Victor – A l’amour, à la mort
Une pièce subtile servie par une distribution haute en couleurs et pour le moins exceptionnelle. Victor nous emmène dans les frasques de l’amour, sans jamais tomber dans les ficelles faciles, ou les répliques de bas étage. Un merveilleux moment de théâtre alliant émotion et légèreté, une découverte très appréciée en cette période de rentrée théâtrale.
France. 1950. La guerre est encore dans les esprits. Victor (Grégory Gadebois) nous apparaît à sa sortie de prison. Il vient d’y passer une année, pour un délit qu’il n’a pas commis. Il vient d’y passer une année, pour un ami. Cet ami, Marc (Eric Cantona) est un personnage en vue dans la ville. Puissant homme d’affaires, aux manières parfois douteuses, mais qui ne peut se trouver compromis dans une affaire publique, sous peine de voir son empire naissant s’effondrer sur sa base d’argile encre fraîche.
La clé de l’intrigue qui va se dérouler devant nos yeux entre bientôt en scène, sous les traits de Caroline Silhol. Françoise est la femme de Marc, et Françoise est la passion de Victor. Là où l’on pourrait s’attendre à se trouver en présence d’un trio d’une comédie de boulevard plutôt classique, c’est un tout autre jeu auquel nous assistons une fois ce décor posé. Loin des quiproquos et des amants cachés dans le placard, Henri Bernstein nous propose au contraire la force de la franchise, du sentiment assumé, revendiqué, exprimé.
Comment pourrait-on s’en étonner devant un Grégory Gadebois tout en puissance, et un Eric Cantona à la majesté légendaire ? Pas de faux-semblant, l’honnêteté fait loi (et foi !) dans ce jeu maléfique et cruel de l’amour et du désamour. Otage parmi tous, l’amitié est malmenée, reniée, bafouée. Et puis, la nature humaine reprend ses droits. L’honneur comme seul guide. L’orgueil même.
Dans le cadre du théâtre Hébertot, Rachida Brakni nous propose une mise en scène simple pour laisser toute la force au texte et au jeu de ses acteurs. Les premiers changements de décor se font au noir, presque à vue. On y admire alors la simplicité du changement d’univers. Le passage d’un mur de prison à un intérieur d’abord modeste, puis clairement bourgeois. Les suivants se feront derrière le rideau. La sobriété des intérieurs comme des extérieurs résonne devant le tranchant des sentiments qui se dévoilent au fil de la pièce, et qui déchirent les âmes et les cœurs.
Serge Biavan et Marion Malenfant viennent compléter ce merveilleux trio, dans les rôles délicats des compagnons de passage, presque amis et pas complètement amants … Vous l’aurez compris, Victor (la pièce) est un cours de nature humaine. Terriblement réel car parfaitement interprété, sans exagération ni facilité. Du grand théâtre ! Bravo !
Pratique : Victor, au Théâtre Hébertot
Séances : du mardi au samedi à 21h, le dimanche à 17h
Casting : Grégory Gadebois, Eric Cantona, Caroline Silhol, Marion Malenfant, Serge Biavan
Texte : Henri Bernstein
Mise en scène : Rachida Brakni
Location : 01.43.87.23.23