DU XVIIIe

11h – À partir de 6 ans – Durée : 1h30

La vie quotidienne au siècle des Lumières,
visite-animation

Au cours d’une visite ludique, les enfants et leurs parents découvrent la vie quotidienne au XVIIIe siècle à travers les collections de peintures, sculptures, meubles et objets d’art.

14h30 et 16h – À partir de 6 ans – Durée : 1h30

Mystères au musée,
visite-animation

 Guidés par une animatrice, les petits et les grands découvrent les collections tout en aiguisant leur sens de l’observation, et en répondant aux énigmes qui leurs sont posées tout au long de la visite.

 

CRYPTE ARCHÉOLOGIQUE DE L’ÎLE DE LA CITÉ

10h30 et 15h – À partir de 6 ans – Durée : 1h30

Dessous-dessus, visite découverte

Après une découverte de la Crypte archéologique, les participants sont invités depuis le parvis à faire jouer leur imagination pour retrouver les traces du passé et imaginer l’atmosphère changeante de l’Île de la Cité au fil des siècles et de ses transformations.

11h – À partir de 8 ans – Durée 1h30

Pile et face, visite dessinée

Des histoires et des monnaies en veux-tu, en voilà pour tout connaître ou presque de la numismatique, avec en prime la réalisation de sa propre planche de monnaies !

14h – À partir de 8 ans – Durée : 1h30

Mission archéo, Visite-animation

De la découverte à l’interprétation, de la préservation à l’exposition, la visite-animation permet de mieux comprendre les enjeux de l’archéologie et de sensibiliser les enfants au métier d’archéologue.

15h30 et 16h30 – À partir de 5 ans – Durée : 1h30

L’île aux trésors, visite contée 

Un aventurier accoste sur l’île de la Cité. L’on dit qu’un trésor y est caché… Vieilles pierres ou pièces de monnaie ? C’est l’histoire de Paris qui le dit !

16h  – À partir de 6 ans – Durée : 1h30

Visite de l’exposition « L’or du pouvoir »

L’exposition spécialement conçue pour les familles, présente, en regard des vestiges archéologiques de la Crypte, une sélection exceptionnelle de monnaies, témoins matériels de l’histoire de Paris et de son évolution de Jules César à Marianne.

 

PALAIS GALLIERA

10h – À partir de 8 ans – Durée : 3h

Visite contée et calligramme dans l’exposition « Anatomie d’une collection »

Après la visite contée, les parents et les enfants réalisent un calligramme. Les mots décrivant le vêtement ou l’accessoire d leur choix prendront la forme du modèle choisi.

14h30 – À partir de 13 ans – Durée : 1h30

Visite de l’exposition « Anatomie d’une collection »

Les jeunes et leurs parents découvrent ensemble l’exposition « Anatomie d’une collection ».

 

MAISON DE VICTOR HUGO

10h et 13h45 – À partir de 6 ans – Durée : 1h

L’art d’être grand-père

11h30 – À partir de 9 ans – Durée : 1h

Notre-Dame de Paris

13h30 – À partir de 9 ans – Durée : 1h

Cosette et Gavroche

15h – À partir de 6 ans – Durée : 1h

Monstres et merveilles

15h – À partir de 9 ans – Durée : 1h

Gilliat le marin

La Maison de Victor Hugo propose un éventail de visite contées pour des petites et grandes oreilles. La poési sera à l’honneur dans les deux thèmes dédiés aux plus jeunes  L’art d’être grand-père présente Hugo « papapa » ainsi nommé e décrit par son petit-fils Georges, Monstres et merveilles chez M. Hugo est une balade enchanté à travers les décors imaginés et créés par l’écrivain, plei d’oiseaux merveilleux, mais aussi de lions ou de dragon étranges. Trois autres thèmes de visites contées sont destinées au plus grands offrant le plaisir de plonger dans l’univers de Notre-Dame de Paris, Les Misérables ou Les Travailleurs de la Mer.

 

MUSÉE DE LA VIE ROMANTIQUE

14h30 – À partir de 6 ans – Durée : 1h30

Visite découverte pour les petits et les grands

Cette visite est l’occasion de découvrir en famille les œuvre phare du musée, mais aussi d’explorer la maison, les atelier et le jardin.

 

MUSÉE ZADKINE

10h – À partir de 15 ans – Durée : 3h

Mémoire dessinéee, The Hollow Men Atelier dans le cadre de l’exposition De(s)Tin(s) de guerre

Les participants dessinent au trait et à la manière de Zadkine autou de l’œuvre de Chris Marker, hommage au poème de TS. Eliot.

 

DIMANCHE 11 DÉCEMBRE

MUSÉE D’ART MODERNE DE LA VILLE DE PARIS

14h, 15h et 16h – À partir de 3 ans. – Durée : 1h

Inventer de toute pièce, mini atelier dans l’exposition « Carl Andre »   

Carl Andre conçoit des installations qui modulent l’espace. Parents et enfants après avoir visité l’exposition munis d’un livret jeux, son invités à réaliser à partir d’éléments en bois leur propr installation avec l’aide d’une intervenante plasticienne.

16h – À partir de 6 ans – Durée : 1h – Sans réservation.

Visite découverte de l’exposition Carl Andre, Sculpture as place,1958-2010*

Détail de la programmation : voir texte de l’activité du samedi

 

MAISON DE BALZAC

16h30 – À partir de 11 ans – Durée : 1h – Représentation théâtrale

Le Père Goriot, d’après Balzac

(Détail de la programmation : voir texte de l’activité du samedi)

 

MUSÉE CERNUSCHI

11h – Pour les 4 / 6 ans – Durée : 1h30

Perroquets exotiques, visite-animation pour découvrir l’exposition « Walasse Ting »

Détail de la programmation : voir texte de l’activité du samedi

15h et 16h30 – De 5 à 10 ans – Durée : 1h

Spectacle d’ombres chinoises L’enfant magique et le roi dragon

Détail de la programmation : voir texte de l’activité du samedi

16h30 – Pour les 6 / 8 ans – Durée : 1h30

Sauterelles et libellules, visite-animation pour découvrir l’exposition « Walasse Ting »

Détail de la programmation : voir texte de l’activité du samedi

15h – Pour les 9 / 12 ans – Durée : 1h30

Le mot dessiné, visite-animation pour découvrir l’exposition « Walasse Ting »

Détail de la programmation : voir texte de l’activité du samedi

 

MUSÉE COGNACQ-JAY, LE GOÛT DU XVIIIe

11h – À partir de 6 ans – Durée : 2h

Portrait au pastel, atelier

Après l’observation des œuvres de la collection, les enfants e leurs parents sont initiés en atelier à la technique du pastel.

16h – À partir de 6 ans – Durée : 1h

Les Quatre Saisons de Vivaldi

Avec les musiciens de l’Orchestre de Paris, présentation de instruments du quatuor et extraits musicaux des Quatre Saisons de Vivaldi, en écho ave les oeuvres du musée.

 

CRYPTE ARCHÉOLOGIQUE DE L’ÎLE DE LA CITÉ

11h – À partir de 8 ans – Durée : 1h30

Mission archéo, visite-animation

Détail de la programmation : voir texte de l’activité du samedi

14h – À partir de 6 ans – Durée : 1h30

Promenade découverte de l’île de la Cité

Le cœur de la capitale dévoile son histoire et ses légendes entr monuments emblématiques et vestiges cachés.

15h30 et 16h30 – À partir de 5 ans – Durée : 1h30

L’île aux trésors, visite contée

Détail de la programmation : voir texte de l’activité du samedi

16h – À partir de 6 ans – Durée : 1h30

Visite de l’exposition « L’or du pouvoir »

Détail de la programmation : voir texte de l’activité du samedi

 

MUSÉE DU GÉNÉRAL LECLERC DE HAUTECLOCQUE ET DE LA LIBÉRATION DE PARIS /

MUSÉE JEAN MOULIN

11h et 14h30 – 7/10 ans – Durée : 2h

Fabriquer ses jouets avec le « système D »

À la manière des parents et enfants imaginatifs durant la Seconde Guerre mondiale, les participants fabriquent au musée leurs propres jouets avec des matériaux de récupération.

 

PETIT PALAIS

10h et 16h – À partir de 5 ans – Durée : 1h30

Visite-animation À la chasse aux anges

Tous les anges ont des ailes, mais toute créature ailée n’est pas ange. Pour le vérifier, les enfants partent à leur recherche dans les œuvres. Pour finir, chacun dessine le sien et repart avec une plume d’ange véritable.

14h – À partir de 5 ans – Durée : 1h30

Mon premier atelier au musée

Pour les artistes en herbe, sensibilisation à l’espace du musée, à son architecture et aux œuvres, avec une mallette ludique et sensorielle. En atelier, réalisation d’une carte souvenir « pop up », en papier, dessin et collage.

 

MUSÉE DE LA VIE ROMANTIQUE

11h, 12h, 14h, 15h et 16h – À partir de 5 ans – Durée : 1h

Contes d’hiver, contes des pays froids, visite contée

Loin d’ici, dans les forêts avoisinantes, les flocons tombent du ciel. Bientôt, tout sera blanc et le vent glacial soufflera… Petits et grands, vous viendrez en famille vous réchauffer en écoutant de belles histoires à l’approche de Noël.

 

MUSÉE ZADKINE

11h – À partir de 15 ans – Durée : 4h30

Mémoire gravée, The Hollow Men. Atelier dans le cadre de l’exposition De(s)Tin(s) de guerre

Parcours-discussion dans l’exposition, suivi d’un atelier d’initiation à la gravure autour du poème de TS. Eliot, The Hollow Men.

L’atelier se déroulera avec le même groupe de 11h à 12h30 au musée Zadkine puis de 13h30 à 16h30 à l’atelier du musée Bourdelle.)

 

Planifiez votre visite ici : parismusees.paris.fr
(Source : dossier de presse)



« L’Œil de Baudelaire » : du romantisme à la modernité

Photo : Cabinet où sont présentées les gravures de maîtres, Exposition « L’Œil de Baudelaire », 20 septembre 2016-29 janvier 2017, Paris, Musée de la Vie Romantique. © Esther Jakubec
Photo : Cabinet où sont présentées les gravures de maîtres, Exposition « L’Œil de Baudelaire », 20 septembre 2016-29 janvier 2017, Paris, Musée de la Vie Romantique.
© Esther Jakubec

Il y a bientôt cent-cinquante ans, Baudelaire mourait. Dans une volonté de commémoration, le Musée de la vie romantique propose une exposition riche qui offre un aperçu de l’univers visuel propre à l’auteur. Bien que célèbre pour ses poèmes, c’est le critique qui est ici mis à l’honneur. En effet, grâce au commissariat de Robert Kopp, Charlotte Manzini et Jérôme Farigoule partagé entre littérature et histoire de l’art, L’Œil de Baudelaire permet de confronter directement des œuvres majeures du milieu du XIXème siècle aux commentaires pointus du jeune auteur.

Lorsque l’on entre dans la première salle de l’exposition, on découvre un ensemble d’œuvres d’une grande diversité. Tout d’abord, les gravures d’œuvres iconiques telles que La Joconde, Le Pèlerinage à l’île de Cythère de Watteau, l’un des Capricos de Goya, le Marat assassiné de David, Faust dans son cabinet de Delacroix. Ces planches, accompagnées d’éditions d’époque des compte-rendus de Salon de 1845 et 1846, sont présentées dans une vitrine qui évoque plus l’intérieur bourgeois que le white-cube muséal. Cet ensemble, le premier dans le parcours de l’exposition, présente ainsi les artistes que Baudelaire admire, comme il l’exprime dans son poème Les Phares, titre repris pour nommer cette première salle. Outre ces grands maîtres, sont présents des peintres contemporains dont les tableaux colorés contrastent fortement avec les gravures en noir et blanc du cabinet d’entrée. Parmi eux, Delacroix, bien sûr, mais également Catlin et ses portraits d’indigènes, ou Chazal et Le Yucca gloriosa, tous les tableaux ayant en commun d’avoir été présentés au Salon de 1845 ou 1846 et commentés par Baudelaire à cette occasion.

Photo : Antoine CHAZAL, Le Yucca gloriosa fleuri en 1844 dans le parc de Neuilly, 1845, huile sur toile, 65x54 cm, Paris, musée du Louvre. © RMN-Grand Palais (musée du Louvre)
/ Gérard Blot
Photo : Antoine CHAZAL, Le Yucca gloriosa fleuri en 1844 dans le parc de Neuilly, 1845, huile sur toile, 65×54 cm, Paris, musée du Louvre. © RMN-Grand Palais (musée du Louvre)
/ Gérard Blot

Suite à cet espace introductif hétéroclite, les trois autres salles sont plus homogènes et conforment à leurs titres. Isolé dans une petite pièce exiguë, le second espace s’attèle à reconstituer « le musée de l’amour » rêvé par Baudelaire dans son Salon de 1846, où pourraient se côtoyer amour maternel et désir érotique. Quant aux thèmes annoncés pour les salles III et IV, L’héroïsme de la vie moderne et Le spleen de Paris, on remarque qu’ils se recoupent à travers l’idée de modernité. Le premier traite ce concept sur le ton de l’humour, par la caricature de Daumier, Traviès, ou Nadar, présenté comme ami proche de Baudelaire. Le second dédié au spleen est de fait plus sombre. Grands et petits formats se côtoient, plutôt liés par l’idée de spleen que du thème parisien. Au centre de la salle des lettres, des romans d’époque, Les Fleurs du Mal évidemment, ou encore des petites esquisses réalisées par le poète.

Photo : Honoré DAUMIER, Le Public du Salon 4. Amateurs classiques de plus en plus convaincus que l'art est perdu en France, 1852, estampes, 37,5x26 cm, Paris, Musée Carnavalet. © Musée Carnavalet
Photo : Honoré DAUMIER, Le Public du Salon 4. Amateurs classiques de plus en plus convaincus que l’art est perdu en France, 1852, estampes, 37,5×26 cm, Paris, Musée Carnavalet. © Musée Carnavalet

 

Mêlés aux tableaux, les textes de Baudelaire jalonnent ainsi toute l’exposition, sous forme de correspondances, de compte-rendus de Salon ou encore d’articles de presse. La présence de ces écrits est augmentée par les livrets de salle et les cartels qui comprennent souvent des citations. C’est cette omniprésence discrète des textes et leur dialogue avec les œuvres qui permet au visiteur de comprendre la pensée du critique.

Grâce à un parcours chrono-thématique ainsi qu’à la dialectique texte-image, L’Œil de Baudelaire retrace l’évolution de la pensée critique du poète entre 1840 et 1867, du romantisme vers une nouvelle définition de la modernité.

L’Œil de Baudelaire, jusqu’au 29 janvier 2017 au Musée de la Vie Romantique,
16 rue Chaptal 75009 Paris. Plus d’informations ici : http://www.vie-romantique.paris.fr/




Avignon IN 2016 – Collection Lambert : « Yitzhak Rabin : chronique d’un assassinat » : l’œuvre fait preuve

Photo : Christophe Raynaud de Lage
Photo : Christophe Raynaud de Lage

Le 4 novembre 1995 à Tel-Aviv, après avoir prononcé un discours à l’occasion d’une manifestation pour la paix, Yitzhak Rabin, alors premier ministre d’Israël, est assassiné à bout portant de deux balles dans le dos par un étudiant juif israélien opposé aux accords d’Oslo conclus en 1993 à Washington. Depuis 2015, l’architecte et cinéaste israélien Amos Gitaï travaille sur cet événement qui a enterré le dialogue entre Israël et Palestine et a durablement marqué l’histoire du Moyen-Orient.

C’est d’abord par la réalisation d’un film-enquête intitulé Le Dernier jour d’Yitzhak Rabin présenté à la Mostra de Venise et au Festival international du film de Toronto l’an passé que le travail de Gitaï a pris forme. À Avignon depuis le 3 juillet, le regard porté sur la mort du prix Nobel de la paix de 1994 trouve sa continuité et évolue sous la forme d’une exposition à la Fondation Lambert qui se tient jusqu’au 6 novembre, et qui porte le même titre qu’un spectacle présenté à la Cour d’Honneur du Palais des Papes le 10 juillet : « Yitzhak Rabin : chronique d’un assassinat ». Sous forme de triptyque et par un recours à tous les arts mêlant le documentaire à la fiction, Amos Gitaï construit une œuvre critique profondément engagée, universelle et optimiste, en grande partie élaborée à partir des souvenirs de Leah Rabin, la veuve de Yitzhak.

Fils de Munio Gitaï Weinraub, Amos Gitaï reconnaît avoir été influencé par les « perceptions artistiques » de son père qui était architecte mais surtout juif, il s’était fait expulser d’Allemagne par les Nazis en mai 1933 alors qu’il étudiait au Bauhaus à Dessau, son fils en a fait un film sous forme de diptyque plus largement consacré aux deux parents entre 2009 et 2012. S’il a fait des études d’architecture et suivi les traces de son père, c’est après s’être engagé dans la guerre du Kippour en 1973, où il est blessé par un missile syrien, qu’il se lance dans la réalisation de documentaires. Rapidement, ses travaux sont marqués par des recherches théoriques et expérimentations formelles avec la caméra auxquelles il renonce dans ses œuvres consacrées à Yitzhak Rabin. Fasciné par la reconstitution d’une mémoire à partir de fragments d’histoire, Amos Gitaï entend refléter à travers des prismes artistiques aussi différents mais peu éloignés que le film documentaire, le théâtre et les arts plastiques l’impact de l’assassinat politique de l’homme d’État. Pour l’artiste, le parti pris est constant aux trois propositions, il faut installer une relation entre tous les documents qui ont servi aux recherches, à savoir la vidéo, des éléments sonores, des toiles, des sculptures de céramique, des témoignages, des correspondances… Amos Gitaï n’envisage pas une œuvre d’art sans son contexte, il écrit d’ailleurs ceci « Je comprends qu’il n’est pas possible de faire un travail artistique sans contexte. Sans contexte à la fois artistique et politique ». Alors que le film, long de près de trois heures, est un montage d’images d’archives, de manifestations, d’interviews et de scènes reconstituées par des acteurs, l’hommage continue dans une forme similaire sur les planches.

« Yitzhak Rabin : chronique d’un assassinat » a effectivement été le fait d’une seule et unique représentation le 10 juillet au soir, à l’occasion du Festival d’Avignon qui cette année plus que jamais revendique un choix de spectacles très politiques en prise avec l’actualité comme avec Les Damnés, Ceux qui errent ne se trompent pas en proposant tout particulièrement un focus Moyen-Orient avec des pièces comme Alors que j’attendais du metteur en scène syrien Omar Abusaada. Sur l’immense scène de la Cour d’Honneur et sur un mode récitatif, Amos Gitaï a mis en scène le récit de l’assassinat à partir d’une fable très factuelle saisissante de sobriété et de retenue portée par l’actrice israélienne Hiam Abbass et la française Sarah Adler, qui avait déjà collaborée avec le réalisateur en 2014 pour Tsili. Assises autour d’une table imposante qui renvoie l’image d’un bureau ministériel, les actrices semblent lire un manuscrit qu’elles ne lâchent pas, même lorsqu’elles se lèvent et ne bougent plus lors de la scène finale. Porté par une voix si grave et l’accent arabe de Hiam Abbass, le texte prend vie, résonne et se heurte à des images d’archives du fameux jour de l’assassinat de Yitzhak Rabbin ainsi que de manifestations pour et contre la réconciliation d’Israël et de la Palestine projetées sur tout le mur du Palais des Papes surmontant la scène. Noyé dans ces images silencieuses, le public est simultanément interpelé par deux musiciennes jouant du violoncelle et du piano ainsi que par un chœur foulant sans cesse une platebande de graviers pour un effet sonore tout à la fois captivant et écrasant. Poignant mais toujours esthétique et poétique, le spectacle qu’Amos Gitaï est venu présenter en personne avant la représentation n’est jamais seulement documentaire, si bien que l’hommage trouve naturellement son écho dans l’exposition présentée à la Fondation Lambert en Avignon.

Photo : Christophe Raynaud de Lage
Photo : Christophe Raynaud de Lage

Arrivé au pouvoir en tant que premier ministre et chef du parti travailliste en 1992, Yitzhak Rabin avait encouragé, conjointement avec Bill Clinton, une autonomie palestinienne à peine un an plus tard. Mais dans la foulée, bien que les accords signés par Rabin aient été historiques, les partis d’extrême droite ont déstabilisé le pouvoir et perpétré de nombreux attentats à l’encontre de Rabin. Deux mois avant d’être assassiné et remplacé par Benyamin Netanyahou qui veut maintenir Israël au contrôle permanent de la Cisjordanie, Yitzhak Rabin prévoyait un découpage de territoires palestiniens remettant en question les zones de contrôles d’Israël. Le projet n’aboutira pas, de nombreuses théories du complot ont d’ailleurs été avancées concernant le jour de l’assassinat, et le rapport qui avait réuni plus de 4000 témoignages réalisé à l’issue de l’événement n’a jamais été entièrement publié. Si la pièce de théâtre était centrée sur l’homme d’État et de paix, l’exposition mêle davantage la fiction en s’annonçant dès l’entrée comme un « geste artistique inspiré d’un événement traumatisant ». À travers trois grandes salles sombres aux fenêtres condamnées, la scénographie est répétée à l’identique sur un mode ternaire. Le plus frappant vient du fait que le public est plongé dans une ambiance sonore qui ne laisse aucune chance au silence là où l’espace lui, célèbre le vide et l’obscurité ; comme au théâtre, une tension subsiste entre documents papiers et vidéos, réels et fictionnels.

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Pour faire de la mémoire un agent du changement, Amos Gitaï a couvert les murs de photographies de grands formats donnant à voir des mouvements de foules floutés en noir et blanc, toutes portent le titre de « chronique fragmentée », toutes sont une pièce d’un puzzle politique morbide. Chaque salle participe à la reconstitution de l’assassinat et fait penser à une place vide prête à accueillir une manifestation, tout en faisant répondre à ces photographies sous vitres reflétant le visiteur comme invité à prendre part au mouvement visuel et sonore, un écran géant où des images sont projetées à grande échelle. Dans ce chevauchement sensoriel, les images prennent vie et les sons deviennent visuels, véritable acteur, le visiteur est confronté à ces œuvres qui font preuves. Le rôle et la force des images est d’autant plus mis en question qu’en dessous de ces mouvements anti-Rabin et Palestine sont présentées deux vitrines dans lesquelles des petites figurines de céramique sont elles-mêmes filmées et superposées aux images d’archives, ces petits bonhommes incarnent pour leur part une marche pour la paix qui ne bouge pas, ils sont des « Demonstrators at the peace rallye ». Face à ces modèles réduits anthropomorphiques blanchâtres comme englués là, restés coincés en 1995, on est appelé à envisager la paix comme toujours possible, toujours dormante. Aux mots et beaux discours se heurtent des révolutions silencieuses, le message d’Amos Gitaï est plein d’espoir : et si les gestes artistiques devenaient aussi forts que les balles ?

À retardement, l’art pourrait ressusciter la mémoire, entamer des mouvements et face à un pouvoir qui condamne ce qu’il considère comme dissident, Amos Gitaï propose de condamner le pouvoir, d’élaborer une stratégie sensorielle et artistique totale qui changerait la réalité. À travers cet espace d’exposition, un soulèvement semble urgent face à la reconstitution de cette histoire stagnante et la monstration des étapes de dégradation de l’événement. L’artiste a conscience qu’il ne s’agit pas du plus grand conflit du monde, là où les médias se sont tus, l’art se réveille et en restitue la force symbolique. Israël n’est pas seulement un territoire en conflit permanent, c’est aussi un lieu qui a vu naître trois religions monothéistes, le judaïsme, le christianisme et l’islam, occupé par une politique de mitraillettes. Que ce soit face au film, au spectacle ou dans cet espace d’exposition, le public est certes nourri d’images, pour autant, Amos Gitaï entend faire du visiteur un interprète légitime de tous ces matériaux. Plus qu’un simple consommateur du travail de l’artiste, entre correspondances de sa mère durant la seconde guerre mondiale et photographies découpées et accolées aux murs comme des meurtrières ouvertes sur la foule, c’est au public qu’il incombe de « faire l’histoire ».

Pour venir à bout de ce triptyque, Amos Gitaï a annoncé préparer un livre qui ferait office de synthèse, parce que les mots restent. À travers tous les médiums possibles, l’artiste et réalisateur ébranle l’Histoire, nous montre des frontières poreuses entre réalité et fiction, entre les objets et les images. À une époque de mise en crise des médias et de la banalisation des conflits, pour Amos Gitaï l’art peut encore servir la résurrection de l’oubli historique. Comme disait Christian Boltanski, l’artiste peut et doit poser des questions, à la différence de nombreux philosophes, politiciens ou historiens, il est celui qui ne pense pas avoir de réponses, qui ne pose plus de questions en mots, « mais avec des émotions visuelles ou sonores ».

Amos Gitaï, « Chronique d’un assassinat annoncé », jusqu’au 6 novembre 2016 à la Collection Lambert en Avignon musée d’art contemporain, plus d’informations ici : http://www.collectionlambert.fr/7/expositions/en-cours.html

L’exposition a fait écho à la présence d’Amos Gitaï au Festival d’Avignon dans la Cour d’honneur le 10 juillet 2016 pour son spectacle intitulé « Yitzhak Rabin : chronique d’un assassinat »




« L’atelier en plein air » : Conter la Normandie contre vents et marées

oil on canvas
CAILLEBOTTE Gustave, Régates en mer à Trouville – 1884 – 60,3 x 73 cm – Huile sur toile – Toledo, Ohio. Lent by the Toledo Museum of Art. Gift of The Wildenstein Foundation © Photograph Incorporated, Toledo.

Un vent de liberté souffle sur la Normandie et ses plages de galets, tantôt embrumées ou baignées de clarté. Des falaises d’Étretat aux ports de pêches de Dieppe ou Honfleur, le musée Jacquemart André revient sur l’avènement du plein air dans la peinture impressionniste et ses influences anglaises manifestes. Si les maîtres sont au rendez-vous, de belles découvertes enrichissent cette exposition de qualité ; tel est le cas de l’artiste Charles Pécrus dont la postérité est certes plus confidentielle, mais qui occupe une place de choix dans le développement de ces ateliers à ciel ouvert. Si le contexte historique sert de prélude, la démarche géographique qui lui succède, permet une approche plus sensible des grandes villes normandes. Un parcours plein de charme, porté par une muséographie réussie aux tonalités naturelles et apaisantes.

 En 1880, Claude Monet s’exclamait : « Mais je n’ai jamais eu d’atelier et je ne comprends pas qu’on s’enferme dans une chambre. Pour dessiner, oui. Pour peindre, non ». Ce plaidoyer en faveur d’une peinture sur le motif et en plein air, cristallise les enjeux d’une révolution picturale née en Angleterre, et qui influencera les peintres de l’avant-garde française dès 1820. Aux œuvres éthérées et lumineuses d’un Richard Parkes Bonington ou d’un William Turner, le mouvement impressionniste doit en effet beaucoup : les aquarelles Lillebonne ou La Seine près de Tancarville peintes par Turner et exposées ici, dévoilent l’intérêt majeur que l’école anglaise portait à la Normandie, et à son atmosphère si particulière. Symbole de cet engouement, la ferme Saint-Siméon – ouverte en 1825 dans la ville d’Honfleur, devient un haut lieu de rassemblement artistique : Eugène Boudin, Gustave Courbet, Frédéric Bazille ou James Abbott Whistler pour ne citer qu’eux, sont autant de peintres qui s’y côtoient, et dont les échanges mèneront à l’élaboration d’une esthétique nouvelle.

TURNER William, Lillebonne, vers 1823, aquarelle, gouache, encre brune et noire, 13,4 x 18,5 cm, Oxford, The Ashmolean Museum. © Ashmolean Museum, University of Oxford.
TURNER William, Lillebonne, vers 1823, aquarelle, gouache, encre brune et noire, 13,4 x 18,5 cm, Oxford, The Ashmolean Museum. © Ashmolean Museum, University of Oxford.

Par la force des choses, la Normandie et ses plages deviennent l’endroit de villégiature par excellence, l’incarnation même de la mondanité. Toute la haute bourgeoisie s’y presse pour profiter de l’air marin et flâner Sur les planches de Trouville, telles que les peignait Monet en 1870. Dès lors, les pêcheurs de crevettes et les marins reprisant leurs filets, n’ont plus le monopole de ces paysages aux accents d’iode et d’embruns ; les kiosques à musique et les casinos fleurissent peu à peu dans le panorama normand. Les estivants aisés aiment aussi miser leur fortune tout en se divertissant ; dans La course de gentlemen, Edgar Degas saisit cet instant qui précède la chevauchée dans l’hippodrome, alors que les paris sont ouverts. De cette évolution sociale, les peintres savent tirer parti : galvanisée par ses nouveaux loisirs balnéaires, la riche population parisienne qui boudait les scènes de plage – dont le genre fut initié par Boudin dès 1862, devient la principale clientèle de ces productions.

PISSARRO Camille, Avant-port de Dieppe, après-midi, soleil - 1902 - Huile sur toile - 53,5 x 65 cm - Dieppe, Château-Musée. © Ville de Dieppe - B. Legros.
PISSARRO Camille, Avant-port de Dieppe, après-midi, soleil – 1902 – Huile sur toile – 53,5 x 65 cm – Dieppe, Château-Musée. © Ville de Dieppe – B. Legros.

De ports en falaises, le parcours prend des allures de flânerie ; on déambule au cœur de Dieppe – qui fut la première des stations balnéaires, du Havre ou de Cherbourg, où l’effervescence portuaire achève de supplanter la vision romantique d’une mer tempétueuse à l’écume brûlante. Les peintres tels Camille Pissarro dans L’avant-port de Dieppe, esquissent des foules de silhouettes qui foisonnent sur les digues et qui se mêlent aux navires arrimés. La même agitation transparaît dans les toiles de Charles Pécrus que l’exposition n’hésite pas à mettre en avant ; cette diversité du regard, qui ne s’attache pas seulement aux grandes figures de l’impressionnisme, est d’ailleurs l’une des grandes forces de « L’atelier en plein air ». Boudin quant à lui, préfèrera vouer sa palette à la lumière, aux variations célestes des côtes de la Manche ; et Berthe Morisot se consacrera à l’étude de la perspective dans des compositions aux vues plongeantes.

MONET Claude, Falaises à Varengeville dit aussi Petit-Ailly, Varengeville, plein soleil - 1897 - Huile sur toile, 64 x 91,5 cm, Le Havre, Musée d’art moderne André Malraux © MuMa Le Havre / Charles Maslard 2016.
MONET Claude, Falaises à Varengeville dit aussi Petit-Ailly, Varengeville, plein soleil – 1897 – Huile sur toile, 64 x 91,5 cm, Le Havre, Musée d’art moderne André Malraux © MuMa Le Havre / Charles Maslard 2016.

Dans son écrin de craie blanche, usée par les éléments, la côte d’Albâtre offre aussi une multitude de motifs pour ces peintres épris de nature. Face à ces abruptes falaises, ils resteront fascinés par les changements de luminosité, les nuances du ciel ou de l’eau qui évoluent au rythme des marées. Cette recherche de l’éphémère se retrouve dans la toile Falaises à Varengeville de Monet, où les couleurs s’entrelacent et les contours se font évanescents.

A travers ce parcours riche de plus de quarante œuvres, la Normandie dévoile ici tout son éclat, et l’on comprend pourquoi les artistes aimaient tant y installer leur chevalet. Alliant diversité naturelle des paysages, patrimoine architectural précieux et douceur de la vie au grand air, les villes balnéaires normandes restent aujourd’hui encore, une destination très prisée. Et si l’exposition prend des allures de promenade séduisante, elle n’en exclut pas pour autant, la qualité du discours et la richesse intellectuelle : une part de rêve et de lumière dans la grisaille parisienne.

Thaïs Bihour

« L’atelier en plein air » – L’exposition se tient jusqu’au 25 juillet 2016 au Musée Jacquemart André. Plus d’informations sur http://www.musee-jacquemart-andre.com/




François Kollar : une esthétique distante, et pourtant si sensible

François Kollar, Tour Eiffel, vers 1930, tirage gélatino-argentique d‘époque, MNAM/CCI, Centre Pompidou, Paris, inv. AM 2012-3429. Achat grâce au mécénat d’Yves Rocher, 2011. Ancienne collection Christian Bouqueret.
François Kollar, Tour Eiffel, vers 1930, tirage gélatino-argentique d‘époque, MNAM/CCI, Centre Pompidou, Paris, inv. AM 2012-3429. Achat grâce au mécénat d’Yves Rocher, 2011. Ancienne collection Christian Bouqueret.

« Un ouvrier du regard », tel est le titre de cette première rétrospective dédiée au photographe d’origine hongroise, François Kollar. Un intitulé pertinent et ingénieux, laissant transparaître la duplicité du langage esthétique propre à cet artiste : un ouvrier, il l’est en effet dans tous les sens du terme. Tourneur sur métaux au sein d’une usine Renault, c’est de son expérience manuelle qu’il tire sa force plastique : cette réalité du travail, ce face à face avec la machine, l’artisan devenu photographe la connaît bien. Reconnu comme l’un des plus grands reporters industriels français du XXème siècle, Kollar se dévoile ici à travers 130 clichés, dont la confrontation stylistique étonne : la manufacture côtoie en effet sur les cimaises, les plus célèbres noms de la Haute Couture – dont il était un photographe très apprécié.

A l’image de l’artiste qu’elle met en lumière, la muséographie traduit une élégante sobriété : cette douceur qui émane des murs aux tonalités grises, permet aux œuvres d’exister pour elles-mêmes, sans artifice et sans emphase. Clair et cohérent, ce parcours à la fois chronologique et thématique, dessine le cheminement créatif de Kollar jusqu’à son ascension.

Tout commence en 1930, alors qu’il établit son premier studio à Paris l’année de son mariage. Ses expérimentations photographiques, emplies de complicité avec sa femme Fernande – qui se prête au jeu du modèle, ouvrent l’exposition : essais pour des campagnes publicitaires et autoportraits se succèdent, dont les effets de transparence, jeux de lumières et compositions travaillées, expriment un perfectionnement assidu de sa technique. Ses premiers clichés trahissent son désir d’inviter la vie-même et l’expressivité au cœur de son œuvre : étudiant attentivement les émotions de ses sujets, il confère à ses portraits et ses photographies de mode, une sensibilité unique, une humanité sincère.

François Kollar, La trieuse reste coquette. Société des mines de Lens (Pas-deCalais), 1931-1934, épreuve gélatino-argentique d'époque, 18 x 24 cm, coll. Paris, Bibliothèque Forney, © François Kollar / Bibliothèque Forney / Roger-Viollet.
François Kollar, La trieuse reste coquette. Société des mines de Lens (Pas-deCalais), 1931-1934, épreuve gélatino-argentique d’époque, 18 x 24 cm, coll. Paris, Bibliothèque Forney, © François Kollar / Bibliothèque Forney / Roger-Viollet.

Dès l’année suivante, en 1931, les éditions des Horizons de France lui commandent une grande enquête sur le monde du travail. Fort de son expérience passée, il produira plus de 2000 photographies témoignant de l’activité rurale et industrielle du pays. Cette série intitulée « La France Travaille », porte le poids et la fébrilité d’une production en pleine métamorphose, tant sur le plan économique que social. Tels des instants privilégiés d’un âge révolu, ces clichés constituent le souvenir d’un univers où les hommes et les femmes, s’effaceront bientôt devant la puissance mécanique. Certes, l’approche de Kollar paraît empathique par le caractère humain qu’elle met en avant ; mais cette sensibilité première est tempérée par une distance certaine, une neutralité silencieuse quant aux mouvements sociaux qui agitent son époque. Nulle dénonciation ne passera le seuil de son objectif.

S’imposant comme une figure incontournable, Kollar est rapidement sollicité par l’univers du luxe et de la mode pour de prestigieuses collaborations : alors que des journaux tels le Figaro illustré ou Harper’s Bazaar feront appel à son talent, Coco Chanel elle-même, posera pour le photographe. Mais la Seconde Guerre mondiale amorce une rupture tant artistique qu’idéologique : refusant de collaborer avec le régime de Vichy, Kollar se retire en Poitou-Charentes.

François Kollar, Alsthom : assemblage des volants alternateurs de Kembs. Société Alsthom. Belfort (Territoire de Belfort), 1931-1934, plaque de verre, 18 x 13 cm, coll. Paris, Bibliothèque Forney © François Kollar / Bibliothèque Forney / Roger-Viollet
François Kollar, Alsthom : assemblage des volants alternateurs de Kembs. Société Alsthom. Belfort (Territoire de Belfort), 1931-1934, plaque de verre, 18 x 13 cm, coll. Paris, Bibliothèque Forney © François Kollar / Bibliothèque Forney / Roger-Viollet

Puis viennent les années 1950, où la France tend à développer des infrastructures en Afrique-Occidentale Française. L’Etat lui commande alors une série de photographies documentaires à la visée bien précise : celle de véhiculer une image conventionnelle et positive des relations avec les colonies du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Mali et du Sénégal. Mais sous cette apparente fabrique de la représentation, et derrière le conformisme officiel, ces clichés donnent à voir deux temporalités qui s’affrontent : sur la pellicule, cette modernité que la France prône tant, n’apparaît pas si franche et si totale. Alors, une question se dessine : et si le regard de Kollar n’était pas si distancié qu’on ne le pense ?

Généreux tout autant que réservé, son travail se révèle plus complexe qu’il n’y paraît. Fruits de demandes officielles, ses photographies doivent se conformer aux attentes de leurs commanditaires, d’où la créativité et la sensibilité semblent exclues. Pourtant, il possède un véritable talent, une intention artistique qu’on ne peut lui dénier ; et de ses tirages, se dégage une étrange intensité. Sans cesse, cette ambigüité plane durant l’exposition, où l’on oscille dans un équilibre délicat d’empathie et de détachement. Au fond, toute la force de François Kollar réside peut-être en cela : conférer aux froides apparences, une chaleur aussi sincère qu’inattendue.

Thaïs Bihour

« François Kollar. Un ouvrier du regard » – L’exposition se tient jusqu’au 22 mai 2016 au Musée du Jeu de Paume. Plus d’informations sur http://www.jeudepaume.org/




Moreau – Rouault : de l’atelier à la communion des âmes

Georges Rouault, Le Modèle, souvenir d’atelier, huile, encre, gouache sur toile, H. 81,3 ; L. 65,1 cm, Collection particulière. © JL Losi © ADAGP Paris 2015
Georges Rouault, Le Modèle, souvenir d’atelier, huile, encre, gouache sur toile, H. 81,3 ; L. 65,1 cm, Collection particulière. © JL Losi © ADAGP Paris 2015

Initialement présentée au Japon en 2013, « Gustave Moreau – Georges Rouault, souvenirs d’atelier » est bien plus qu’une exposition comparative, vouée à la confrontation de deux grands artistes. Ici, le Musée Gustave Moreau invite à un dialogue esthétique, une communion des âmes. Certes, l’histoire qui nous est contée est celle d’un enseignement artistique empli d’émulation ; mais c’est surtout un héritage sensible entre les deux hommes qui se dessine en filigrane. Ainsi, ces « souvenirs d’atelier » reconstituent dans une émouvante sincérité, ce lien privilégié entre un maître et son élève : un sentiment quasi filial.

Devenu conservateur du musée en 1902, Rouault commentera peu les œuvres de son professeur ; il exprimera en revanche sa profonde admiration pour l’homme qu’il était, dévoilant une amitié véritable. C’est ce que traduisent leurs échanges épistolaires ici exposés : Rouault, au détour d’une lettre, avoue à son maître qu’il avait été pour son art, « […] le guide, le meilleur et le Père » ; et Moreau de lui répondre qu’il plaçait en son cher élève, « la plus extrême confiance dans [son] bel avenir ».

Georges Rouault, Le Christ mort pleuré par les saintes femmes, 1895-1897, fusain, pierre noire, rehauts de craie blanche sur papier vergé, marouflé sur toile, S. D. b. d. : G. Rouault 1897, H. 112 ; L. 143 cm, Paris, Fondation Georges Rouault. © JL Losi © ADAGP Paris 2015
Georges Rouault, Le Christ mort pleuré par les saintes femmes, 1895-1897, fusain, pierre noire, rehauts de craie blanche sur papier vergé, marouflé sur toile, S. D. b. d. : G. Rouault 1897, H. 112 ; L. 143 cm, Paris, Fondation Georges Rouault. © JL Losi © ADAGP Paris 2015

De cette osmose, l’exposition met en lumière quatre thématiques iconographiques – communes ou dissonantes : paysages, représentations de la femme, visions du sacré et matérialité de l’œuvre, prendront place au fil des salles.

Mais au commencement, se situe l’atelier d’artiste et sa cohorte d’élèves ; nous sommes en 1892, et Moreau succède à Elie de Delaunay comme professeur à l’Académie des Beaux-arts. Son enseignement artistique qui se veut libre de tout carcan, émancipateur et imaginatif, lui vaut d’être jugé trop subversif par ses collègues. Hors des sentiers battus et réfractaire aux dogmes académiques, il encourage ses élèves à se démarquer. Et dans les œuvres de Rouault, transparaît cette richesse : certes l’inspiration qu’il puise chez son maître est palpable, mais sa créativité transperce la toile. Cela, Moreau le perçoit rapidement. Il décèle chez son élève, un réel talent pour la couleur et la matière, ainsi qu’une grande maîtrise picturale du clair-obscur inspiré de Rembrandt – déjà visible dans Christ mort pleuré par les saintes femmes.

Gustave Moreau, Jupiter et Sémélé. Variante, huile sur toile, H. 149 ; L. 110 cm, Paris, musée Gustave Moreau, Cat. 73. © RMN-Grand Palais/Philippe Fuzeau
Gustave Moreau, Jupiter et Sémélé. Variante, huile sur toile, H. 149 ; L. 110 cm, Paris, musée Gustave Moreau, Cat. 73. © RMN-Grand Palais/Philippe Fuzeau

Dès lors, il le pousse à participer aux concours, à exposer au Salon des artistes français ou de la Rose+Croix. Grâce à la confiance qu’il place en lui, Rouault obtient sa première commande concernant deux peintures allégoriques, destinées à orner l’escalier d’honneur d’un hôtel particulier. Ces décors baptisés Stella Matutina et Stella Vespertina, sont mis en  parallèle avec une variante de la toile Jupiter et Sémélé de Moreau : ici, la fascination que Rouault éprouvait pour la palette chromatique de son maître est saisissante.

Cette influence mutuelle, entre onirisme, mythologie et réalité, est tout aussi manifeste dans les paysages qu’ils peignent. Mais osera-t-on parler de « peinture de paysage », pour un artiste comme Moreau ? Lui qui ne considérait ces décors naturels que comme des cadres, des toiles de fond destinées à abriter des sujets bibliques ou mythologiques. A l’inverse de ses contemporains,  il ne s’essaye guère à la peinture en plein air ou sur le motif : la nature qu’il esquisse n’est qu’imaginaire, et fruit d’habiles reconstitutions. Sous nos yeux, l’huile sur toile Thomyris et Cyrus – dont le sujet est emprunté à Hérodote, illustre ce cruel désenchantement du paysage entre rêve et matérialité : dans un panorama fugitif et inquiétant, comme rongé par une beauté chimérique, se déroule une scène aussi sanglante qu’inéluctable. En regard, Le Bon Samaritain de Rouault, dévoile une obscurité redoutable, funeste linceul d’un homme battu et laissé pour mort par des voleurs. Et chez le maître comme chez l’élève, l’évanescence de la scène confère à la poétique de l’œuvre, l’empreinte de l’illusion.

Gustave Moreau, Thomyris et Cyrus dit aussi La Reine Thomyris,hHuile sur toile, S.b.d - Gustave Moreau - H. 57,5 ; L. 87 cm, Paris, musée Gustave Moreau, Inv. 13978. © RMN-Grand Palais/Gérard Blot
Gustave Moreau, Thomyris et Cyrus dit aussi La Reine Thomyris,huile sur toile, S.b.d – Gustave Moreau – H. 57,5 ; L. 87 cm, Paris, musée Gustave Moreau, Inv. 13978. © RMN-Grand Palais/Gérard Blot

 Pour autant, l’œuvre de Rouault n’est pas exempte de tout réalisme, notamment lorsqu’il peint des figures féminines. C’est probablement à travers cette section dédiée à la « Pécheresse, la courtisane, et la fille », que la rupture picturale avec son maître est la plus manifeste.

Georges Rouault, Fille dit aussi Nu aux jarretières rouges, 1906, aquarelle et pastel sur papier, M. D. h. d : GR 1906, H. 71 ; L. 55 cm, Paris, Musée d’art moderne de la Ville de Paris, AMD 143, Legs Girardin 1953. © Musée d’Art Moderne/Roger Viollet © ADAGP Paris 2015
Georges Rouault, Fille dit aussi Nu aux jarretières rouges, 1906, aquarelle et pastel sur papier, M. D. h. d : GR 1906, H. 71 ; L. 55 cm, Paris, Musée d’art moderne de la Ville de Paris, AMD 143, Legs Girardin 1953. © Musée d’Art Moderne/Roger Viollet © ADAGP Paris 2015

Si les femmes ébauchées par Moreau, se confondent dans l’inébranlable archétype d’une silhouette lisse et idéalisée, les modèles de son élève en appellent à la vie-même et à la rue. Sous ses pinceaux, les « filles de joie » aux corps lourds retrouvent cette part d’humanité que des artistes comme Toulouse-Lautrec ou Degas, leur ont sarcastiquement déniée : chez Rouault, l’empathie  se lit dans leurs traits disgracieux ; et dans sa palette de couleurs, se déploie une beauté dissonante qui érafle les canons esthétiques si bien-pensants. Chrétien, il ne condamne pas la pécheresse, mais les hommes qui l’ont réduite à cette condition, ainsi que le péché lui-même : « Au fond des yeux de la créature la plus hostile, ingrate ou impure Jésus demeure », dira-t-il.

Courbatue et souffrante, mais capable d’un indicible éclat, voilà l’Humanité telle que Rouault la perçoit. De son iconographie religieuse, affleure une infinie compassion, teintée cependant d’une honnêteté sans fard : quand les âmes sont mises à nu, la beauté physique n’est plus qu’un masque dissimulant la laideur morale ; les figures qu’il peint deviennent alors grotesques, véritables caricatures de l’hypocrisie de ses contemporains. En miroir, l’art sacré de Moreau s’apparente davantage à une spiritualité cérébrale, une manière de combler ses angoisses métaphysiques.

Gustave Moreau, Sainte Cécile, huile sur toile, H. 86 ; L. 68 cm, Paris, musée Gustave Moreau, Inv. 13972. © RMN-Grand Palais/Philippe Fuzeau
Gustave Moreau, Sainte Cécile, huile sur toile, H. 86 ; L. 68 cm, Paris, musée Gustave Moreau, Inv. 13972. © RMN-Grand Palais/Philippe Fuzeau

En effet, si son vocabulaire pictural emprunte au christianisme, il puise aussi dans le registre déiste ou syncrétique, tout en s’inspirant des écrits de Blaise Pascal et des philosophes jansénistes de Port-Royal. Une angoisse théologique qui transparaît d’ailleurs, dans sa toile Sainte Cécile : plongée dans l’obscurité, cette dernière semble faire face à une vision spectrale bien plus qu’au traditionnel ange. L’exposition esquisse d’ailleurs un parallèle pertinent avec l’aquarelle L’Apparition, où la tête coupée de Jean-Baptiste apparaît en halo devant Salomé ; une subtile évocation de ces séductrices bibliques qui avaient bien souvent les faveurs de l’artiste.

De Moreau et Rouault, de cette amitié, de leur passion de la matière et de la couleur, « Souvenirs d’atelier » dresse un portrait touchant et habilement maîtrisé : jamais le talent de l’un n’obscurcit le génie de l’autre. Et comme si le maître veillait encore sur son précieux élève, on trouvera ici un peu plus d’œuvres de Rouault ; mais que l’on se retourne, et l’atelier de Moreau prend vie sous nos yeux.

De ce parcours, émerge enfin une envie singulière : celle d’en savoir plus sur ces deux artistes qui leur vie durant, partagèrent à travers l’amour de l’art, un respect des plus sincères.

Thaïs Bihour

« Gustave Moreau – Georges Rouault, souvenirs d’atelier » – L’exposition se tient jusqu’au 25 avril 2016 au Musée Gustave Moreau. Plus d’informations sur http://musee-moreau.fr/




Musée d’Art Moderne : nouveaux accrochages dans les collections permanentes

Le 12 février dernier, le Musée d’Art Moderne de la ville de Paris présentait ses nouveaux accrochages au sein des collections permanentes. Soucieux de présenter toute la richesse et la vitalité de la création artistique contemporaine, ce dernier dévoile un parcours où l’éclectisme est au rendez-vous : entre acquisitions du Comité pour la photographie, art vidéo, et œuvres picturales, le cheminement esthétique s’annonce riche, de la réalité la plus crue à l’onirisme fabuleux.

Charlotte von Poehl The Notepiece, 2004. © ADAGP, Paris 2016
Charlotte von Poehl, The Notepiece, 2004. © ADAGP, Paris 2016

Charlotte von Poehl ouvre la voie : ses œuvres, axées sur le jeu sériel de la répétition, offrent une vision privilégiée de son travail où citations et réflexions forment un journal de bord illustré. L’attention dédiée à la temporalité est ici primordiale, presque vitale ; elle est la trace sensible ébauchée sur le papier, de la pratique artistique quotidienne. Harmonieuse, sa démarche se fonde sur une cohérence créatrice, où aucune pièce ne peut être isolée : la série The Notepiece, à travers cent dix dessins formant un même projet, témoigne de ce mécanisme singulier en constante évolution. De même, ses Arrow Drawings où de multiples flèches identiques s’entremêlent, semblent  esquisser la caractéristique d’un monde, où règnent le semblable et le conforme.

Puis, fidèle au travail de l’artiste Tacita Dean – déjà exposée dans les collections, le Musée d’Art Moderne présente JG, une vidéographie acquise en 2014. Sous nos yeux, les douces ondulations aquatiques de lacs gelés apparaissent, presque figées sur la pellicule argentique. Filmées par prises de vue en temps réel et entrecoupées de plans fixes, les séquences défilent lentement. Tacita Dean se joue de la perception et prolonge l’instantanéité dans le temps, troublant le rapport du spectateur à l’image. Cette valeur accordée à la temporalité est redoublée par la référence à la composition de Robert Smithson, Spiral Jetty : œuvre de Land art, elle fait elle-même écho à l’ouvrage de science-fiction La Voix du Temps, écrit par J.G Ballard en 1960. Tout ici n’est qu’enchevêtrements où passé, présent et futur s’unissent dans une spirale temporelle, tant symbolique que matérielle.

Tacita Dean, JG, 2013, Film 35 mm, couleur et noir et blanc avec son optique 26 minutes et 30 secondes.
Tacita Dean, JG, 2013, Film 35 mm, couleur et noir et blanc avec son optique 26 minutes et 30 secondes.

A l’art vidéo de Tacita Dean succèdent les sculptures et toiles peintes d’Alain Séchas, dont l’accrochage met en dialogue deux œuvres de l’artiste déjà présentes dans les collections du Musée, avec ses créations récentes.

Alain Séchas, Côte-d'Or, 2015, Huile sur toile 130 x 97 cm. © ADAGP, Paris 2016
Alain Séchas, Côte-d’Or, 2015, Huile sur toile, 130 x 97 cm. © ADAGP, Paris 2016

La figure sculptée Le Chat écrivain et la composition abstraite Untitled 49 forment ainsi la trame créatrice de l’artiste, la clef pour appréhender son travail. Ses nouvelles peintures mettent encore en scène ce personnage mi-homme mi-chat auquel il est attaché : s’il en reprend la figure, elle se fait plus evanescente, comme absorbée par le décor. Avec retenue, Alain Séchas donne à ses chats une posture d’intermédiaire entre le spectateur, l’environnement et les œuvres. Une réflexion picturale, humoristique parfois, bienveillante souvent.

Hugh Weiss, Charon me tend la main, 2007, 100 x 100 cm, Collection Musée d’Art moderne de la Ville de Paris. © Hugh Weiss
Hugh Weiss, Charon me tend la main, 2007,
100 x 100 cm, Collection Musée d’Art moderne de la Ville de Paris. © Hugh Weiss

Six toiles du peintre américain Hugh Weiss données au Musée d’Art Moderne par sa femme, Sabine Weiss, s’exposent aussi. Présentées aux côtés de photographies, carnets de l’artiste et dessins de Niki de Saint Phalle – avec qui il entretenait une amitié, elles retracent les dernières années d’un artiste heurté par la maladie, mais dont la force et la créativité ne se démentiront pas. Certes inspiré par le mouvement Cobra ou l’abstraction lyrique entre autres, Hugh Weiss fera toujours preuve d’une grande autonomie, s’émancipant des carcans stylistiques pour forger sa liberté. Parfois associé à la figuration narrative – notamment pour sa participation à l’exposition « Mythologies quotidiennes II » en 1977, il élabore cependant un langage pictural qui lui est propre, où références mythiques, récit personnel et humour se mêlent et se répondent. Ses dernières compositions réinterprètent ces thématiques récurrentes où des monstres étranges et chamarrés se pressent à la surface de la toile : des couleurs vives, de l’onirisme et une ultime légèreté, devant l’imminence de la mort.

J.D. ‘Okhai Ojeikere, Abebe (1975) Courtesy Galerie MAGNIN-A, Paris. © J.D. ‘Okhai Ojeikere
J.D. ‘Okhai Ojeikere, Abebe, 1975, 
Courtesy Galerie MAGNIN-A, Paris. © J.D. ‘Okhai Ojeikere

Enfin, les derniers accrochages sont consacrés aux acquisitions du Comité pour la photographie 2015, et complètent les fonds du Musée : une œuvre de Malick Sidibé présentant le personnage de Ballo, styliste pour les soirées culturelles de Bamako dans les années 1960 ; et deux ensembles de J.D.’ Okhai Ojeikere et Kaveh Golestan. Le premier artiste – J.D.’ Okhai Ojeikere, dévoile à travers ses clichés en noir et blanc, un tableau de la culture nigériane. Contrairement à ses contemporains photographes travaillant en studios, cet artiste – mort en 2014, souhaitait se confronter à la richesse du Nigéria et à sa population ; un travail esthétique qui sublime le quotidien et les modèles qu’il met en avant. Ici, cinq photographies issues de la célèbre série Hair Style sont présentées : collectées dans les années 1960, ces coiffures vues de dos ou de profil offrent un panel de parures féminines qui par leur complexité, s’apparentent parfois à des sculptures. Enfin, dix clichés du photo-reporter iranien Kaveh Golestan sont exposés. Héritage précieux par leur caractère unique, ils sont issus de la série pratiquement détruite lors de la Révolution iranienne de 1979, nommée Les prostituées du quartier rouge de Shahr-e No à Téhéran. Des photographies fortes et émouvantes sur la vie de ces femmes vendant leur corps ; des fragments de vie capturés sur la pellicule, avec élégance et sans aucun jugement.

De ces récentes acquisitions où les médiums se confondent, affleure un parcours où la variété des œuvres incite à la réflexion autant qu’à la contemplation. Un témoignage sur une histoire esthétique et culturelle qui ne cesse de se réinventer.

Thaïs Bihour

Nouveaux accrochages se présentant sous la forme de plusieurs expositions indépendantes, au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris. Plus d’informations sur http://www.mam.paris.fr/




Jean-Baptiste Huet, ou l’exaltation perpétuelle de la nature

Au cœur d’un espace intimiste, le musée Cognacq-Jay offre à l’artiste Jean-Baptiste Huet, sa première grande exposition monographique. A travers plus de 72 œuvres, ce parcours esquisse toute la richesse iconographique de cette figure du XVIIIème siècle, aujourd’hui méconnue. Pourtant, de ses compositions animalières et végétales, ou de ses décors pour toiles de Jouy, émane une indéniable délicatesse, une élégance emplie de légèreté.  

Huet Jean-Baptiste, Un dogue se jetant sur des oies, vers 1768-1769, huile sur toile, Paris, musée du Louvre, département des Peintures © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Stéphane Maréchalle
Un dogue se jetant sur des oies, vers 1768-1769, huile sur toile, Paris, musée du Louvre, département des Peintures © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Stéphane Maréchalle.

Dès l’entrée, la toile Un dogue se jetant sur des oies attire le regard : affolés mais courageux, les volatiles se dressent pour protéger leurs petits de l’animal revêche. Présentée au Salon de 1769, l’œuvre puise son inspiration dans les thèmes animaliers traditionnels du Siècle d’or hollandais, tout en renouvelant le motif : imposante, cette œuvre surprend par sa vraisemblance où chaque détail est magnifié, révélant ainsi l’habileté et les qualités d’observateur de Jean-Baptiste Huet face à la nature. Peintre du roi, il se confronte directement à la faune de la ménagerie royale, sans délaisser les régions plus rurales de l’Île-de-France. Ce sont en effet les animaux de la ferme et de la campagne qui remportent ses faveurs : chiens, moutons, coqs et poules composent l’essentiel de ses productions. Un vocabulaire a priori restreint que l’artiste parvient sans cesse à exalter, dans une ode éternelle au monde sensible.

Bergère assise près d’un arbre avec son troupeau de moutons et un chien, vers 1770, pierre noire et rehauts de blanc sur papier beige, Vienne, Albertina © Albertina Museum, Vienne
Bergère assise près d’un arbre avec son troupeau de moutons et un chien, vers 1770, pierre noire et rehauts de blanc sur papier beige, Vienne, Albertina © Albertina Museum, Vienne.

Plus loin, quelques études botaniques émergent ; issues d’un recueil découvert en 1986, elles forment la part encore méconnue de son abondante production. Courges, orties ou mauvaises herbes, aussi prosaïques que soient ces motifs, Huet leur concède une majesté saisissante, ainsi qu’une rare finesse dans le trait.

Fidèle à son amour de la nature, il cède à l’iconographie de la flânerie bucolique et des doux plaisirs amoureux, très en vogue au XVIIIème siècle. Inspirées de la peinture italienne et flamande de la Renaissance, mais aussi des œuvres de François Boucher, les scènes poétisant la vie de campagne se multiplient. Les artistes occultent alors l’amère réalité de la vie rurale pour prêter aux bergers qu’ils dépeignent, une allégresse et des amusements idéalisés. Cette Bergère assise près d’un arbre avec son troupeau de moutons et un chien, reflète cet idéal de simplicité que Huet et ses contemporains recherchaient dans la nature : une quiétude fondamentale, loin de la société qui altère la bonté naturelle de l’homme.

Un loup percé D'une lance, 1771, © David Rase.
Un loup percé D’une lance, 1771, © David Rase.

Un homme qui parfois, se meut en redoutable prédateur pour le monde animal. Ainsi, comment dénier l’intensité que l’artiste place dans sa toile représentant Un loup percé d’une lance ? Rarement un artiste du XVIIIème siècle n’avait figuré la souffrance animale avec une telle force ; et comme toujours chez Huet, il faut prendre le temps d’observer les détails et l’expressivité qui se cachent dans le regard de ces bêtes. Ici, le loup blessé n’est pas un trophée glorifiant son chasseur : il symbolise au contraire le tragique de la scène. Et si la touche picturale peut constituer un frein à l’émotion, la puissance de la composition se charge de toucher l’âme.

Bergère avec chèvre, mouton et lapin, Paris, Mobilier national © Benjamin Couilleaux.
Bergère avec chèvre, mouton et lapin, Paris, Mobilier national © Benjamin Couilleaux.

La salle finale est consacrée à la production décorative de Huet, amorcée dans les dernières décennies du XVIIIème siècle. Empruntant à un art rocaille sur le déclin, autant qu’au répertoire antique en plein essor, ses projets ornementaux témoignent de sa productivité et de l’attention qu’il porte aux goûts de son époque. Dans ce domaine, les commandes qu’il honore pour des acheteurs privés remplacent désormais celles du roi, et lui pourvoient un revenu constant. L’exposition présente d’ailleurs quelques exemples décoratifs de l’artiste, à l’instar de ce charmant carton pour dossier de fauteuil – intitulé Bergère avec moutons et lapin.

Fontaine et animaux (modèle de toile de Jouy), vers 1803-1806, plume et encre brune, lavis brun et gris, rehauts de gouache sur papier, Paris, musée des Arts décoratifs, département des Arts graphiques © Les Arts décoratifs, Paris / Jean Tholance.
Fontaine et animaux (modèle de toile de Jouy), vers 1803-1806, plume et encre brune, lavis brun et gris, rehauts de gouache sur papier, Paris, musée des Arts décoratifs, département des Arts graphiques © Les Arts décoratifs, Paris / Jean Tholance.

Mais si Huet intensifie son rythme de création, notamment en s’associant à la Manufacture de Jouy, ça n’est pas seulement pour l’argent : les tissus figuratifs lui permettent d’exprimer son imaginaire dans des compositions novatrices et d’une étonnante complexité. Très organisés et géométriques par leur référence à l’antique, ces décors de tapisseries révèlent en filigrane de subtils détails pittoresques, si chers à cet homme épris de nature.

Succincte, cette exposition atteint néanmoins sa finalité avec grâce : redonner ses lettres de noblesse à un illustre inconnu que l’Histoire de l’art avait dérobé aux regards, et dont le musée Cognacq-Jay, ressuscite les charmes avec raison.

Thaïs Bihour

« Jean-Baptiste Huet. Le plaisir de la nature (1745 – 1811) » – L’exposition se tient jusqu’au 5 juin 2016 au Musée Cognacq-Jay. Plus d’informations sur http://museecognacqjay.paris.fr/




« Visages de l’effroi » : entrevoir la beauté où le sang a coulé

Emile Signol (1804-1892), La Folie de la fiancée de Lammermoor, 1850, huile sur toile, Musée des Beaux-Arts, Tours © D. Couineau/ musée des Beaux-Arts de Tours
Emile Signol (1804-1892), La Folie de la fiancée de Lammermoor, 1850, huile sur toile, Musée des Beaux-Arts, Tours © D. Couineau/ musée des Beaux-Arts de Tours

Se replaçant au sein d’une généalogie événements culturels à succès, tels « Géricault, la Folie d’un monde », « L’Europe des esprits », « L’Ange du Bizarre » ou encore « De l’Allemagne », cette exposition d’apparence séduisante et prometteuse, entend dévoiler un pan artistique du XIXème siècle, bien souvent éclipsé par la révolution impressionniste. Née de la collaboration entre le Musée de la Vie Romantique et le Musée de la Roche-sur-Yon, « Visages de l’effroi » explore les tréfonds et méandres du romantisme fantastique français, entre passions révolutionnaires, onirisme désenchanté et crainte de l’au-delà. Pour autant, devant ces maudits aux visages hallucinés, et face à cette fureur de chair et de sang, on peine à déceler la véritable cohérence derrière la fascination qu’exercent assurément de tels motifs. Au sortir de tant d’abominations, saura-t-on mieux définir l’effroi ? Aura-t-on perçu l’inventivité des Romantiques français face à leurs contemporains anglais et allemand ? Rien n’est moins certain.   

Charles Brocas, Le supplice de Prométhée, 1830, huile sur toile, Paris, Collection particulière. Visuel : http://www.montmartre-secret.com/
Charles Brocas, Le supplice de Prométhée, 1830, huile sur toile, Paris, Collection particulière. Visuel : http://www.montmartre-secret.com/

Dans cet écrin sombre et épuré aux tonalités violines, l’œil du visiteur en quête d’épouvante se pose dès l’entrée sur une toile singulière : celle de Charles Brocas, Le supplice de Prométhée. Menaçante, funeste mais non moins intrigante, elle s’élève à elle seule comme symbole de la chute héroïque, vision romantique du géant déchu s’opposant aux illustres héros antiques, célébrés par les peintres néoclassiques. Suivant les théories énoncées en 1764 dans Histoire de l’art de l’Antiquité par Johann Joachim Winckelmann, toute composition doit mettre en exergue une esthétique propre à susciter la grandeur d’âme, la noblesse des émotions, et une quiétude certaine. Une norme pleine de convenance, dont la représentation picturale des épisodes moraux de l’histoire antique s’accommode parfaitement.

Lenepveu, Jules-Eugène (1819-1898), La Mort de Vitellius, 1847, huile sur toile, Paris, Ecole nationale supérieure des Beaux-arts © Beaux- arts de Paris. Dist. RMN Grand-Palais / image Beaux-arts de Paris
Lenepveu, Jules-Eugène (1819-1898), La Mort de Vitellius, 1847, huile sur toile, Paris, Ecole nationale supérieure des Beaux-arts © Beaux- arts de Paris. Dist. RMN Grand-Palais / image Beaux-arts de Paris

Pour autant, l’émancipation d’une telle bienséance devient pour certains artistes, gage d’une notoriété nouvelle. Dès lors, le Salon de 1827 marque cet affranchissement où le déchaînement de violence conteste avec force l’esthétique tempérée des Néoclassiques. Quelques années plus tard, comme une ultime défiance, Jules-Eugène Lenepveu remporte le Prix de Rome de 1847, grâce à La Mort de Vitellius. Quelle expressivité peut-on lire sur ces visages criminels, quelle animosité dans leurs regards, et cette souffrance effroyable dans les prunelles de Vitellius…les limites académiques sont à présent allègrement franchies.

Mais la chute des héros prend avant tout racine dans les affres de la Révolution française. De la Terreur, dominée par l’arbitraire des exécutions brutales et massives, à la création de la guillotine, en passant par un renouvellement de l’ordre politique, tout caractérise une période où les corps et les âmes ont immanquablement soufferts. De ces bouleversements, pamphlets et caricatures satyriques sont les messagers : ces visions d’horreur et cet imaginaire macabre s’exposent à travers le motif des têtes coupées, symbole victorieux par excellence de l’effondrement de la monarchie. L’aquatinte de Louis-Jules-Frédérique Villeneuve – Matière à réflexion pour les jongleurs couronnées (sic) – est éminemment représentative de cette condamnation du pouvoir.

tête coupée
Louis-Jules-Frédérique Villeneuve, (1796-1842), Matière à réflexion pour les têtes couronnées, sans date, aquatinte sur papier, Paris Musée Carnavalet © Musée Carnavalet/ Roger-Viollet

Émile Mascré (actif à Paris vers les années 1830-1840), "Capet, Lève-toi !," 1833-1834, huile sur toile. Musée de la Révolution française / Domaine de Vizille © Coll. Musée de la Révolution française / Domaine de Vizille
Émile Mascré (actif à Paris vers les années 1830-1840), « Capet, Lève-toi !, » 1833-1834, huile sur toile. Musée de la Révolution française / Domaine de Vizille © Coll. Musée de la Révolution française / Domaine de Vizille

Mais dans cette atmosphère glaçante, quelques représentations à rebours émergent, vaines défenses d’une hégémonie royale qui n’est plus. Émile Mascré dans sa très belle toile Capet, Lève-toi !, dépeint avec force les mauvais traitements infligés par des bourreaux au Dauphin – le jeune Louis XVII, lors de son incarcération à la Prison du Temple. La candeur de l’enfant et sa pâleur fantomatique, marquent le contraste avec ses sombres geôliers qui chaque nuit le tourmentent.

Dans la même veine, Pierre Puvis de Chavannes s’épanche sur l’histoire de  Mademoiselle de Sombreuil, jeune femme noble durant la Révolution qui, selon la légende, fut forcée de boire un verre de sang pour sauver son père. Mis en poème par Victor Hugo près de trente années plus tard, cet évènement culmine comme la métaphore de l’innocence brisée par la cruauté des hommes :

« Ô jour où le trépas perdit son privilège,

Où, rachetant un meurtre au prix d’un sacrilège,

Le sang des morts coula dans son sein virginal !

Entre l’impur breuvage et le fer parricide,

Les bourreaux poursuivaient l’héroïne timide

D’une insulte funèbre et d’un rire infernal ! » *

Léon Cogniet (1794-1880), Tête de femme et d’enfant, Esquisse pour la Scène du Massacre des Innocents, vers 1824, huile sur toile, Orléans, Musée des Beaux-Arts © Musée des Beaux-Arts
Léon Cogniet (1794-1880), Tête de femme et d’enfant, Esquisse pour la Scène du Massacre des Innocents, vers 1824, huile sur toile, Orléans, Musée des Beaux-Arts © Musée des Beaux-Arts

Plus encore, comme un rejet face à l’horreur de ces corps mutilés, offerts par les révolutionnaires sur l’autel de l’athéisme et du renversement de l’ordre établi, éclôt une nouvelle iconographie du sacrifice. Fers de lance de cette empathie picturale, femmes et enfants deviennent l’incarnation exaltée du drame qui se joue : Victor Huguenin sculpte des têtes et bustes de la scène du Massacre des Innocents ;  Xavier Sigalon esquisse une furieuse mais néanmoins admirable Athalie ordonnant le massacre des enfants de la race royale de David ; quand Léon Cogniet peint sa captivante Tête de femme et d’enfant, où une mère tente en vain de cacher son nouveau-né aux soldats, étouffant désespérément ses cris.

Puis, vient le moment de sombrer dans un autre versant de la violence : celui du fait-divers et du mélodrame. Délaissant une muséographie violacée au profit d’une atmosphère plus dynamique, scènes de crimes et membres disloqués se succèdent dans un tourbillon de dépouilles affolant. D’un côté de la pièce, se déroulent les étapes de la célèbre affaire Fualdès, de la rue Transnonain ou de l’Auberge rouge. Témoignages sordides, procès à rebondissements, récits de corps estropiés ou donnés en pâture aux cochons, déchaînent l’opinion publique qui se rue sur les pamphlets et journaux foisonnant de détails. Les artistes comme Théodore Géricault, en quête de modernité et de compositions à même de traduire le sensationnel, n’hésiteront pas à s’emparer de ces histoires funestes, mais terriblement fascinantes. On retrouve d’ailleurs avec plaisir, un accrochage de quelques études et morceaux anatomiques du peintre : équilibre fragile des sensations, oscillant entre crudité macabre et esthétique de ces membres entrelacés.

Théodore Géricault (1791-1824), Etude de pieds et de mains, 1818-1819, huile sur toile, Montpellier, Musée Fabre © Musée Fabre de Montpellier Agglomération – cliché Frédéric Jaulmes
Théodore Géricault (1791-1824), Etude de pieds et de mains, 1818-1819, huile sur toile, Montpellier, Musée Fabre © Musée Fabre de Montpellier Agglomération – cliché Frédéric Jaulmes

Comme un pendant fictionnel à ces crimes crapuleux vécus par la population, se tissent les intrications passionnelles et théâtrales des mélodrames. Victor Hugo, dès sa préface de Cromwell en 1827, pose les bases d’un romantisme littéraire où le beau et le sublime, sont désormais indissociables de la laideur et de la monstruosité ; tandis que les œuvres de William Shakespeare, en pleine redécouverte, deviennent une source d’inspiration majeure pour les artistes du XIXème siècle. Eugène Delacroix, dans pas moins de vingt toiles, déclinera la tragédie des Amants de Vérone dans Roméo et Juliette devant le tombeau des Capulets, ou la fatale destinée du Maure de Venise et son infortunée épouse dans Desdémone maudite par son père.

Eugène Delacroix (1798-1863), Roméo et Juliette devant le tombeau des Capulets, huile sur papier marouflé sur toile, Paris, musée national Eugène Delacroix © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Gérard Blot
Eugène Delacroix (1798-1863), Roméo et Juliette devant le tombeau des Capulets, huile sur papier marouflé sur toile, Paris, musée national Eugène Delacroix © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Gérard Blot

D’autres, à l’instar d’Emile Signol, se tourneront vers Walter Scott et son roman La Fiancée de Lammermoor, dans lequel la jeune Lucy Ashton poignarde à mort son époux, avant de sombrer dans la démence. Progressivement, un déplacement d’intérêt de la part du public est perceptible : lassé d’une héroïsation factice où l’homme est porteur de valeurs glorieuses et inaltérables, c’est à des personnages en proie à leurs démons et soumis à l’inéluctable qu’il veut à présent s’identifier.

Enfin, pour accéder aux tréfonds de l’âme et à l’au-delà, c’est par un petit escalier en colimaçon qu’il faut s’aventurer. Exigu et retors, il débouche sur une salle plongée dans une semi-obscurité, aux murs grenat et à l’intimité feutrée : le romantisme noir se dévoile dans un dernier souffle.

Inspirée du succès des romans gothiques anglais du XVIIIème siècle, l’iconographie puisant sa force dans l’occulte, les fantômes et les créatures fantastiques, ne tarde pas à se développer chez les artistes français. Versant dans une esthétique macabre et torturée, le motif de la femme envoûtante adepte de sorcellerie, côtoie en miroir celui de la jeune vierge enlevée par des figures repoussantes et démoniaques. Parallèlement, les Poèmes d’Ossian créés de toute pièce par l’Ecossais James Macpherson, rencontrent un fabuleux succès littéraire. Présentés par leur auteur comme des textes médiévaux inédits et narrant les exploits du jeune héros gaélique Fingal, les artistes – tel Jean Auguste Dominique Ingres, y ont puisé une inspiration guerrière et sentimentale aux accents chimériques, s’éloignant enfin de la tradition gréco-romaine.

Jean Auguste Dominique Ingres (1780-1867), Le Songe d’Ossian, 1866, graphite, lavis d’encre de Chine et rehauts de blanc sur deux calques, Montauban, musée Ingres (déposé par le département des arts graphiques du musée du Louvre) ©Montauban, musée Ingres/Cliché Guy Roumagnac
Jean Auguste Dominique Ingres (1780-1867), Le Songe d’Ossian, 1866, graphite, lavis d’encre de Chine et rehauts de blanc sur deux calques, Montauban, musée Ingres (déposé par le département des arts graphiques du musée du Louvre) ©Montauban, musée Ingres/Cliché Guy Roumagnac

Ainsi, qu’est-ce que l’effroi ? Une sourde violence assouvie sans entrave ? Des paysages désolés où la brume est maîtresse en ces lieux ? Ou l’angoisse poignante des spectres qui rôdent ? L’exposition peine à définir clairement les concepts qu’elle entend soulever, et l’on ressort au fond, un peu perdu : si beaucoup de cadavres s’étalent sur ces cimaises empourprées, est-ce à dire que l’on a embrassé toute la complexité de ce sentiment ? Devant le constat d’une utilisation indifférenciée des termes macabre et morbide, alors qu’ils n’en recouvrent pas le même sens, ou d’un parcours qui mêle réalité terrestre et monde de l’au-delà sans véritable transition, on peine à y voir clair. Face à des êtres vaincus par la folie ou cédant à des passions dévorantes, quelle définition de l’effroi retenir, quelle vision affronter ? Certes le sujet est obscur, mais une plus grande clarté du discours aurait été appréciable. A l’enthousiasme originel, succède donc une appréciation pondérée : une perpétuelle hésitation entre deux mondes, à l’image du chemin traversé.

…    

* Victor Hugo, Œuvres complètes : Odes et Ballades. Essais et Poésies diverses. Les Orientales, Ollendorf, 1912.

Thaïs Bihour

« Visages de l’effroi » – L’exposition se tient jusqu’au 28 février 2016 au Musée de la Vie Romantique. Plus d’informations sur http://www.vie-romantique.paris.fr/fr